A Lyon, le procès de l'ex-prêtre Bernard Preynat peut enfin démarrer

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Par Alexandre GROSBOIS - Lyon (AFP)
Publié le 14 janvier 2020 - 05:00
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L'ex-prêtre Bernard Preynat, accusé d'agressions sexuelles sur des mineurs, quitte le tribunal de Lyon, le 13 janvier 2020
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© PHILIPPE DESMAZES / AFP
L'ex-prêtre Bernard Preynat, accusé d'agressions sexuelles sur des mineurs, quitte le tribunal de Lyon, le 13 janvier 2020
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Suspendu lundi à la demande d'avocats en grève, le procès de l'ex-prêtre Bernard Preynat, dont les agissements pédophiles passés sous silence par l’Église ont déclenché l'affaire Barbarin, a débuté mardi à Lyon plus de 30 ans après les faits.

"L'audience reprend", a annoncé vers 9H40 la présidente Anne-Sophie Martinet face à une salle comble, avec pour fond sonore un rassemblement d'avocats qui manifestaient comme lundi contre la réforme des retraites dans la salle des pas perdus.

La journée doit être consacrée à l'évocation des faits, avant l'audition des victimes et l'interrogatoire au fond du prévenu. Me Frédéric Doyez, avocat de Bernard Preynat, a indiqué de son côté qu'il s'agira mardi de "caractériser les faits selon chaque victime et leur donner la parole". Le prévenu "s'exprimera lui aussi bien sûr", a-t-il ajouté.

La veille, la présidente du tribunal correctionnel avait accepté de reporter le procès de 24 heures sur demande de la plupart des avocats, le réduisant à quatre jours d'audience. "La personnalité du prévenu sera examinée demain", comme initialement prévu, a-t-elle averti mardi.

Les victimes, qui ont attendu des dizaines d'années pour que soient jugés des faits commis entre 1971 et 1991 alors qu'elles étaient âgées de 7 à 15 ans, ont hâte de parler et d'être confrontées à leur agresseur.

"J'ai beaucoup de choses à dire à Preynat et beaucoup de choses qui reviennent avec le procès", a déclaré avant l'audience l'une des parties civiles, Pierre-Emmanuel Germain-Thill.

A l'époque des faits, Bernard Preynat, alors vicaire-aumônier scout de Sainte-Foy-Les-Lyon (Rhône), faisait l'admiration des parents du diocèse, qui lui confiaient leurs enfants dans sa paroisse ou lors de camps à l'étranger.

Ce n'est qu'en 2015 que plusieurs anciens scouts brisent l'omerta de l’Église en accusant Preynat devant la justice d'attouchements, baisers sur la bouche et caresses réciproques contraintes, notamment sur le sexe.

- "Coupable" -

Âgé de 74 ans aujourd'hui, l'ex-curé réduit à l'état laïc au terme de son procès canonique l'été dernier, encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement. Reconnaissant la plupart des faits, il a eu le temps d'afficher sa contrition lundi face au tribunal avant l'annonce de la suspension des débats.

Se présentant d'emblée comme "coupable" de la souffrance des parties civiles, le prévenu, veste noire et barbe grise, a émis le souhait que "ce procès ait lieu le plus vite possible car cela fait déjà cinq ans que cette procédure a commencé".

L'enquête a révélé que ce titulaire d'un CAP de cuisinier ordonné en 1971 avait perpétré ses premières agressions contre des enfants dès l'âge de 17 ans, alors qu'il était moniteur de colonie de vacances, en 1962.

De son côté, l'intéressé soutient qu'il a suivi une thérapie à l’hôpital du Vinatier, près de Lyon, en 1967 et 1968, et totalement cessé ses abus au début des années 1990. Des signalements postérieurs ont été enregistrés mais l'enquête n'en a retenu aucun.

Ayant déjà livré ses aveux aux enquêteurs, Preynat sera sans aucun doute condamné, mais on ignore à quelle peine.

"Ce sont des faits qui auraient pu être jugés il y a 30 ans, on va savoir pourquoi on n'a pas frappé à la porte d'un tribunal au lieu de frapper à la porte d'un évêché. On va savoir pourquoi l'absence de réponse pénale a pu satisfaire à cette époque-là", a déclaré à l'AFP Me Doyez, pointant sans le dire la responsabilité de certains parents, tout en regrettant que le procès Preynat n'ait pas eu lieu en même temps que celui du cardinal Barbarin.

Sous l'impulsion de l'association de victimes "La Parole Libérée", Philippe Barbarin, Primat des Gaules depuis 2002, a été traduit puis condamné en mars 2019 à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir informé la justice et maintenu le prêtre en poste dans le diocèse jusqu'en 2015, alors que Bernard Preynat était passé aux aveux devant ses supérieurs dès 1991.

Désormais en retrait du diocèse - sa démission a été refusée par le pape - le cardinal Barbarin attend en coulisses la décision de la cour d'appel sur son dossier. Elle sera dévoilée le 30 janvier.

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