Dans la Ghouta ravagée, les Syriens de retour ne reconnaissent pas leur maison

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Par Maher AL MOUNES - Zamalka (Syrie) (AFP)
Publié le 12 avril 2018 - 17:08
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Un combattant prorégime parle à une femme qui cherche sa maison dans un quartier détruit de l'ancienne ville rebelle de Zamalka, dans la Ghouta orientale, près de Damas, le 11 avril 2018
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© Youssef KARWASHAN / AFP
Un combattant prorégime parle à une femme qui cherche sa maison dans un quartier détruit de l'ancienne ville rebelle de Zamalka, dans la Ghouta orientale, près de Damas, le 11 avri
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Sourcils froncés, Oum Mohammed examine une rangée d'habitations détruites, incapable de retrouver sa maison. En rentrant chez eux, des habitants de la Ghouta orientale près de Damas ne reconnaissent même pas leurs quartiers, dévastés par les bombardements du régime.

"Ma maison était à côté du lycée, dans la rue al-Qaboun. Je n'ai pu retrouver ni le lycée, ni même la rue", se lamente la quinquagénaire, qui a passé plus de dix ans dans la localité de Zamalka, dans la Ghouta orientale.

Mi-février, les forces prorégime ont lancé une offensive destructrice pour reprendre les régions rebelles de la Ghouta orientale, faisant plus de 1.700 morts et provoquant d'énormes destructions.

Les habitants, qui avaient fui les combats par dizaines de milliers, ont commencé à retourner.

"Le quartier est méconnaissable, je ne retrouve aucun de ses principaux repères", lâche Oum Mohammed vêtue d'un long manteau assorti au foulard marron qui couvre ses cheveux, contemplant le paysage de dévastation qui l'entoure.

Le long des rues envahies par les décombres et la tôle tordue, s'alignent les immeubles résidentiels transformés en carcasses de béton éventrées. Ici, un toit s'est écroulé, un peu plus loin des murs sont tombés.

- Désolation -

La Russie, allié du régime syrien, a salué jeudi la reconquête totale de la Ghouta orientale, alors que les départs de combattants et de civils de Douma, la dernière poche rebelle, se poursuivent après que les insurgés ont accepté de partir.

Des semaines durant, frappes aériennes et tirs d'artillerie ont aplati les localités rebelles.

Aidée par un soldat syrien, Oum Mohammed escalade les monticules de gravats, pointant du doigt une maison, puis une deuxième, visitant un bâtiment, puis un autre, toujours dans l'espoir de retrouver son domicile.

"J'ai risqué ma vie pour venir ici. Je ne partirais pas avant de retrouver ma maison", lance-t-elle. "Zamalka était un paradis. Maintenant il y a des barricades partout, toutes les entrées sont minées".

Des centaines de personnes avaient attendu mercredi avec impatience à la périphérie de la Ghouta, le déblaiement des gravats pour ouvrir les principales routes menant dans l'ancien verger de Damas.

Un bulldozer démonte les barricades et les sacs de sable pour permettre le passage des habitants et un convoi de journalistes, qui participent à une visite organisée par les autorités de Damas.

- "M'asseoir dans ma maison" -

L'attente ne fait pas peur à Oum Rateb. Elle avait apporté avec elle une petite chaise et une couverture pour se protéger du soleil de plomb.

"Je suis venue seule pour voir ma maison à Kafr Batna, sans savoir si elle tient encore debout", confie la dame de 65 ans.

"Même s'il ne reste plus que de la terre, je vais étaler cette couverture et m'asseoir dans ma maison", lance-t-elle.

Fouad Mahjoub a dû attendre des heures avec sa famille, avant de pouvoir enfin retourner dans sa localité d'Aïn Tarma pour essayer de retrouver sa maison et son atelier de couture.

"Je suis là depuis sept heures du matin", raconte M. Mahjoub, ruisselant de sueur, faisant passer le temps en dessinant à l'aide d'une baguette de bois des cercles sur le sol.

"J'ai abandonné tout ce que je possédais. J'espère que ma maison et mon atelier n'ont pas été détruits", dit-il.

Désignant sa petite-fille Khadija, il s'émeut. "Elle a six ans, et n'a jamais vu la maison de son grand-père. Elle ne connaît pas Aïn Tarma, seulement dans les photos. Mais si on revient s'y installer, je rattraperai avec elle le temps perdu".

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