Soudan : un mort à Omdourman lors de manifestations antigouvernementales

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Par AFP - Khartoum
Publié le 06 avril 2019 - 19:17
Mis à jour le 07 avril 2019 - 08:58
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Des manifestants soudanais devant le quartier général de l'armée à Khartoum, le 6 avril 2019
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Des manifestants soudanais devant le quartier général de l'armée à Khartoum, le 6 avril 2019
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Un manifestant est décédé samedi à Omdourman, ville jumelle de la capitale soudanaise Khartoum où des milliers de personnes ont défilé pour réclamer la démission du président Omar el-Béchir avant d'être dispersés par des gaz lacrymogènes tirés par la police anti-émeute.

Les manifestants se sont rassemblés pour la première fois depuis le début de la contestation antigouvernementale près du quartier général de l'armée à Khartoum.

Lors de précédents rassemblements, les protestataires avaient tenté à plusieurs reprises de marcher vers des lieux symboliques du pouvoir, comme le palais présidentiel, mais en ont souvent été empêchés par les gaz lacrymogènes tirés par les forces de sécurité.

Pour la première fois samedi, les manifestants ont atteint l'entrée des bâtiments qui abritent le siège de l'armée et le ministère de la Défense dans la capitale Khartoum, ont rapporté des témoins.

Les forces antiémeutes soudanaises ont tiré des gaz lacrymogènes tandis que des contestataires leur ont lancé des pierres avant de se disperser, selon des témoins.

"La police a enregistré la mort d'une personne lors des troubles à Omdourman", a déclaré le porte-parole de la police, le général Hashim Abdelrahim, à l'agence de presse officielle soudanaise Suna.

"Des rassemblements illégaux ont eu lieu à Khartoum et dans d'autres Etats", a-t-il ajouté.

Un comité de médecins, qui faisait partie des organisateurs de ces manifestations, a indiqué que la personne décédée était un médecin.

Sa mort porte à 32 le nombre des personnes décédées depuis le début en décembre des violentes manifestations antigouvernementales, selon les autorités.

Dans un précédent bilan, l'ONG Human Rights Watch (HRW) évoquait le chiffre de 51 morts.

Les manifestants répondaient à un appel de l'Alliance pour la liberté et le changement, fer de lance du mouvement de contestation.

- "Voir Béchir partir" -

Au son du principal slogan de la contestation --"Paix, justice et liberté"--, les manifestants ont réclamé le départ du président Béchir, au pouvoir depuis un coup d'Etat en 1989.

"Nous n'avons toujours pas accompli notre mission, mais nous avons envoyé un message à l'armée: +Rejoignez-nous+", a dit Amir Omer, un des protestataires.

Adam Yagoub, un autre protestataire, a déclaré à l'AFP qu'il manifestait "parce que nous voulons voir Béchir partir".

"Il a tellement ruiné l'économie du pays que des gens meurent à cause du manque de médicaments", a-t-il ajouté.

Les organisateurs du mouvement, une alliance de partis d'opposition ayant rejoint l'Association des professionnels soudanais, ont affirmé cette semaine que cette marche était destinée à demander à l'armée de "choisir entre son peuple et le dictateur".

Ils ont appelé samedi les manifestants à "ne pas quitter le quartier général de l'armée et de tenir un sit-in dans les rues", disant "espérer que (l'armée) prenne position pour le peuple" lors de ce "moment historique", selon un communiqué.

Tard dans la soirée de samedi, des groupes de manifestants étaient toujours rassemblés devant les bâtiments, certains chantant et dansant.

D'autres manifestants ont atteint un bâtiment de l'armée à Madani, une ville au sud-est de Khartoum, selon des témoins.

- Refus de démissionner -

Pour un diplomate européen s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, "la participation aujourd'hui était très impressionnante".

"Cela renforce la pression sur Béchir et le régime, et cela montre que le mouvement de contestation ne s'essouffle pas", estime-t-il.

Déclenchées le 19 décembre 2018 par la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, les manifestations se sont rapidement transformées à travers le pays en mouvement de contestation contre M. Béchir.

Celui-ci a refusé de démissionner et fait face à son plus grand défi depuis son arrivée au pouvoir, estiment des experts. Après avoir tenté de réprimer la contestation par la force, il a instauré l'état d'urgence dans tout le pays le 22 février.

Depuis, les manifestations sont restées principalement cantonnées dans la capitale et à Omdourman.

La date choisie est symbolique puisqu'elle marque l'anniversaire de la révolte du 6 avril 1985, qui avait permis de renverser le régime du président Jaafar al-Nimeiri.

"Un important dispositif de sécurité" a été mis en place samedi avant même que ne débutent les manifestations, a affirmé à l'AFP un témoin sous couvert de l'anonymat.

Des témoins ont rapporté avoir vu des agents en civil se fondre dans la foule pour empêcher les passants d'atteindre le centre-ville. Les magasins et marchés de Khartoum ont reçu l'ordre de fermer avant les manifestations, ont précisé d'autres témoins.

"Ceux qui marchaient en groupe ont été immédiatement arrêtés ou ont été priés de rentrer chez eux par les forces de sécurité", ont-ils dit.

Ces derniers jours, des militants avaient fait circuler des tracts pour appeler à manifester, selon des habitants.

Depuis l'instauration de l'état d'urgence, plusieurs manifestants ont été arrêtés pour avoir participé à des rassemblements non autorisés et jugés par des tribunaux d'exception. L'ampleur et l'intensité des manifestations ont alors fortement baissé.

Depuis décembre, le puissant service de renseignement a arrêté des centaines de manifestants, leaders de l'opposition, militants et journalistes, selon des ONG.

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