La sécheresse frappe l'Amérique centrale menacée par El Niño

Auteur:
 
Par Noe LEIVA - Valle de Angeles (Honduras) (AFP)
Publié le 16 mars 2019 - 07:45
Image
L'agronome Cristel Castro pose des pièges pour mesurer le retour du gorgojo, un insecte ravageur des arbres, dans la forêt de Valle de Angeles, le 9 mars 2019 à l'est de Tegucigalpa, au Honduras
Crédits
© ORLANDO SIERRA / AFP
L'agronome Cristel Castro pose des pièges pour mesurer le retour du gorgojo, un insecte ravageur des arbres, dans la forêt de Valle de Angeles, le 9 mars 2019 à l'est de Tegucigalp
© ORLANDO SIERRA / AFP

Quelque part dans une forêt de pins au Honduras: une agronome mesure la concentration d'un insecte ravageur des arbres qui prolifère à la faveur de la sécheresse en Amérique centrale. Une calamité qui devrait s'aggraver sous l'influence du Niño, phénomène météorologique favorisé par le réchauffement climatique.

"Nous sommes inquiets, mais c'est bien d'être en alerte", juge Cristel Castro, une agronome de l'Institut de protection forestière (ICF), pendant qu'elle s'active à poser des pièges destinés à mesurer le retour de l'insecte dans la forêt, à une quinzaine de kilomètres à l'est de Tegucigalpa, la capitale.

Le président hondurien lui-même, Juan Orlando Hernandez, a donné l'alerte en janvier: le "gorgojo" (une espèce de charançon, Dendroctonus frontalis de son nom scientifique) est de retour. Lors de sa précédente prolifération, entre 2013 et 2017, l'insecte ravageur a détruit un peu plus d'un demi-million d'hectares de conifères, soit plus d'un quart des 1,9 million d'hectares que compte le Honduras.

Le gorgojo, qui loge entre le tronc et l'écorce, ne réapparaît pas par hasard: la sécheresse sévit durement en Amérique centrale, causant des pertes de récoltes et de graves pénuries d'eau potable. Selon l'agronome, les dégâts ont pour l'instant pu être contenus.

Mais pour comble de malheur, "après plusieurs mois d'hésitation, les eaux tropicales du Pacifique et l'atmosphère (...) remplissent à présent les critères du Niño", a averti l'agence onusienne du Programme alimentaire mondial (PAM).

Ce phénomène climatiquen spécifique, qui se caractérise par une élévation anormale de la température de l'océan, entraîne notamment un déplacement des zones de précipitations et de sécheresse.

Même "modéré", selon les prévisions de l'écologiste hondurien Ricardo Navarro, le phénomène ne peut qu'aggraver les pénuries dans le "couloir sec" d'Amérique centrale, qui va du nord-ouest du Costa Rica jusqu'à la côte pacifique du Guatemala.

- Tous les pays touchés -

Le Salvador n'a même pas eu le temps de se remettre de la sécheresse de l'année dernière: en 2018 les récoltes ont été perdues sur 20.303 hectares qui devaient produire 13,35% de la récolte attendue de maïs, selon une étude officielle.

Au Guatemala, les premiers indicateurs de l'année ne sont pas bons: des cultures de maïs et de haricots ont été perdues, "faute de pluie", a indiqué le ministre de l'Agriculture Mario Mendez, affectant près d'un millier de familles de paysans du département du Peten, frontalier du Mexique et du Belize.

Au Honduras, les barrages n'ont pas pu faire le plein et les restrictions ont commencé, comme à Tegucigalpa où l'eau potable n'est distribuée que tous les quatre jours. Dans les champs, les paysans attendent anxieusement les premières pluies du mois de mai pour commencer les cultures de maïs et haricot pendant la saison humide, qui dure normalement jusqu'à novembre.

Le Nicaragua n'est pas épargné, après une année déjà marquée par des pertes en agriculture et dans les élevages. Au Costa Rica, la production agricole dans le nord du pays (tubercules, fruits, riz) est en tension et le pays pourrait être contraint d'importer du riz.

Près de 300.000 Costariciens sont en butte aux restrictions d'eau, et ce chiffre pourrait augmenter, selon Alex Solis, le chef de la Commission nationale d'urgence.

Enfin, le ministère costaricien de l'Agriculture s'inquiète de la possibilité, à la faveur de la montée des températures, de la prolifération de ravageurs des cultures fruitières.

L'agence de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a annoncé le lancement d'un programme d'action pour protéger les ressources des populations les plus vulnérables aux effets de la sécheresse et pour "renforcer les capacités des institutions locales et nationales dans la gestion des risques agricoles récurrents".

"Ce qui est lamentable, c'est que les phénomènes du changement climatique se produisent alors que les Centraméricains n'ont pas de culture de l'environnement, car ils ne prennent pas au sérieux les effets du réchauffement global en dépit des pertes astronomiques que nous subissons chaque année", déplore Ricardo Navarro.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.