Traversées de la Manche : dans les dunes, sur les traces des passeurs de migrants

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Par Julia PAVESI - Oye-Plage (France) (AFP)
Publié le 10 janvier 2019 - 12:57
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Des gendarmes patrouillent sur la plage de Oye-Plage, balayée par un faisceau de lumière d'un hélicoptère, à la recherche de traces de passeurs de migrants, le 9 janvier 2019
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© Philippe HUGUEN / AFP
Des gendarmes patrouillent sur la plage de Oye-Plage, balayée par un faisceau de lumière d'un hélicoptère, à la recherche de traces de passeurs de migrants, le 9 janvier 2019
© Philippe HUGUEN / AFP

Des restes de couverture de survie ou de matériel nautique abandonnés dans les dunes: le long du littoral, près de Calais, les patrouilles de gendarmes se relaient, dans le froid et la nuit noire, pour repérer la présence de passeurs de migrants... qui ont souvent un temps d'avance.

Le long de la plage de 11 km de Oye-Plage (Pas-de-Calais), entre les ports de Calais et Dunkerque, trois gendarmes de la brigade locale font des rondes depuis la fin de l'après-midi. Il est 20h30. Au large, on aperçoit les lumières des navires qui se suivent.

Bonnet sur la tête, jumelles thermiques dans une main, lampe torche dans l'autre, ils longent la bande de sable pour trouver des indices de la présence de passeurs et de migrants qui essaieraient de mettre à l'eau un bateau pneumatique pour rejoindre les côtes anglaises.

Des tentatives qui se multiplient depuis fin novembre et contre lesquelles les autorités françaises et britanniques entendent lutter. La densité du trafic, les courants importants, les hauts fonds et l'eau glacée rendent la traversée du détroit très difficile et extrêmement dangereuse. Ce soir-là, le vent souffle fort.

"On a eu plusieurs fois des appels de détresse parce qu'en mer, ils se retrouvaient coincés. Donc l'objectif, c'est de les empêcher de prendre la mer et de traverser, de lutter contre les réseaux de passeurs qui prennent de nouveaux modes d'action", explique la cheffe d'escadron Marie-Laure Pezant, commandante de la compagnie de Saint-Omer.

Les patrouilles sont quotidiennes et plus fréquentes, commencent en journée et se terminent après minuit ; un appel aux réservistes a été lancé.

"Nous avons développé une coordination entre les différents services. Maintenant (...) on échange nos informations", poursuit-elle, constamment en liaison radio avec les différentes équipes, dont celle de l'hélicoptère, qui vient survoler et éclairer la plage d'un puissant faisceau.

A terre, ses hommes s'avancent près d'un trou de plus d'un mètre de profondeur creusé dans le sable, repéré il y a quelques jours. Un indice que des passeurs sont passés par là, pour stocker du matériel pour leurs "clients" -le plus souvent iraniens - en attendant une météo favorable pour le départ.

- 80 km de côtes -

Puis la patrouille bifurque sur un sentier, où différents déchets restent accrochés dans les ronces. L'un des gendarmes vient de repérer quelque chose: la notice d'utilisation d'un jerrican destiné à équiper les bateaux pneumatiques.

"Manifestement, ça a été abandonné ici lors d'un transport. On peut constater que c'est du matériel neuf. La notice est en anglais essentiellement. Tout laisse supposer qu'il y a eu des transports à partir d'ici en direction de la plage", constate l'adjudant-chef Sébastien Hotin, commandant de la brigade de Oye-Plage.

Dans un bunker au sommet de la dune, les patrouilles ont repéré un sac de couchage, des rasoirs cassés, plusieurs emballages de préservatifs, que les migrants utiliseraient pour protéger leurs effets personnels de l'eau.

"Il y a deux jours, on a trouvé un campement, avec des sacs d’alimentation non entamés, il n'y avait plus personne bien sûr," raconte Christophe - qui taira son nom de famille - adjudant-chef et adjoint au commandant d'unité du peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (Psig) de Wizernes.

Si les secours et interpellations d'embarcations en mer sont fréquents, les forces de l'ordre n'ont jusqu'à présent que rarement pris sur le fait, à terre, passeurs ou migrants.

"Quand vous voyez la zone à contrôler, c'est plus facile pour eux de se cacher que pour nous de les trouver, c'est évident", reconnaît Didier, de la gendarmerie mobile de Calais, venu avec deux autres collègues en treillis relever la brigade locale.

D'autant plus que les passeurs changeraient régulièrement de lieu de mise à l'eau, sur une zone entre Wimereux et la Belgique, soit 80 km de côtes.

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