Face à l'ogre internet, les commerçants de Darlington font de la résistance

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Par Patrice NOVOTNY - Darlington (Royaume-Uni) (AFP)
Publié le 14 septembre 2018 - 08:45
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Commerce de fruits et légumes sur le marché de Darlington dans le nord-est de l'Angleterre, le 6 septembre 2018
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© OLI SCARFF / AFP
Commerce de fruits et légumes sur le marché de Darlington dans le nord-est de l'Angleterre, le 6 septembre 2018
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"On n'est pas morts !" Robin Blair, 73 ans, a consacré sa vie à son étal de légumes à Darlington où plusieurs grands magasins ont récemment fermé. Comme tous les commerçants, il souffre de la concurrence en ligne mais se dit prêt au combat.

Ville de foire millénaire, cette agglomération moyenne du nord de l'Angleterre subit de plein fouet les conséquences de l'explosion des ventes sur internet et de la hausse des loyers. Après le grand magasin BHS en 2016, c'est la vénérable enseigne Marks and Spencer qui a dû fermer boutique fin août sur la principale avenue commerçante.

"C'est un rude coup pour Darlington", constate M. Blair, mais ce septuagénaire à l’œil pétillant rappelle avoir survécu à l'apparition des supermarchés à la fin des années 1970 et se dit optimiste. "C'est plus compétitif, les gens veulent qu'on livre chez eux, mais nous pouvons nous adapter", assure-t-il au moment où nombre de commerces indépendants allongent leurs horaires d'ouverture.

Départ de la première ligne ferroviaire de voyageurs au monde en 1825, Darlington demeure aujourd'hui relativement prospère même si son taux de chômage - un peu plus de 5% - est légèrement supérieur à la moyenne nationale.

Avec les nombreux commerces qui jalonnent son centre propret, la ville est pourtant en première ligne des difficultés qui frappent le secteur au Royaume-Uni où les magasins ferment en cascade. Environ 15% des locaux commerciaux sont inoccupés, rideau de fer baissé.

Le grand magasin House of Fraser, à l'opposé du Marks and Spencer clôturé, devait fermer boutique à son tour mais a été sauvé in extremis ces derniers jours après la conclusion d'un compromis avec le bailleur.

- Les recettes du net -

Peu rassurants, les consultants du cabinet BDO viennent de faire état d'un nouveau repli des ventes de 2,7% pour le commerce physique britannique en août. Au Royaume-Uni, le débat fait rage autour du sauvetage des magasins: le ministre conservateur des Finances, Philip Hammond, propose une taxe sur les ventes des géants en ligne tandis que les lobbies des détaillants demandent une baisse des taxes foncières et la gratuité des parkings.

"Le centre-ville change de façon drastique et ce processus va prendre encore cinq ou dix ans", prévoit Nick Wallis, élu municipal du Parti travailliste à Darlington. "Nous avons perdu des magasins mais d'autres commerces ont ouvert, notamment des bars et des cafés, tout ce qui a trait à la vie nocturne", nuance-t-il.

D'après ce travailleur social, les centre-villes monopolisés par les magasins depuis un demi-siècle pourraient aussi accueillir à l'avenir davantage de logements construits sur les espaces laissés vacants par les commerces abandonnés.

Comme beaucoup d'acteurs de la communauté, Nick Wallis insiste sur l'organisation d'événements culturels et festifs sur la place publique, pour débrancher les habitants de leur ordinateur et les attirer en ville afin qu'il y consomment en direct. Fin août, un défilé de voitures de collection a ainsi attiré la foule et rempli les caisses.

La firme TGI Media a remporté au printemps un appel d'offres de la mairie pour populariser les initiatives. "L'objectif est de doper la fréquentation des rues, nous collectons les informations auprès des commerçants et les postons sur les réseaux sociaux", explique dans son bureau sa directrice, Tori Gill.

Lancée début avril, la page Facebook de cette campagne #LoveDarlo a été consultée par un million de personnes au moins une fois - alors que Darlington compte une centaine de milliers d'habitants.

Au marché couvert, moins fréquenté ces dernières années, on veut aussi créer un environnement agréable pour attirer le chaland. "On cherche à développer des espaces d'exposition, le marché artisanal ou à aider des artistes à vendre leurs œuvres", énumère Alexandra Nicholson, gérante adjointe.

Le marché veut aussi permettre aux clients de venir collecter leurs achats après les avoir commandés, dans un espace dédié dans le centre-ville où les produits seraient stockés, une recette qui a fait le succès... des ventes sur le net.

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