Russie : les héritiers de Lénine, proches du pouvoir ou marginaux pourchassés

Auteur:
 
Par AFP
Publié le 28 octobre 2017 - 11:20
Image
Une mosaïque représentant Vladimir Lénine, créée par l'artiste Grigory Opryshko, dans une station de
Crédits
© Alexander NEMENOV / AFP
Une mosaïque représentant Vladimir Lénine, créée par l'artiste Grigory Opryshko, dans une station de métro de Moscou, le 27 octobre 2017
© Alexander NEMENOV / AFP

Nostalgiques de l'URSS, jeunes communistes et néo-bolchéviques continuent de rêver en Russie à "l'avenir radieux", promis par la Révolution d'Octobre il y a 100 ans, certains proches du Kremlin, d'autres pourchassés par les autorités.

Le Parti communiste de Russie siège au Parlement et ne critique guère le Kremlin. D'autres groupes, nettement plus radicaux, agissent en marge de la vie politique classique et font l'objet de diverses poursuites judiciaires.

"La révolution a ouvert la voie à une nouvelle vie avec des acquis sociaux comme le droit à l'éducation et aux soins médicaux gratuits", explique à l'AFP Vladimir Issakov, chef du Komsomol, l'organisation de jeunesse du Parti communiste.

"Sans la révolution, il n'y aurait pas eu de premier homme dans l'espace, ni de victoire dans la deuxième guerre mondiale, et la Russie ne serait pas devenue l'une des deux grandes puissances mondiales", est-il convaincu.

Vladimir, 30 ans, raconte avoir adhéré au Parti Communiste alors qu'il était étudiant en histoire, attiré par les idées socialistes.

Selon lui, ceux qui adhèrent aujourd'hui au Komsomol ont un peu plus de 20 ans et "ont déjà ressenti l'injustice de la société".

- Sous l’œil du Kremlin -

Le parti communiste de l'Union Soviétique a été interdit par le président russe Boris Eltsine après le putsch raté d'août 1991, organisé par des responsables du PC pour tenter d'empêcher le démantèlement de l'URSS.

En 1993, un nouveau PC apparaît sur la scène politique. Dirigé par Guennadi Ziouganov, un ancien fonctionnaire du parti, il se déclare l'héritier du PC soviétique.

Après une période de popularité dans les années 1990, quand les réformes poussent des dizaines de milliers de Russes dans la pauvreté, le PC est actuellement le deuxième parti à la Douma, chambre basse du Parlement, avec 42 sièges sur 448, loin derrière le parti pro-Kremlin Russie Unie.

Son idéologie est aujourd’hui un mélange surprenant d'orthodoxie et d'éloge du stalinisme. L'athéisme militant en vigueur à l'époque soviétique a disparu et Guennadi Ziouganov ne manque pas une occasion de faire l'éloge de l'Eglise orthodoxe. M. Ziouganov a également relancé le culte de Staline et va chaque année avec ses militants fleurir la tombe de l'ancien dictateur sur la place Rouge.

Les mouvements de gauche radicaux accusent le PC d'avoir perdu son indépendance et d'agir sous la tutelle du Kremlin.

Le parti communiste critique rarement les autorités, surtout après l'annexion par Moscou de la péninsule ukrainienne de Crimée en 2014 qu'il a vivement soutenue. Il concentre ses attaques - toujours mesurées - sur la politique économique du gouvernement qui louvoie entre libéralisme et capitalisme d'Etat.

Le PC est "solidaire du pouvoir" dans sa politique extérieure mais "opposé à sa politique sociale et économique", affirme Vladimir Issakov. "Nous restons fidèles aux idées de Marx et de Lénine", assure-t-il.

- L'extrême-gauche dans les sous-sols -

Contrairement au PC, bien intégré dans la vie politique dominée par le Kremlin, les mouvements de gauche radicaux actifs au début des années 2000, comme le parti national-bolchevique (NBP) de l'écrivain Edouard Limonov et le Front de gauche de Sergueï Oudaltsov, ont été pratiquement liquidés par le pouvoir.

Le NBP a été interdit en 2007 comme "organisation extrémiste" après une série d'actions spectaculaires, dont l'attaque d'un bureau de l'administration présidentielle à Moscou. Plus de 150 de ses militants sont passés par la prison.

Sergueï Oudaltsov, lui, vient de passer quatre ans et demi dans un camp pour organisation de "troubles massifs" en 2012. Son mouvement s'était alors joint aux libéraux qui manifestaient pour protester contre le retour au Kremlin de Vladimir Poutine.

Dans le sombre sous-sol d'un immeuble de Moscou, Alexandre Averine, ancien membre du NBP, aujourd'hui un des chefs du parti d'extrême gauche Drougaïa Rossia (L'Autre Russie), reconnaît: "l'opposition est en crise".

Ce militant de 36 ans y voit notamment le résultat des divisions qui ont suivi l'annexion de la Crimée: la gauche a soutenu le Kremlin et les libéraux l'ont dénoncé.

"Aujourd'hui, l'objectif de l'opposition russe est d'effectuer ce tournant à gauche revendiqué partout dans le monde", a affirmé Oudaltsov après sa sortie de prison en août.

Il a appelé l'opposition de gauche à s'unir à l'occasion du centenaire de la révolution. Mais chacun a ses projets de commémoration.

Le PC organise une marche solennelle le 7 novembre à Moscou, autorisée par les autorités.

L'extrême gauche se prépare elle aussi à manifester, mais de son côté. "Nous serons sûrement arrêtés", sourit Alexandre Averine.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.