Nom de Macédoine : le gouvernement grec échappe à une motion de censure

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Par Catherine BOITARD - Athènes (AFP)
Publié le 16 juin 2018 - 06:00
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Manifestation à Athènes des opposants à l'accord entre Athènes et Skopje, le 15 juin 2018
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© ANGELOS TZORTZINIS / AFP
Manifestation à Athènes des opposants à l'accord entre Athènes et Skopje, le 15 juin 2018
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Le gouvernement de gauche grec d'Alexis Tsipras a facilement survécu samedi à une motion de censure destinée à bloquer l'accord avec Skopje sur le nouveau nom de la Macédoine.

"Sur les 280 députés présents, 153 ont voté contre la motion", a déclaré ce porte-parole, Yiorgis Varemenos, à quelques heures de la signature prévue dimanche de l'accord entre Athènes et Skopje qui baptisera l'actuelle "Ex-République yougoslave de Macédoine" du nom de "Macédoine du Nord", mettant fin à 27 ans de bagarre.

Le climat politique s'est tendu des deux côtés de la frontière après l'annonce mardi de l'accord salué par l'ONU, l'Union européenne et l'Otan

M. Tsipras a qualifié vendredi soir cet accord de "victoire d'importance historique pour la Grèce", ajoutant: "nous avons démontré que là où existe une volonté, un conflit vieux de plusieurs décennies peut être résolu de manière équilibrée".

Quelques centaines de manifestants, dont certains brandissaient des portraits d'Alexandre le Grand, se sont rassemblés samedi devant le parlement à l'appel du "Comité de lutte pour la grécité de la Macédoine".

"Seuls les Grecs peuvent être nommés Macédoniens", a déclaré à l'agence étatique ANA le porte-parole des organisateurs Michalis Patsikas.

Le lancement de leur mobilisation vendredi matin n'avait réuni que quelques centaines de personnes dont des députés du parti néonazi Aube Dorée.

L'un d'eux, Constantin Barbaroussis, fait l'objet d'une procédure judiciaire pour avoir déclaré devant le Parlement que l'armée devrait interpeller les plus hauts responsables de l'Etat, coupables à ses yeux de "trahison".

- 'Recul' ou 'patriotisme'? -

A l'origine de la motion de censure contre le gouvernement Tsipras, le grand parti conservateur de la Nouvelle-Démocratie considère que le règlement constitue un "recul national".

"Nous ne diviserons pas les Grecs pour unir les (Macédoniens)", a lancé son chef, Kyriakos Mitsotakis devant le Parlement. Devançant M. Tsipras dans les sondages, il entend selon les analystes capitaliser la colère des franges nationalistes de l'électorat.

M. Tsipras a, lui, salué une occasion d'"éclaircir les responsabilités de chacun envers l'Histoire", défendant le caractère "patriotique" de la solution trouvée.

"Laissez-moi vous rappeler que vous avez une dette envers votre patrie, pas envers votre dirigeant", a déclaré samedi le député conservateur Vassilis Kikilias à ses confrères pro-gouvernementaux. "Les Grecs qui gisent morts sur le sol de Macédoine vous regardent avec colère".

L'accord vise à sceller le renoncement des voisins aux visées que leur imputent les Grecs sur la province grecque de Macédoine, ainsi qu'à leur appropriation du legs de la Macédoine antique, incarnée par Alexandre le Grand.

Cette querelle politico-historique restait irrésolue depuis l'indépendance en 1991 du petit État, bloquant son ancrage dans l'UE et l'OTAN, un verrou grec qui doit sauter.

Au pouvoir de 2004 à 2009, la ND avait alors acté la nécessité d'un compromis avec le partage du nom de "Macédoine". Mais pour elle, le gouvernement Tsipras a fait trop de concessions avec "l'acceptation d'une langue et d'une nationalité macédoniennes", forgées de fait chez les voisins depuis un demi-siècle.

- Signature prévue dimanche -

Elle dénie aussi toute légitimité à M. Tsipras pour engager le pays, au vu des divisions au sein de son gouvernement - son allié souverainiste, le ministre de la Défense Panos Kammenos, est en effet opposé à tout partage du nom.

L'argument est également repris par le reste de l'opposition même si la majorité de ses dirigeants de centre-gauche ont salué l'accord.

Le texte ne doit en effet être soumis à ratification en Grèce que fin 2018 - M. Tsipras pourra alors compter sur un renfort centriste.

D'ici là, la partie macédonienne s'est engagée à ratifier l'accord, le faire approuver par référendum et l'acter par une révision constitutionnelle.

Pour engager toute cette procédure, l'accord doit être officiellement signé dimanche matin, lors d'une cérémonie réunissant les deux gouvernements sur les rives du lac frontalier de Prespes. Les médias grecs tablaient sur la présence de responsables européens.

Mais côté macédonien, l'issue finale du règlement apparaît loin d'être acquise car la droite nationaliste macédonienne, elle aussi remontée à bloc, se dit déterminée à le faire trébucher.

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