Abou Khattala, cerveau ou spectateur de l'attaque de Benghazi ?

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Par AFP
Publié le 02 octobre 2017 - 23:48
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Les locaux du consulat américain à Benghazi, le 14 septembre 2012, quelques jours après l'attaque qu
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Les locaux du consulat américain à Benghazi, le 14 septembre 2012, quelques jours après l'attaque qui a coûté la vie à l'ambassadeur américain en Libye
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Un Libyen suspecté d'avoir fomenté en 2012 une attaque ayant tué l'ambassadeur des Etats-Unis à Benghazi a comparu lundi à Washington, l'accusation le présentant comme le cerveau de l'opération, la défense comme un simple témoin.

Portant une chemise et une longue barbe blanches, Ahmed Abou Khattala s'est assis à côté de ses avocats au premier jour de son procès dans un tribunal fédéral de la capitale américaine. L'homme de 46 ans a chaussé une oreillette lui permettant de suivre les débats, traduits pour lui en langue arabe.

L'attaque surprise de la mission diplomatique de Benghazi, au soir du 11 septembre 2012, et le bombardement au mortier d'une annexe de la CIA, dans la même ville cette même nuit, avaient fait quatre morts et choqué les Etats-Unis. Aucun ambassadeur américain n'avait ainsi été tué depuis 1979.

"John Christopher Stevens a suffoqué jusqu'à en mourir au milieu d'une épaisse fumée noire", a relaté John Crabb, le procureur représentant le gouvernement américain.

Une vingtaine d'hommes armés avaient pris d'assaut le complexe diplomatique, avant d'incendier la maison consulaire où étaient réfugiés l'ambassadeur et un employé du département d'Etat, Sean Smith. Ils moururent asphyxiés.

Plus tard, les activistes ont tiré au mortier sur un bâtiment utilisé par la CIA dans un autre quartier de Benghazi, un port de l'est de la Libye. Les obus ont tué Glen Doherty et Tyrone Woods, deux anciens membres des Navy Seals, une force d'élite.

S'exprimant face aux douze jurés qui siègeront plusieurs semaines, M. Crabb a tenté de les convaincre de l'implication de l'accusé dans l'attaque, en le présentant comme quelqu'un vouant à l'Amérique une "haine" tenace.

- Maquette, photos, vidéos -

Désignant la progression des assaillants sur une maquette du terrain de la résidence diplomatique, le procureur a diffusé durant l'audience des photos et vidéos de surveillance où apparaît parfois l'accusé, sans toutefois que celui-ci ne soit en train de tirer ou d'avoir un geste hostile.

"Abou Khattala n'a pas allumé l'incendie lui-même, il n'a pas actionné les mortiers", a soutenu M. Crabb. "Abou Khattala a organisé l'attaque, il l'a mise en route".

Cette thèse a été catégoriquement démentie par les avocats du détenu, qui répond de 18 charges criminelles, parmi lesquelles meurtres et association terroriste, et encourt la réclusion à perpétuité.

"Quatre Américains sont morts en service pour leur pays. Mais Abou Khattala n'est pas le responsable de cette tragédie", a plaidé Jeffrey Robinson, l'avocat du Libyen.

Il a décrit son client comme un homme religieux et conservateur, un "patriote libyen" qui s'est battu "aux côtés des Américains" contre le régime du dictateur Mouammar Kadhafi, déchu en 2011.

Le jour des faits, entendant parler d'une attaque visant la mission diplomatique, "il est allé voir ce qui se passait", a expliqué M. Robinson. Les Américains rescapés ayant déjà quitté les lieux, "il est entré et est ressorti (du complexe), la porte était ouverte".

- Procès test -

Il y a seulement quelques années, un homme comme Abou Khattala aurait probablement été transféré directement à Guantanamo et n'aurait connu que la détention et la justice militaires.

Ce procès doit donc permettre d'évaluer la capacité de la justice civile américaine à juger des suspects étrangers capturés par des commandos dans des conditions de terrain de guerre.

Après l'attaque, Ahmed Abou Khattala n'avait pas choisi la clandestinité, continuant de vivre à Benghazi. Il avait même donné des interviews, affirmant avoir été présent au consulat américain.

Sa capture lors d'une opération commando en 2014 avait été rendue possible grâce à la collaboration d'un ami de Khattala, qui a été récompensé par les autorités américaines d'une somme de 7 millions de dollars.

Le suspect a ensuite été conduit à bord d'un bâtiment de l'US Navy, où il a été interrogé d'abord selon la méthode de la CIA - au secret et avec un contenu classé secret défense - puis par des agents du FBI, en se voyant notifier ses droits.

Le navire avait mis 13 longs jours à rallier la côte américaine, apparemment en raison d'un problème de moteur. Les défenseurs de Khattala ont accusé les autorités d'avoir prolongé à dessein le voyage afin de le priver le plus longtemps possible d'un avocat.

Les interrogatoires réalisés par le FBI lors de la traversée sont versés au procès mais "n'ont pas été enregistrés de façon délibérée", a dénoncé M. Robinson.

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