Colombie : cessez-le-feu avec l'ELN maintenu malgré le meurtre d'un indigène

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Par AFP
Publié le 30 octobre 2017 - 18:53
Mis à jour le 31 octobre 2017 - 03:15
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Le président colombien Juan Manuel Santos annonçant la signature d'un cessez-le-feu avec la guérilla
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Le président colombien Juan Manuel Santos annonçant la signature d'un cessez-le-feu avec la guérilla de l'ELN, le 4 septembre 2017 à Bogota
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La trêve avec l'ELN, la dernière guérilla de Colombie, traverse sa première crise après le meurtre d'un leader indigène, reconnu par les rebelles et qui mine la confiance précaire envers ce cessez-le-feu historique signé dans le cadre des pourparlers de paix.

Le gouvernement a décidé lundi de maintenir le cessez-le-feu, en vigueur depuis le 1er octobre pour une durée initiale de trois mois, après que l'Armée de libération nationale (ELN, guévariste) eut admis que des guérilleros de l'un de ses "fronts" avaient tué mercredi Aulio Isarama Forastero, 29 ans, et eut demandé pardon pour cela.

"Aucun incident en soi ne sera la cause de la rupture unilatérale et automatique du cessez-le-feu", a fait savoir le Haut commissariat pour la paix, dans un communiqué.

Il s'agit toutefois d'un "incident grave" qui va être examiné par la mission de vérification du cessez-le-feu, composée de l'ONU, des deux parties en pourparlers de paix depuis février, et de l'Eglise catholique.

Le gouvernement a ajouté que sa délégation et celle de l'ELN au dialogue de paix ne se prononceraient sur "la continuité du cessez-le-feu" qu'une fois que la mission aurait rendu son avis.

Ce meurtre, qui génère des tensions avec cette guérilla a eu lieu dans le département du Choco (nord-ouest), en pleine vague d'assassinats de militants des droits sociaux et humains, qui a fait 200 morts depuis janvier 2016, selon le Défenseur du peuple, l'entité publique de protection des droits fondamentaux.

- Confiance fragilisée -

Le leader indigène Aulio Isarama Forastero a été retenu par l'ELN qui a affirmé qu'elle voulait enquêter sur son implication présumée dans des actions de "renseignement militaire".

Mais "il a refusé de marcher et s'est jeté sur l'un de nos guérilleros, avec l'issue tragique que l'on connaît", a précisé dans un communiqué diffusé dimanche le Front de guerre occidental Omar Gomez de la guérilla, qui opère dans la zone.

Pendant la trêve prévue pour durer jusqu'au 9 janvier, l'ELN s'est aussi engagée à suspendre ses opérations d'enlèvements et ses attentats contre les infrastructures pétrolières.

Bien qu'aucune des deux parties n'ait évoqué de violations du cessez-le-feu, le premier de l'histoire avec cette guérilla apparue en 1964, des experts du conflit armé qui déchire la Colombie depuis plus d'un demi-siècle estiment que ce meurtre en affaiblit la crédibilité.

"Cette maladresse fait que tout le monde commence à réclamer la suspension de la session" des pourparlers, a déclaré à l'AFP Ariel Avila, de la Fondation Paix et Réconciliation.

Selon cet expert, bien que les parties puissent difficilement renoncer au cessez-le-feu en dépit du caractère "douloureux" du crime commis, l'ELN "n'a pas compris" la complexité des soutiens au processus de paix et qu'un tel meurtre "ne fait que miner la confiance dans un gouvernement affaibli".

- Multiples fronts pour Santos -

"Nous condamnons cet assassinat, comme nous condamnerions n'importe quel assassinat car pour nous, la vie est la chose la plus précieuse", a déclaré lundi le président colombien Juan Manuel Santos lors d'un déplacement au Canada.

A moins d'un an de son départ du pouvoir le 7 août, M. Santos entend avancer dans les négociations avec l'ELN, tandis qu'il se heurte à de multiples obstacles dans la mise en oeuvre de l'accord de paix signé en novembre 2016 avec la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), qui s'est reconvertie en parti politique.

M. Santos, qui veut la "paix complète", se heurte non seulement au rejet de l'opposition, mais aussi à la détérioration de la coalition gouvernementale au Parlement, élément clé pour l'approbation des textes d'application de l'accord avec les Farc.

Quant à l'ELN, le meurtre du leader indigène génère des doutes sur sa cohésion.

Il montre qu'au moins le front impliqué dans ce crime "n'a pas décidé de totalement cesser" son activité, souligne Frédéric Massé, professeur à l'université El Externado de Bogota.

Selon cet analyste, l'état-major de l'ELN va devoir en répondre publiquement, au-delà du pardon présenté ce weekend. Le plus dur serait "la reconnaissance (du fait) que ce front de guerre occidental est dissident", a-t-il déclaré à l'AFP

Le gouvernement et l'ELN, qui compte encore 1.500 combattants selon les autorités, ont entamé mercredi le quatrième cycle de leurs pourparlers à Quito, capitale de l'Equateur voisin.

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