Les mines, autre fléau de la guerre au Yémen

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Par AFP - Khokha
Publié le 02 octobre 2018 - 14:12
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Imad (G), sa soeur Alia (C) et leur mère se trouvent sous une tente dans le camp de déplacés d'al-Waara, dans la province de Hodeida, dans le sud-ouest du Yémen, le 1er octobre 2018
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© NABIL HASSAN / AFP
Imad (G), sa soeur Alia (C) et leur mère se trouvent sous une tente dans le camp de déplacés d'al-Waara, dans la province de Hodeida, dans le sud-ouest du Yémen, le 1er octobre 201
© NABIL HASSAN / AFP

Dans l'ouest du Yémen, Imad et sa petite soeur Alia ont été doublement frappés par le malheur: après avoir perdu leur père dans l'explosion d'une mine, ils ont été chassés de leur village.

Dans le conflit qui fait rage depuis 2015 dans ce pays le plus pauvre de la péninsule arabique, des enquêteurs de l'ONU ont déclaré en août que tous les acteurs avaient commis des crimes de guerre potentiels.

La coalition sous commandement saoudien, alliée du gouvernement, a mené des raids aériens ayant tué des civils, dont des enfants, dans des zones tenues par les insurgés, tandis que les rebelles Houthis sont accusés d'avoir posé des dizaines de milliers de mines terrestres.

Agés de sept et six ans, Imad et Alia habitaient avec leurs parents dans le village d'Al-Dunain, dans la province côtière de Hodeida âprement disputée par les rebelles et les forces progouvernementales.

Leur maison, raconte leur mère Fethiyeh Fartout, était entourée de mines posées par les rebelles.

Un jour, alors que son mari se rendait au marché, il a été tué sur une route "parsemée de mines antipersonnel" dans le district de Hays, théâtre de combats quotidiens.

- "Où aller ?" -

"Ensuite, les Houthis nous ont dit de quitter la maison, faute de quoi on risquait d'être tués", dit-elle à l'AFP. "+Mais où aller?+, ai-je demandé aux Houthis".

Selon le Norwegian Refugee Council (NRC), les combats dans la région de Hays ont provoqué d'importants déplacements de civils depuis plus de 10 mois.

La famille a finalement dû se rendre dans le camp d'Al-Waara, à une trentaine de km au sud-ouest de Hays.

Des centaines de personnes vivent dans des tentes de fortune dans ce centre pour déplacés financé en partie par les Emirats arabes unis, autre pilier de la coalition anti-rebelles aux côtés de Ryad.

Alors que des dizaines d'enfants courent dans le camp, certains pieds nus, ou jouent sur la seule balançoire disponible, un garçon est assis dans un fauteuil roulant, avec une jambe dans le plâtre. Lui aussi a été victime d'une mine.

Human Rights Watch (HRW) a déclaré en juin que les mines au Yémen avaient entravé l'accès à l'aide humanitaire et empêché des civils de rentrer chez eux en sécurité.

"Les Houthis ont posé des mines antipersonnel, antivéhicule et des mines improvisées alors qu'ils se retiraient des zones d'Aden (sud), de Taëz (sud-ouest), de Marib (centre) et, plus récemment, de la côte ouest du Yémen", a indiqué HRW.

Jamal Fartout, le père de Fethiyeh Fartout, affirme que les risques sont trop importants pour rentrer chez eux. "Les Houthis ont posé des mines partout et leurs explosifs ont même détruit les routes", explique-t-il à l'AFP.

En juillet, le Washington Institute indiquait que si les mines antipersonnel sévissent au Yémen depuis des décennies en raison de conflits successifs, les Houthis les utilisent aujourd'hui "à un rythme étonnamment élevé".

- "Défi gigantesque" -

L'Arabie saoudite a lancé en juin un nouveau projet de déminage au Yémen, mais "les mines terrestres resteront un défi gigantesque après la guerre" actuelle, selon l'institut.

Alors que le nombre exact est "difficile à vérifier", l'institut indique que, selon un "responsable yéménite chargé du déminage", les Houthis auraient posé 500.000 mines depuis 2015, date de l'intervention de la coalition, alors que des équipes de déminage en auraient enlevé 300.000.

Si les rebelles n'ont pas réagi à ces allégations dans les médias, le "ministère" des Affaires étrangères à Sanaa, la capitale qu'ils contrôlent, a nié en 2017, dans une lettre à HRW, utiliser des mines antipersonnel.

Le conflit au Yémen a fait quelque 10.000 morts, en majorité des civils, et plus de 56.000 blessés, mais des responsables humanitaires estiment le bilan réel des victimes nettement plus élevé.

Et la guerre a provoqué, selon l'ONU, "la pire crise humanitaire au monde", avec des millions de personnes risquant de mourir de faim, notamment dans la région de Hodeida.

Malgré tous ses malheurs, la famille de Mme Fartout réussit à survivre.

Le Croissant-Rouge émirati (ERC) livre des vivres au camp d'Al-Waara environ toutes les trois semaines, indique Saeed al-Kaabi, directeur des opérations humanitaires émiraties au Yémen.

Chaque tente reçoit un colis comprenant du riz, des pâtes, des haricots, du thon, du sel et du sucre, précise-t-il à l'AFP.

Dans la tente de la famille Fartout, la veuve prépare un mélange de blé et d'eau dans un bol. Imad et Alia grattent avec leurs doigts la nourriture sur les côtés du bol pour ne rien laisser.

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