Iran : Rohani maintient son chef de la diplomatie démissionnaire

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Par Marc JOURDIER - Téhéran (AFP)
Publié le 27 février 2019 - 10:49
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Le président iranien Hassan Rohani en marge de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le 26 septembre 2018
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© Jim WATSON / AFP/Archives
Le président iranien Hassan Rohani en marge de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le 26 septembre 2018
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Le président iranien Hassan Rohani a rejeté mercredi la démission de son chef de la diplomatie, Mohammad Javad Zarif, visage de sa politique de détente avec l'Occident abhorrée des ultraconservateurs.

"Je pense que votre démission va à l'encontre de l'intérêt du pays et je ne l'approuve pas", écrit M. Rohani dans une lettre adressée à M. Zarif et publiée sur le site internet du gouvernement.

"Comme l'a dit [de vous] le guide [suprême, Ali Khamenei], vous êtes 'digne de confiance, courageux et pieux', et à la pointe de la résistance contre la pression totale exercée par les Etats-Unis" contre la République islamique, ajoute la lettre.

Agé de 59 ans, M. Zarif avait annoncé sa démission lundi soir via son compte Instagram, sans fournir d'explications. Mardi, il a plaidé pour que son ministère retrouve son "statut" dans la conduite de la politique extérieure de l'Iran.

"J'ai parfaitement conscience des pressions exercées sur l'appareil diplomatique du pays, le gouvernement et même le président élu par le peuple", écrit M. Rohani, qui fait figure de modéré dans le système politique iranien, dans sa lettre à M. Zarif.

"Aussi, comme cela a été ordonné à plusieurs reprises, tous les organes – cela inclut le gouvernement et les organismes d'Etat – doivent agir en totale coordination avec [votre] ministère pour ce qui est des relations internationales", ajoute la lettre.

M. Zarif est ministre des Affaires étrangères de M. Rohani depuis l'accession de celui-ci à la présidence en août 2013.

- "Manque de coordination" -

Il a été le principal artisan, côté iranien, de l'accord international sur le nucléaire iranien conclu en juillet 2015 à Vienne, et contre lequel se déchaînent les ultraconservateurs pour qui l'Iran, en échange d'énormes concessions, n'a rien obtenu de concret de ce pacte.

Selon le site d'information Entekhab, sa décision de jeter l'éponge a été liée à la visite surprise lundi à Téhéran du président syrien Bachar al-Assad.

M. Zarif n'était présent à aucune des rencontres qu'a eues M. Assad avec MM. Khamenei et Rohani, et selon M. Entekhab, il n'aurait pas apprécié d'être mis sur la touche.

Présent lors des deux entrevues, le général de division, Ghassem Soleimani, chef de la Force Qods, branche extérieure des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, a assuré que M. Zarif était "bien chargé de la politique étrangère" du pays, selon Sepah News, l'agence de presse des Gardiens.

Le général Soleimani est le symbole du soutien apporté par Téhéran aux autorités de Damas dans la guerre qui ravage la Syrie depuis 2011.

Selon lui, "un manque de coordination au niveau du cabinet du président est à l'origine de l'absence du ministre des Affaires étrangères" lors de la rencontre entre MM. Assad et Rohani, et "il n'y a eu aucune volonté délibérée d'écarter M. Zarif", ajoute Sepah News.

- "Généreuse affection" -

Dans un message publié sur son compte Instagram quelques minutes après l'annonce présidentielle, M. Zarif remercie le "peuple iranien", "les élites et les responsables" pour "la généreuse affection" dont ils lui ont fait part depuis qu'il est en fonction, et "en particulier au cours des trente dernières heures".

"J'espère, ajoute-t-il, que le ministère des Affaires étrangères, avec l'aide [...] du guide suprême et du président, et sous leur supervision, pourra exercer toutes ses responsabilités dans le cadre de la Constitution et des lois du pays".

M. Zarif était présent mercredi matin à la cérémonie d'accueil, par M. Rohani, du Premier ministre arménien Nikol Pachinian, en visite officielle à Téhéran.

L'accord de Vienne a permis de réintégrer l'Iran dans le concert des nations après douze années de crise avec la communauté internationale à propos de son programme nucléaire.

En échange de la levée d'une partie des sanctions économiques internationales contre la République islamique, Téhéran a accepté de brider considérablement ses activités nucléaires afin de garantir qu'il ne cherche pas à se doter de la bombe atomique.

Mais l'accord a du plomb dans l'aile depuis que les Etats-Unis s'en sont retirés unilatéralement en mai 2018 sous l'impulsion du président Américain Donald Trump, rétablissant du même coup une série de sanctions contre Téhéran.

Pour tenter de sauver l'accord, Paris, Londres et Berlin ont présenté fin janvier un mécanisme de troc pour permettre à l'Iran de continuer à commercer avec l'Europe en contournant les sanctions américaines.

Mais le système, qui n'autorise que des transactions touchant à un nombre très limité de produits ou services, est jugé très insuffisant par Téhéran pour garantir son intérêt à continuer d'appliquer l'accord.

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