Pérou : réconcilier ses héritiers, le défi du patriarche Fujimori

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Par Luis Jaime CISNEROS - Lima (AFP)
Publié le 05 janvier 2018 - 08:55
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Keiko Fujimori (c) quitte le bureau du procureur à Lima, le 28 décembre 2017
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© Ernesto BENAVIDES / AFP/Archives
Keiko Fujimori (c) quitte le bureau du procureur à Lima, le 28 décembre 2017
© Ernesto BENAVIDES / AFP/Archives

Réconcilier ses enfants Keiko et Kenji, qui se disputent l'héritage politique de l'ancien homme fort du Pérou, sera le principal défi d'Alberto Fujimori à sa sortie de la clinique, sous peine de voir son puissant mouvement péricliter.

A 79 ans, le patriarche de ce clan d'origine japonaise, qui occupe un rôle central dans la vie politique péruvienne depuis près de 30 ans, a entre ses mains l'avenir du principal parti du pays Fuerza Popular (droite populiste).

Cet ingénieur qui a gouverné le Pérou d'une main de fer (1990-2000), n'en finit pas depuis de diviser: pour certains, il est l'homme qui a combattu avec succès la guérilla maoïste du Sentier lumineux et dopé l'essor économique du pays.

D'autres se souviennent surtout de ses méthodes autoritaires, qui l'ont conduit derrière les barreaux pour avoir commandité deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992.

Condamné à 25 ans de prison pour crimes contre l'humanité, il en a purgé 12 et vient d'être gracié par l'actuel chef de l'Etat Pedro Pablo Kuczynski, déclenchant une crise majeure ponctuée de manifestations et de démissions au sein de son gouvernement. Il est ressorti libre de la clinique jeudi dans la soirée.

Avant même son vrai retour à la vie civile -il était passé ces derniers jours de la prison à une clinique pour des problèmes cardiaques et gastriques-, Fujimori revient donc sur la scène politique. En septembre depuis sa prison, il avait émis le souhait de pouvoir mourir en voyant Kenji et Keiko, devenus des personnalités politiques de premier plan, à nouveau unis.

"Il va se réunir avec ses deux enfants rivaux (...) Ce qui va arriver c'est une tentative du père de régler les problèmes familiaux", anticipe l'analyste politique Fernando Tuesta.

- Kenji plus populaire -

Keiko, 42 ans, a été candidate malheureuse à l'élection présidentielle de 2011 et 2016. Depuis sa défaite dans un mouchoir de poche face à "PPK", le surnom de Pedro Pablo Kuczynski, elle dirige le mouvement fujimoriste, qui représente un tiers de l'électorat péruvien, bien qu'elle ne soit pas élue au Parlement.

A 37 ans, son frère cadet Kenji, est minoritaire au sein du parti mais jouit d'une grande popularité, en étant le député le mieux élu des législatives de 2016. Selon les dernières études d'opinion, il devance pour la première fois sa soeur chez les Péruviens, avec 33% d'opinions favorables, contre 29%.

C'est lui qui aurait mené la négociation avec l'entourage du président alors que ce dernier était sur le point d'être destitué au Parlement le 21 décembre. Kenji en tête, dix députés de Fuerza Popular se sont alors abstenus, empêchant l'opposition d'atteindre le score nécessaire pour faire chuter le chef de l'Etat.

"Si Keiko n'accepte pas les exigences de son frère, comme celles d'exclure les dirigeants et députés qui les ont critiqué, lui et son père, l'éventualité d'une scission est élevée", ajoute M. Tuesta.

A la différence de sa soeur qui se veut plus distante, Kenji a ouvertement le soutien de son père et de la vieille garde du fujimorisme.

Tour à tour, Kenji et Keiko se sont rendus au chevet de leur père. Voilà plus d'un an que le frère et la soeur n’apparaissent pas publiquement ensemble.

"C'est un problème pour le clan: deux enfants en politique au même temps, ça peut être un avantage. Mais quel est le bon et quel est le mauvais cheval? D'une certaine façon, c'est aussi une faiblesse", fait valoir à l'AFP le politologue Mirko Lauer.

"L'avenir du fujimorisme dépend de sa réconciliation, quelle coïncidence", ironise l'analyste politique Maria Alejandra Campos dans El Comercio, le principal quotidien au Pérou.

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