En Laponie, grand déballage sur des agressions sexuelles massives

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Par AFP
Publié le 28 novembre 2017 - 18:10
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Des enfants jouent le 27 novembre 2017 devant le centre Arran d'activité sami dans le village de Dra
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Des enfants jouent le 27 novembre 2017 devant le centre Arran d'activité sami dans le village de Drag, situé dans la commune de Tysfjord, secouée par un grand déballage sur des agr
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Une petite commune de Laponie norvégienne a été secouée mardi par un grand déballage sur des agressions sexuelles massives exhumées grâce aux témoignages de victimes après une très longue défiance envers les autorités.

Au terme d'un an et demi d'enquête, la police a annoncé avoir mis au jour plus de 150 cas d'agressions sexuelles, y compris sur de très jeunes enfants, étalées sur plusieurs décennies à Tysfjord, commune de moins de 2.000 habitants nichée au-dessus du cercle polaire arctique.

L'affaire a provoqué une onde de choc dans le royaume nordique par son ampleur mais aussi parce qu'elle révèle le fossé entre la société norvégienne et les Samis (on disait autrefois Lapons), peuple indigène auquel appartiennent la plupart des victimes et des agresseurs.

Une enquête avait été ouverte après la publication en juin 2016 dans le journal Verdens Gang (VG) de témoignages de 11 femmes et hommes disant avoir été sexuellement agressés sur ces terres vastes et reculées où l'on vit encore largement de l'élevage de rennes et de la pêche.

Dans un rapport publié mardi, la police dit avoir exhumé 151 cas d'agressions sexuelles, dont 43 viols. Une grosse centaine d'entre elles ont été classées, le plus souvent pour cause de prescription, certains faits remontant à 1953.

- Victimes de 4 à 75 ans -

Les enquêteurs ont identifié 82 victimes, âgées de 4 à 75 ans, et 92 suspects --dont trois femmes--, certains tombant dans les deux catégories. Environ 70% appartenaient à la communauté samie et un bon nombre étaient aussi membres du laestadianisme, une branche conservatrice du protestantisme.

"La police n'a aucune raison d'affirmer que l'appartenance ethnique ou que les croyances religieuses en soi puissent expliquer les agressions qui ont eu lieu", a déclaré la commissaire Tone Vangen lors d'une conférence de presse.

Mais elle a souligné que des "mécanismes" propres à ces milieux "ont fait que les choses sont difficilement remontées à la surface".

Elle a notamment évoqué la repentance auprès des autorités religieuses plutôt que judiciaires et "un fort besoin de serrer les rangs dans la famille dans une situation où l'on ressent que la société norvégienne vous toise".

La responsable a aussi présenté les excuses de la police qui n'aurait pas ouvert de dossier après le dépôt de plusieurs plaintes. L'ouverture d'une enquête dans le sillage du tapage médiatique l'an dernier a contribué à délier les langues.

- Le silence répond au silence -

Directeur d'un centre culturel sami à Tysfjord, Lars Magne Andreassen s'est dit partagé entre "peine" et "fierté". "La peine de constater qu'il y a eu tant de cas sur de si nombreuses années, et graves pour certains" mais aussi "la fierté car la société a osé rompre le silence".

Longtemps victimes de discriminations au point de recevoir les excuses officielles du roi Harald en 1997, les Samis ont vu leurs modes de vie traditionnels étroitement liés à la nature menacés par les activités modernes (exploitation d'hydrocarbures, activités minières, éoliennes, routes...).

Difficiles à dénombrer --65.000 personnes vivent en Laponie norvégienne-- en raison des flux migratoires et des mélanges ethniques, les Samis nourrissent souvent une certaine méfiance vis-à-vis d'Oslo et des autorités en général.

"Dans l'affaire Tysfjord, au silence des victimes a répondu celui des autorités", a déclaré M. Andreassen à l'AFP. "Ce n'est pas tant le fait que les Samis ont un problème culturel dans lequel il faudrait faire le ménage que le fait que personne ne les a écoutés", a-t-il souligné.

"L'étendue (des faits, ndlr) est énorme", a pour sa part réagi le maire de Tysfjord, Tor Asgeir Johansen. "C'est une petite communauté et c'est clair que ça la marque", a-t-il dit à l'agence NTB.

Deux personnes ont à ce jour été inculpées, devant répondre de dix chefs d'accusation, selon la police qui a précisé que d'autres mises en examen pourraient suivre.

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