"Annulez nos dettes !" : la colère monte en Iran après le tremblement de terre

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Par AFP
Publié le 14 novembre 2017 - 21:34
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Des immeubles détruits à Sar-e Pol-e Zahab, le 14 novembre 2017
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© ATTA KENARE / AFP
Des immeubles détruits à Sar-e Pol-e Zahab, le 14 novembre 2017.
© ATTA KENARE / AFP

"Regardez, tout est détruit! Que le gouvernement renonce au moins à réclamer le remboursement de nos prêts au logement". Comme Morteza Akbari, les habitants de Shahid Shiroudi pleurent un rêve envolé devant les dégâts du séisme qui a frappé dimanche l'ouest de l'Iran.

Dans ce quartier populaire de Sar-e Pol-e Zahab, à 520 km au sud-ouest de Téhéran, la colère est d'autant plus amère que, pour certains habitants, s'y installer avait été un choix par défaut.

"Il n’y a que des pauvres et des ouvriers ici", dit M. Akbari. "J'y suis venu par détresse, ce n’est pas un endroit pour vivre".

Enseignant, ce trentenaire sous-loue un logement à Maskan-e Mehr, un ensemble d'immeubles éventrés.

En Iran, ce nom qui signifie littéralement "logement de l'affection" est intimement lié à celui de l'ex-président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, au pouvoir de 2005 à 2013.

Sous son impulsion, les logements sociaux du programme Maskan-e Mehr -devenus un symbole de la politique populiste de M. Ahmadinejad- ont poussé un peu partout dans le pays. Pour beaucoup d'Iraniens défavorisés, ils étaient la promesses d'un logement décent, accessible.

A Sar-e Pol-e Zahab, ceux qui y ont souscrit ont perdu le peu qu'ils avaient.

"J’ai dépensé tout le prêt accordé par le gouvernement pour encourager les jeunes à se marier et acheter des meubles ou d’autres biens. Aujourd’hui, il ne me reste plus rien", se désole M. Akbari. "Je remercie vraiment Ahmadinejad. Il avait dit que les logements sociaux résisteraient à un séisme de 8 sur l'échelle de Richter".

- "On était heureux" -

Sar-e Pol-e Zahab, 85.000 habitants, est la ville qui a payé le plus lourd tribut au séisme de dimanche, d'une magnitude de 7,3.

Si la structure et le plafond des bâtiments à Maskan-e Mehr ont résisté, les façades se sont effondrées. Le quartier ressemble à une véritable zone de guerre, où les habitants continuent d'évacuer leurs affaires.

Depuis le troisième étage d'un des appartements, deux hommes tirent un tapis qu'ils font tomber à travers l'espace béant qui a remplacé le mur extérieur.

"Je vivais au quatrième étage. Je suis propriétaire. J’ai amassé péniblement l'argent pour acheter cet appartement", dit Ali Biabani, la cinquantaine.

"Qu'est-ce qu'on peut faire maintenant? Au début, j'ai versé 170 millions de rials (environ 4.000 dollars) et ça fait trois ans que je paie des traites de (70 dollars) chaque mois. On était heureux parce qu'on échappait à la pauvreté", dit cet ouvrier. "Regardez vous-même, personne ne peut plus vivre là-dedans."

Reza Moradi, un autre ouvrier, est dans la même situation. "Il me reste encore 144 mensualités" de 70 dollars dit-il, affirmant gagner 350 dollars par mois.

- "Coupables" -

Un million de logements sociaux ont été construits sous le programme Maskan-e Mehr en périphérie d'agglomérations ou dans des villes nouvelles.

Le projet est décrié par les adversaires politiques de l'ancien président, pour qui il a été à l'origine de la très forte inflation (jusqu'à 40% par an) qui a frappé le pays pendant son second mandat.

Le président Hassan Rohani, qui a visité la ville mardi, a lancé une pique contre son prédécesseur en affirmant qu'il fallait voir pourquoi certains logements gouvernementaux avaient subi des dégâts importants. "Il faut chercher les coupables et les présenter à la population", a-t-il déclaré, d'autant que certains logements collectifs construits par des investisseurs privés ont parfaitement résisté.

Mais dans la ville défigurée, où nombre d'immeubles et maisons individuelles ont été totalement détruits, les logements sociaux ne sont pas les seuls à avoir subi de tels dégâts. Les normes antisismiques sont en effet peu respectées dans le pays.

"J'ai tout perdu. Une partie de mes affaires ont été détruites dans le séisme et le reste au moment où on les a lancées du troisième étage. Il ne reste plus que deux tapis", raconte Lida Esmaili, la trentaine, assise avec sa fillette à même le sol entre deux rangées d'immeubles éventrés.

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