L'extrême droite allemande caresse l'idée d'une sortie de l'UE

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Par Claudia HAAS avec Yacine LE FORESTIER à Berlin - Riesa (Allemagne) (AFP)
Publié le 13 janvier 2019 - 14:56
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Le coprésident du parti allemand d'extrême droite AfD Alexander Gauland, le 13 janvier 2019 à Riesa, dans l'est de l'Allemagne.
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© Monika Skolimowska / dpa/AFP
Le coprésident du parti allemand d'extrême droite AfD Alexander Gauland, le 13 janvier 2019 à Riesa, dans l'est de l'Allemagne.
© Monika Skolimowska / dpa/AFP

Après la Grande-Bretagne, où un vote crucial sur le Brexit est prévu pour mardi, le débat sur une sortie de l'UE gagne l'Allemagne : l'extrême droite a décidé dimanche de faire campagne en ce sens, brisant ainsi un tabou national.

Réuni en congrès à Riesa dans la région de Saxe, son principal bastion électoral, le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) a adopté un programme en ce sens en vue des élections européennes de fin mai.

Les délégués du mouvement l’ont fait prudemment, sans fournir de date et en stipulant que le "Dexit", version germanique pour Deutschland du Brexit britannique, devrait intervenir "en dernier recours" si l’Union européenne n'était pas réformée de fond en comble "dans une délai raisonnable".

Mais c’est la première fois dans l’histoire allemande d’après-guerre qu’un parti politique ose ouvertement remettre en cause l’idée de l’appartenance nationale à l’Union européenne, ancrée dans l’ADN national.

- Identité -

L’attachement à la construction européenne a longtemps fait figure d’identité nationale de remplacement dans ce pays écrasé de honte pendant des décennies par la barbarie nazie.

"L'AfD essaye de réhabiliter une position nationale-allemande" dans le débat, juge Klaus-Peter Sick, un historien et politologue, interrogé par l'AFP.

"Ce positionnement constitue une normalisation de cette droite nationale par rapport à ce qu'il se passe chez les voisins, en Italie ou en France. En avançant ses pions sur ce terrain, l'AfD réalise un test au sein même du parti et auprès de son électorat pour savoir si c'est une thématique qui porte", ajoute-t-il.

Le programme entériné par le principal parti d'opposition depuis fin 2017 à la chambre des députés allemands, face aux conservateurs d'Angela Merkel et aux sociaux-démocrates qui gouvernent avec eux, est le fruit d’un compromis interne durement négocié.

Il souligne que faute de "réformes profondes" de l'UE, "nous estimons nécessaire, en dernier recours, une sortie de l'Allemagne ou une dissolution de l'Union européenne" et la création à la place d'une simple communauté fondée sur les intérêts économiques.

Parmi les demandes de réforme de l'UE du parti figurent la suppression du Parlement européen, de l'euro ou encore la fin de "l'islamisation" de l'Europe.

- Position maximaliste -

De nombreux délégués de l’AfD voulaient au départ un programme encore plus dur sur le "Dexit", avec une date-butoir fixée à l’issue de la prochaine législature européenne, à savoir 2024, pour la mise en place des réformes que le parti appelle de ses voeux.

Mais les dirigeants de l'AfD ont fait pression pour que cette formation ne se lie pas les mains avec une date contraignante.

"Je pense que nous serions mal avisés de faire campagne avec une revendication maximaliste", a mis en garde le coprésident du mouvement Alexander Gauland. Il a fait valoir que l’électorat allemand pourrait être échaudé si le Brexit devait se traduire dans un premier temps par de fortes perturbations dans l’économie britannique.

L’AfD redoute plus fondamentalement, en allant trop loin sur le sujet, de s’aliéner une part importante de l’opinion allemande majoritairement pro-européenne.

Les Allemands restent parmi les plus attachés à l'UE : 51% d'entre eux disaient avoir "plutôt confiance" en celle-ci dans un sondage du Parlement européen de novembre, neuf points de plus que la moyenne européenne. Et 23 points de plus qu'en 2015.

En caressant, même prudemment, l’idée d'un "Dexit", l'AfD ouvre un nouveau front politique en Allemagne après la question migratoire, sur laquelle le parti a bâti tous ses succès électoraux ces trois dernières années en dénonçant l’arrivée de plus d’un million de demandeurs d’asile en 2015 et 2016.

L’extrême droite est à recherche d’un second souffle à la suite du retrait programmé du pouvoir au plus tard en 2021 de la chancelière Angela Merkel, jusqu'ici sa principale cible politique.

Cette offensive intervient à l'avant-veille du vote des députés britanniques concernant le projet d'accord sur le Brexit négocié entre Londres et l'UE.

Projet qui en l’état risque d’être rejeté et de faire grandir le risque d’une sortie "dure" du Royaume-Uni.

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