Toulouse : vente surprise à un collectionneur étranger de la toile attribuée au Caravage

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Par Hervé GAVARD - Toulouse (AFP)
Publié le 25 juin 2019 - 21:20
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L'expert Eric Turquin à Paris le 12 avril 2016, devant "Judith et Holopherne"
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© PATRICK KOVARIK / AFP/Archives
L'expert Eric Turquin à Paris le 12 avril 2016, devant "JUdith et Holopherne"
© PATRICK KOVARIK / AFP/Archives

Coup de théâtre: 48 heures avant sa mise en vente aux enchères, prévue jeudi à Toulouse, une toile attribuée au Caravage, "Judith et Holopherne", découverte dans un grenier, a été vendue de gré à gré, pour une somme inconnue, à un acheteur étranger.

Le tableau, "estimé 100 à 150 millions d'euros", et réalisé en 1607, va "donc quitter le sol français", souligne un communiqué de presse de la maison toulousaine de ventes Labarbe.

L'accord "est couvert par un engagement de confidentialité pour ce qui concerne le prix et l’identité de l’acheteur", a précisé la maison Labarbe, qui avait découvert la toile en 2014.

"Nous avons reçu une offre qu’il était impossible de ne pas transmettre aux propriétaires du tableau. Le fait que cette offre provienne d’un collectionneur proche d’un grand musée a convaincu le vendeur de l’accepter", souligne pour sa part l'expert en maîtres anciens, Eric Turquin, à qui l’œuvre avait été soumise quelques jours après sa découverte.

La toile sera "prochainement restaurée puis exposée dans un grand musée", elle sera ainsi "mise en lumière aux yeux de tous", ce qui a emporté la décision du vendeur, a assuré la maison Labarbe.

- Débat sur l'authenticité -

Cette vente surprise vient trancher dans l'immédiat le débat sur l'authenticité de l’œuvre, qui devait être mise à prix pour 30 millions.

Après sa découverte, l'Etat avait classé le tableau +trésor national+, empêchant, jusqu'en novembre 2018, sa vente à l'étranger. Mais le manque de certitude sur son authenticité et sa valeur ont finalement joué dans sa décision de ne pas s'en porter acquéreur.

Le marché de l'art attendait du coup avec fébrilité les enchères prévues, présumées pouvoir atteindre des sommets, jusqu'à 150 millions d'euros.

Depuis sa découverte, les experts sont divisés sur cette toile, qui représente la scène biblique dans laquelle Judith incarne la résistance du peuple hébreu, dans un clair-obscur dont Michelangelo Merisi, dit le Caravage, était le maître.

Jusque là, seules 65 œuvres du Caravage, qui ne signait pas ses toiles, sont connues dans le monde.

Dans une explosion de violence, en présence de sa servante, Judith tranche le cou du général assyrien Holopherne, qui lève les yeux sur elle.

Eric Turquin y voit un Caravage de haute facture et même révolutionnaire, tant par la vivacité du coup de pinceau que la profondeur du champ.

Un expert mondialement reconnu du maître italien, Nicola Spinosa, avait affirmé en 2016 y voir aussi "un Caravage authentique".

- "Puissante et magnifique" -

Mais d'autres considèrent que cette huile est une copie du peintre flamand Louis Finson (1580-1617), grand admirateur du Caravage et copiste assidu de ses tableaux.

Une autre "Judith et Holopherne" du Caravage, datant de 1598 existe au Palais Barberini à Rome. Elle diffère de la toile toulousaine, notamment par la représentation de Judith, peinte avec plus de sensualité sous les traits d'une femme plus jeune, vêtue de vêtements clairs.

Cet ultime rebondissement vient ajouter une ligne à l'histoire rocambolesque de ce tableau, dont l'origine reste inconnue.

Apparemment oubliée dans le grenier toulousain pendant plus de cent ans, l'huile de 144 sur 173 cm avait été retrouvée grise de crasse sous de vieux matelas.

Avait-elle été apportée par un aïeul -- un officier d'une expédition napoléonienne -- de la vieille famille toulousaine chez qui le tableau a été découvert, ou est-elle arrivée par d'autres voies ? Le mystère reste total.

Avant son arrivée à Toulouse, la toile avait été exposée à Londres, New-York, puis Paris. Dans la ville rose, plus de 6.000 personnes avaient défilé pour la voir.

"Il ne fallait pas rater l'occasion", avait relevé pour l'AFP Marie Cour-Carol, une juriste de 42 ans, s'affirmant émerveillée par un tableau "magnifique, très puissant".

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