Le général israélien qui défie Netanyahu a passé son premier test : que retenir ?

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Par Laurent LOZANO - Jérusalem (AFP)
Publié le 30 janvier 2019 - 13:27
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Le général à la retraite Benny Gatnz (D) et son allié électoral, l'ancien ministre de la Défense Moshe Yaalon (G), le 29 janvier 2019 à Tel-Aviv
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© Jack GUEZ / AFP
Le général à la retraite Benny Gatnz (D) et son allié électoral, l'ancien ministre de la Défense Moshe Yaalon (G), le 29 janvier 2019 à Tel-Aviv
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Intransigeance sur la sécurité d'Israël, rectitude en politique: le général Benny Gantz, concurrent sérieux et jusqu'alors énigmatique de Benjamin Netanyahu aux législatives du 9 avril, a lancé sa campagne mardi. Le long règne du Premier ministre sortant en est-il davantage menacé?

QUE S'EST-IL PASSE MARDI?

M. Gantz, personnalité éminente en tant qu'ancien chef d'état-major, est sorti du bois. Israël s'interrogeait sur ses ambitions, son projet, ses alliances. Il a affirmé qu'il voulait diriger le pays et annoncé la fusion de sa liste avec celle d'un autre ex-chef militaire des armées, réputé très à droite, Moshe Yaalon. Il a exposé ses vues sur les menaces sécuritaires, la vie chère, la nécessité de réconcilier les Israéliens divisés et d'en finir avec la corruption en politique.

Il s'en est pris durement mais indirectement à M. Netanyahu, dans un discours rassembleur et patriotique le plaçant à la droite du centre.

"La seule chose qu'il n'ait pas promise, c'est de faire baisser les températures en juillet-août", a ironisé le quotidien Maariv.

QUEL EST LE CONTEXTE?

Avant mardi soir, les sondages élevaient M. Gantz au statut de deuxième personnalité la plus à même d'exercer les fonctions de chef de gouvernement.

En poste depuis une décennie, M. Netanyahu reste, selon les analystes, le mieux placé pour former un gouvernement. Mais l'ombre plane d'une inculpation dans plusieurs affaires de corruption présumée. L'annonce possible, prévue par la presse en février, d'une convocation préalable à sa mise en examen pourrait coûter des sièges au Likoud, son parti de droite, et remettre en cause la capacité de M. Netanyahu à former une majorité.

Les Israéliens élisent leurs députés, mais pas leur Premier ministre, choisi par le président selon les résultats.

QUE DIT M. GANTZ?

Sur ses ambitions: il demande la "confiance pour diriger l'Etat d'Israël".

Sur la gouvernance: Israël est gouverné comme la "maison royale française" sous Louis XIV qui aurait dit "l'Etat, c'est moi". "Aucun dirigeant israélien n'est le roi. L'Etat, ce n'est pas moi", a clamé M. Gantz.

Sur une inculpation de M. Netanyahu: "L'idée d'un Premier ministre en fonction alors qu'il est inculpé est ridicule à mes yeux". L’ambiguïté du propos a retenu l'attention comme laissant la porte ouverte à une participation de M. Gantz à un gouvernement Netanyahu après le 9 avril si ce dernier n'est pas encore inculpé.

Sur les grands dossiers diplomatiques: "Le gouvernement fera tout son possible pour la paix". Mais, au Proche-Orient, "il n'y a pas de pitié pour les faibles. Seuls les forts survivent", a-t-il résumé.

Sur l'Iran, le grand ennemi d’Israël, il s'est adressé au président Hassan Rohani: "J'oeuvrerai contre vous sur la scène internationale, sur le terrain économique et sur le terrain militaire. Et si vous ne comprenez pas le message transmis en paroles, vous le comprendrez par la force de coups douloureux et précis".

Sur le conflit avec les Palestiniens: Israël gardera dans tous les cas la responsabilité de la sécurité à l'est du Jourdain, donc y compris en Cisjordanie occupée. Les grands blocs de colonies existants seront "renforcés". Tout Jérusalem, y compris la partie orientale annexée et occupée, "restera à jamais la capitale" d'Israël.

Sur le plateau du Golan, occupé et annexé: "Nous ne nous en retirerons jamais".

QUELLES SONT LES REACTIONS?

L'ancien parachutiste "a passé avec succès son premier véritable baptême du feu politique", écrivent les quotidiens Maariv et Yediot Aharanot.

Le Haaretz résume le message: "Votez pour moi, (qui suis) plus méchant que Bibi (surnom de M. Netanyahu), mais propre".

Dans une période d'intense polarisation en Israël aussi, M. Gantz a tenté avec succès de "se différencier" et de projeter une image "positive", estime Gideon Rahat, professeur de sciences politiques. Il a aussi cherché à ne pas prêter le flanc aux accusations d'être un "gauchiste" dissimulé, dit-il.

Peine perdue: M. Gantz est un "membre de la gauche", a réagi le Likoud dans un communiqué. "Le stratagème éculé consistant à coller un général en haut d'une liste pour renverser un gouvernement de droite ne prendra pas cette fois", a ajouté le parti de M. Netanyahu.

EST-IL PLUS QUE JAMAIS LE CHALLENGER?

Gideon Rahat s'attend à ce que le parti de M. Gantz prenne des voix au parti centriste Yesh Atid, voire aux travaillistes. Mais "la question principale est de savoir s'il recevra le soutien d'une partie du Likoud ou de la droite" qui serait rebutée par la politique ou les ennuis judiciaires de M. Netanyahu.

Un sondage publié après le discours par le site d'information Walla suggère que M. Gantz a effectué une partie du chemin. Son parti pourrait gagner 19 des 120 sièges du parlement, au lieu de 12 à 15 projetés par de précédentes enquêtes d'opinion. Le Likoud en récolterait 29 (30 dans l'actuelle Knesset).

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