Syrie : quel sort pour rebelles et civils dans la Ghouta orientale ?

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Par AFP - Beyrouth
Publié le 18 mars 2018 - 12:02
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Des civils syriens évacués de la Ghouta orientale à travers un couloir contrôlé par le régime à Hoch al-Achaari, près de la capitale Damas, le 15 mars 2018
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© LOUAI BESHARA / AFP
Le régime syrien mène depuis un mois une offensive meurtrière contre l'enclave rebelle dans la Ghouta orientale.
© LOUAI BESHARA / AFP

Le régime syrien mène depuis un mois une offensive meurtrière contre l'enclave rebelle dans la Ghouta orientale, et pour de nombreux observateurs le sort du dernier bastion insurgé aux portes de Damas semble scellé, entre évacuation des combattants et poursuite de l'exode des civils.

- Acculés à négocier -

A la faveur de son offensive lancée le 18 février, le régime de Bachar al-Assad a reconquis à ce jour plus de 80% de l'enclave rebelle, les insurgés ne conservant plus que trois secteurs isolés les uns des autres.

Le premier secteur est situé dans le nord de la Ghouta, autour de la grande ville de Douma, où se trouve le puissant groupe islamiste Jaich al-Islam. Le deuxième se trouve plus à l'ouest, avec comme principale ville Hasrata, sous le contrôle du groupe Ahrar al-Cham. Et le troisième, plus au sud, est sous la coupe de Faylaq al-Rahmane.

"Les combats vont s'arrêter à un moment donné, et puis ils vont négocier. Les négociations peuvent toutefois durer quelque temps", dit Fabrice Balanche, expert sur la Syrie.

Un avis partagé par Aron Lund, expert au think-tank américain The Century Foundation, pour qui le morcellement de l'enclave permet au régime de gérer les groupes rebelles "séparément".

Par le passé, le régime a déjà reconquis plusieurs fiefs rebelles au terme de bombardements intenses et de sièges asphyxiants, comme dans la vieille ville de Homs (centre) en 2012 ou Alep (nord) en 2016. Les insurgés et des civils avaient alors été évacués, notamment vers la province d'Idleb (nord-ouest), la seule à échapper entièrement au contrôle du régime.

- Quel type d'accord ? -

Les rebelles, qui disent rejeter toute évacuation, se sont dits cependant prêts à engager "des négociations directes" avec la Russie, sous le parrainage de l'ONU, pour obtenir un cessez-le-feu.

Mais, selon Thomas Pierret, chargé de recherche au CNRS, même s'ils sont "d'excellents praticiens de la guerre urbaine", ils ne peuvent "pas grand-chose face à la puissance de feu" du régime.

D'après l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des négociations sont déjà actuellement menées entre certaines factions rebelles d'un côté, et le régime et son indéfectible allié russe de l'autre.

M. Lund souligne que, contrairement à d'autres provinces, "les rebelles dans la Ghouta sont très majoritairement originaires de cette région".

Les pourparlers pourraient ainsi concerner un possible "accord de réconciliation", selon l'OSDH, qui garantirait le maintien à Douma de Jaich al-Islam, en échange de son désarmement, avec le déploiement de la police militaire russe, le retour des institutions du régime, mais sans que l'armée syrienne n'y pénètre. Jaich al-Islam compterait 6.000 combattants, selon M. Balanche.

Les rebelles qui refuseraient de déposer les armes bénéficieraient d'un "accord d'évacuation", notamment vers des secteurs tenus par les insurgés à Deraa (sud), selon l'OSDH.

Les combattants d'autres groupes, comme Faylaq al-Rahmane --3.000 hommes, selon M. Balanche--, rejoindraient, d'après l'OSDH, les régions tenues par cette organisation dans le nord, dans la province d'Alep ou celle voisine d'Idleb.

Idem pour Hayat Tahrir al-Cham, qui compterait quelques centaines d'hommes selon l'OSDH, ou Ahrar al-Cham, présent à Harasta.

- Quid des civils ? -

Avant l'offensive, l'enclave rebelle dans la Ghouta orientale comptait près de 400.000 habitants, selon une estimation de l'ONU.

Depuis jeudi, plus de 50.000 civils ont fui l'avancée des forces gouvernementales et les bombardements, d'après l'OSDH. La plupart n'ont d'autres choix que de rejoindre les territoires du régime.

M. Lund rappelle que par le passé, lors de la reconquête d'autres fiefs rebelles, certains civils avaient parfois eu le choix de rester.

"Les gens cherchent juste à survivre, sauver leur famille, et continuer leur vie, quelle que soit l'autorité chargée de leur ville", précise-t-il.

Mais dans la Ghouta, note-t-il, certains ne pourront pas rester: les opposants au régime craignent "des actes de vengeance, des arrestations, la torture", explique-t-il.

"Les hommes qui ont l'âge d'aller dans l'armée vont craindre d'être enrôlés" et voudront partir, poursuit-il. Leurs familles voudront les suivre. Ceux-ci pourraient alors faire l'objet d'un "accord d'évacuation", comme à Alep en 2016.

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