Washington ouvre un nouveau front avec Pékin en dénonçant le sort des Ouïghours

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Par Francesco FONTEMAGGI - Washington (AFP)
Publié le 22 septembre 2018 - 00:09
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Une manifestante à Istanbul en Turquie en soutien aux musulmans ouïghours, le 5 juillet 2018, devant le consulat chinois
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© OZAN KOSE / AFP
Une manifestante à Istanbul en Turquie en soutien aux musulmans ouïghours, le 5 juillet 2018, devant le consulat chinois
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Les Etats-Unis ont dénoncé vendredi avec une fermeté inhabituelle le sort des musulmans ouïghours internés en Chine, ouvrant un nouveau front avec Pékin au moment où les relations entre les deux pays ne cessent de se détériorer.

"Des centaines de milliers, peut-être des millions de Ouïghours sont détenus contre leur gré dans des soi-disant camps de rééducation où ils subissent un endoctrinement politique strict et d'autres abus horribles", a dénoncé vendredi le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo.

"Leurs croyances religieuses sont anéanties", a-t-il encore déploré, dans un réquisitoire très ferme prononcé à l'occasion d'un discours sur la liberté de religion.

La Chine a été accusée en août, devant un comité des droits de l'Homme de l'ONU, de détenir ou d'avoir détenu un million de personnes dans ces centres d'internement dans la région du Xinjiang, dans le nord-ouest du pays, berceau des Ouïghours. Pékin a vigoureusement rejeté ces informations.

Mike Pompeo n'a pas dit s'il était prêt à envisager des sanctions, comme l'ont réclamé des membres républicains et démocrates du Congrès.

Il a toutefois également exprimé son inquiétude pour les chrétiens en Chine, accusant le gouvernement de "fermer des églises, brûler des bibles et obliger les fidèles à signer des papiers les faisant renoncer à leur foi".

Mercredi déjà, il avait dénoncé un gouvernement "qui n'est pas transparent" et qui "traite ses minorités religieuses de manière horrible". "Sur le long terme, si on parle de ce qui menace les revenus des Américains, qui menace vraiment la croissance économique américaine, la Chine représente, et de loin, la plus grande menace pour les Etats-Unis", avait-il martelé.

- Offensive tous azimuts -

Retour à la case départ? Ce dossier vient en tout cas s'ajouter aux nombreux autres points de friction entre la Chine et les Etats-Unis. Après avoir mis en scène son rapprochement avec Pékin au début de sa présidence, Donald Trump semble ainsi renouer avec les accents vindicatifs de sa campagne.

Sa première année à la Maison Blanche a été marquée par des relations en dents de scie avec le géant chinois, mais le sentiment qui prévalait était celui d'une étonnante idylle par rapport au discours préélectoral, lorsque le milliardaire républicain avait fait de Pékin un épouvantail en dénonçant ses pratiques commerciales déloyales et en l'accusant de manipuler sa monnaie.

Ce réchauffement avait vu le jour à Mar-a-Lago, en Floride, où Donald Trump avait accueilli Xi Jinping en avril 2017 en saluant "des progrès spectaculaires", et s'était poursuivi à Pékin en novembre, quand le président chinois avait gratifié d'une visite d'Etat son homologue américain, particulièrement sensible à ces marques de respect.

Concrètement, l'Américain s'était gardé de passer à l'acte sur le front commercial, avait renoncé à mettre la Chine à l'index sur sa monnaie, et fini par remercier le président Xi pour son influence positive en Corée du Nord.

Mais à l'approche du deuxième anniversaire de l'élection de Donald Trump, et des délicates législatives de mi-mandat, en novembre, le froid souffle à nouveau sur les liens sino-américains.

La guerre commerciale à coups de droits de douane et contre-taxes est bien engagée, tandis que les négociations pour une trêve patinent.

Dans ce contexte, dans ce qui ressemble à une offensive tous azimuts pour faire céder l'adversaire, Washington a ouvert ou rouvert plusieurs fronts.

Le président américain a ainsi de nouveau reproché à la Chine d'être responsable de l'impasse dans laquelle se trouvaient encore récemment les négociations sur la dénucléarisation nord-coréenne.

Dans la foulée, il est allé jusqu'à accuser Pékin d'ingérence dans les futurs scrutins américains, estimant que les tarifs douaniers chinois visaient son propre électorat -- "nos agriculteurs, nos éleveurs et nos ouvriers".

Et l'armée chinoise a été sanctionnée jeudi par les Etats-Unis pour ses achats d'armes russes -- une première --, victime collatérale mais pas anodine du refroidissement entre Washington et Moscou.

Quant aux tensions récurrentes en mer de Chine méridionale, elles ont semblé s'aggraver ces derniers mois.

Mais Donald Trump prend bien soin, à chaque salve contre Pékin, de laisser la porte ouverte au dialogue avec son "ami" Xi Jinping, auquel il ne perd pas une occasion de réaffirmer son "profond respect et affection".

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