Conseil de sécurité : l'entrée en piste de grandes puissances en 2019

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Par Philippe RATER - Nations unies (Etats-Unis) (AFP)
Publié le 26 décembre 2018 - 07:45
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Réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, le 26 novembre 2018 à New York
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© Don EMMERT / AFP/Archives
Réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, le 26 novembre 2018 à New York
© Don EMMERT / AFP/Archives

A compter du 1er janvier, cinq nouveaux pays entrent au Conseil de sécurité de l'ONU pour deux ans. Parmi eux, l'Allemagne, l'Indonésie, l'Afrique du Sud, trois puissances régionales. Reste à savoir si les consensus seront plus faciles avec des Etats-Unis de plus en plus imprévisibles.

La "star" du Conseil de sécurité (Nikki Haley) partie, la Maison Blanche entend la remplacer par une ex-journaliste, Heather Nauert, porte-parole du Département d'Etat.

"Un grand nombre de diplomates sont focalisés sur le changement d’ambassadrice américaine", indique à l'AFP Richard Gowan de l'Université de l'ONU. Plusieurs craignent que Heather Nauert "n'adopte une ligne +America First+ plus dure que celle de Nikki Haley".

"Unilatéraliste" et "isolationniste", "l'Amérique a largué les amarres", note un diplomate. Ce "durcissement américain" va faire "de l'ONU une cible privilégiée", craint-il.

En échec récurrent sur la Syrie, le Conseil de sécurité avait fait preuve d'unité en 2017 avec une triple série de sanctions contre la Corée du Nord. En 2018, la désunion a prédominé.

"Les échanges ont souvent été brutaux, on ne cherche même plus des consensus, plus personne ne s'écoute, les votes de procédure se multiplient, les positions sont polarisées", résume un autre diplomate. Fin 2018, à propos du Yémen, le Conseil a vu les Etats-Unis menacer d'un veto un texte de son plus proche allié en principe, le Royaume Uni, un évènement inouï, traumatisant pour Londres, rapporte un ambassadeur du Conseil sous anonymat.

En public, le ton est parfois acerbe. "Il n'y a pas de recherche de compromis", "ce n'est pas la première fois qu'on nous dit +c'est à prendre ou à laisser+", a ainsi dénoncé le Russe Vassily Nebenzia lors d'une session sur la Centrafrique.

Le 21 décembre, la Bolivie, membre non-permanent sortant, a aussi laissé éclater sa colère. "Nous exigeons d'être pris en considération", a lancé ce pays, critiquant un "manque de transparence et de respect" lors de négociations chaotiques sur l'envoi d'observateurs sur le sol yéménite.

Pour Moscou, les maux du Conseil sont à imputer "aux plumes, monopolisées par la troïka", autrement dit les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France à qui revient par tradition et intérêt nombre de résolutions à rédiger sur les conflits dans le monde.

Qu'en sera-t-il de l'harmonie avec l'Allemagne, l'Afrique du Sud - deux candidats à très long terme à un siège de membre permanent - ou l'Indonésie, accompagnées de la Belgique et de la République dominicaine? Ces pays succéderont à la Suède, au Kazakhstan, à l'Ethiopie, aux Pays-Bas et à la Bolivie.

- "Membres élus" -

Avec quelque 100.000 Casques bleus sur le terrain, l'ONU reste confrontée à des défis majeurs. Comment pousser à la paix avec un Conseil que le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, trouve "plus divisé que jamais"?

Réunions publiques ou à huis clos, c'est du pareil au même pour les divisions, déplore, dépité, un diplomate suédois sur le départ.

Pour la première fois, les cinq nouveaux arrivants se sont entendus avec les cinq autres membres non-permanents du Conseil (Pologne, Pérou, Koweït, Guinée équatoriale et Côte d'Ivoire) pour se partager des présidences de comités et en présenter la liste au "P5", le groupe des cinq permanents (Etats-Unis, Russie, Chine, France et Royaume Uni).

"Accepté sans problème", se réjouit un diplomate d'un petit pays, en rappelant que la pratique jusqu'alors consistait à batailler en coulisses de manière bilatérale. Les dix non-permanents "ne vont pas contrebalancer le P5 mais peuvent jouer un rôle", veut croire cette source.

Illustration symbolique du rejet d'une structure héritée de l'après-guerre et qui ne correspond plus au monde d'aujourd'hui, les cinq nouveaux ne veulent pas être appelés "membres non permanents" mais "membres élus".

Le moteur franco-allemand pourrait aider à gommer l'impression d'un Conseil à deux vitesses. "Les Allemands et les Français vont travailler en étroite coopération pour montrer que l'Europe pèse toujours en multilatéral en dépit du retrait du Royaume-Uni" de l'Union européenne, prédit Richard Gowan.

De son côté, l'Indonésie pourrait gêner la Chine. "Les Indonésiens ont une équipe solide et pourraient organiser des débats du Conseil sur la persécution des musulmans en Birmanie", note cet expert de l'ONU.

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