La tentative de sécession de la Catalogne devant la justice

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Par Mathieu GORSE - Madrid (AFP)
Publié le 09 février 2019 - 10:13
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Montage créé le 26 octobre 2018 montrant des dirigeants séparatistes emprisonnés: en haut de G à D Raul Romeva, Joaquim Forn, Jordi Turull, Oriol Junqueras, Josep Rull, en bas de G à D Jordi Cuixart,
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© GABRIEL BOUYS , LLUIS GENE, PAU BARRENA / AFP/Archives
Montage créé le 26 octobre 2018 montrant des dirigeants séparatistes emprisonnés: en haut de G à D Raul Romeva, Joaquim Forn, Jordi Turull, Oriol Junqueras, Josep Rull, en bas de G
© GABRIEL BOUYS , LLUIS GENE, PAU BARRENA / AFP/Archives

La plus haute cour espagnole va juger à partir de mardi douze dirigeants indépendantistes pour leur rôle dans la tentative de sécession de la Catalogne d'octobre 2017, un procès retentissant qui polarise l'Espagne.

Ce procès historique, retransmis en direct par la télévision nationale et pour lequel plus de 600 journalistes de 150 médias sont accrédités, devrait durer environ trois mois. Le verdict de la Cour Suprême pourrait se faire attendre jusqu'en juillet.

La principale figure de cette tentative de sécession, l'ancien président catalan Carles Puigdemont qui a fui en Belgique, sera le grand absent, l'Espagne ne jugeant pas en absence pour les délits graves.

Des peines allant jusqu'à 25 ans de prison ont été requises contre les douze accusés, responsables au moment des faits de l'exécutif régional catalan, du parlement régional ou des puissantes associations indépendantistes ANC et Omnium Cultural.

Neuf sont poursuivis pour rébellion, aggravée du délit de détournement de fonds pour six d'entre eux, et sont en détention provisoire, pour certains depuis plus d'un an.

Les trois autres sont accusés de désobéissance et de détournement de fonds.

Après avoir organisé le 1er octobre 2017 un référendum d'autodétermination interdit par la justice, les séparatistes avaient proclamé le 27 octobre une république catalane indépendante.

En réponse, le gouvernement, alors dirigé par le conservateur Mariano Rajoy qui sera appelé à témoigner, avait destitué l'exécutif de Carles Puigdemont, dissous le parlement catalan et suspendu l'autonomie de cette riche région du nord-est du pays.

- Rébellion, un délit controversé -

Y a-t-il eu violence? C'est la question qui sera au centre de ce procès puisque le chef d'accusation de rébellion, qui suppose un soulèvement violent, est contesté.

Pour le parquet, la réponse est oui. Le processus indépendantiste prévoyait "l'utilisation de tous les moyens pour atteindre son objectif y compris - face à la certitude que l’État n'accepterait pas cette situation - la violence nécessaire pour s'assurer du résultat criminel recherché", estime-t-il.

Les accusés ont "appelé les citoyens à participer au référendum du 1er octobre en étant conscients de (son) illégalité et du fait que des explosions de violence pouvaient se produire", ajoute le parquet.

Un argumentaire rejeté avec virulence par les indépendantistes qui démentent toute violence et dénoncent au contraire celle des policiers lors du référendum, dont les images ont fait le tour du monde.

Les juristes sont eux divisés au point que le représentant des intérêts de l’État lors du procès n'a pas repris à son compte l'accusation de rébellion, lui préférant celle de sédition qui prévoit des peines beaucoup moins lourdes de 12 ans au maximum.

- L'extrême droite dans le prétoire -

Les séparatistes veulent faire de leur jugement qu'ils qualifient de "farce" un procès politique en mondovision.

"Nous serons devant un jury populaire qui sera le monde entier et que nous devrons convaincre. (...) Ce n'est pas le procès des dirigeants indépendantistes, c'est le procès de la démocratie", affirmait récemment Alex Sola, l'avocat du président d'Omnium Cultural, Jordi Cuixart, qui figure parmi les 12 accusés.

Ils ont par ailleurs prévu de manifester en Catalogne, à Madrid et d'organiser des événements dans des capitales européennes comme Londres, Paris ou Bruxelles.

Au-delà du tribunal, ce procès aura des répercussions sur la scène politique espagnole, estime Antonio Barroso, analyste du cabinet Teneo Intelligence.

"La question catalane reste au centre du débat politique espagnol, et ce procès, en servant de rappel des faits de 2017, va être utilisé par la droite pour critiquer toute négociation (du gouvernement) avec les indépendantistes", souligne-t-il.

Arrivé au pouvoir en juin grâce notamment au soutien des indépendantistes catalans, le socialiste Pedro Sanchez a besoin de leurs voix pour faire passer son budget et rester au pouvoir jusqu'en 2020.

De plus, le parti d'extrême droite Vox, le plus virulent contre les séparatistes, bénéficiera d'une tribune politique en représentant l'"accusation populaire" lors du procès grâce à une particularité du système juridique espagnol qui autorise tout citoyen ou organisation à se poser comme accusateur en simple défense de la légalité.

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