Accusée d'"ambiguïté" sur l'antisémitisme, La France insoumise au centre d'une polémique

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Par Baptiste BECQUART - Paris (AFP)
Publié le 18 février 2019 - 16:44
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Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France Insoumise, le 18 janvier 2019 à Marseille
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© Christophe SIMON / AFP/Archives
Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France Insoumise, le 18 janvier 2019 à Marseille
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La France insoumise se retrouve au centre d'une polémique pour son "ambiguïté" présumée vis-à-vis de l'antisémitisme, alors que la manifestation de mardi à laquelle pourrait participer Jean-Luc Mélenchon s'annonce tendue, près d'un an après son départ forcé de la marche pour Mireille Knoll.

Des membres du gouvernement ont vilipendé la réaction de M. Mélenchon aux insultes proférées par des "gilets jaunes" samedi à l'encontre du philosophe conservateur, Alain Finkielkraut.

Le patron des députés LFI avait tweeté dimanche: "Conscient de l'instrumentalisation de l'antisémitisme, je crois aussi qu'il ne faut jamais laisser passer le racisme. Autour de Finkielkraut, il y avait aussi des +gilets jaunes+ qui voulaient le défendre et s'opposer à l'attaque. Je suis avec eux".

Pour Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, le leader de la France insoumise "ne condamne pas" les attaques contre le philosophe. "C'est un naufrage, Jean-Luc Mélenchon", a-t-elle lancé, rappelant qu'il "a été républicain, il a été ministre, sénateur, élu européen".

De quoi susciter en retour l'ire de Jean-Luc Mélenchon sur Twitter, lundi: "Agnès Buzyn, au nom du gouvernement contre la France Insoumise, montre que pour les macronistes la lutte contre l'antisémitisme n'est pas sincère. Juste un prétexte politicien pour régler des comptes", a dénoncé sur Twitter Jean-Luc Mélenchon.

Réactivant des soupçons touchant régulièrement la gauche radicale, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Éducation, Gabriel Attal, a attaqué: "Je vois Jean-Luc Mélenchon parler d’+instrumentalisation de l’antisémitisme+. C’est une ambiguïté malsaine. On attend de lui qu’il condamne, point barre, pas qu’il relativise et fasse de la théorie du complot".

Les critiques viennent aussi d'autres formations. La tête de liste EELV, Yannick Jadot, s'est notamment dit "stupéfait, choqué, outré, d'entendre des responsables politiques qui finalement minimisent les actes d'antisémitisme".

La Licra a pour sa part visé les propos de Thomas Guénolé, coresponsable de l’École de formation de LFI, les comparant avec ceux de la "presse d'extrême droite en 1936". Le politologue insoumis avait tweeté, dimanche: "Cela fait des années qu'Alain Finkielkraut répand la haine en France. Contre les jeunes de banlieue. Contre les musulmans. Contre l’Éducation nationale, etc. L'insulter, comme insulter quiconque, est condamnable. Mais le plaindre, certainement pas."

"Ils ne l’ont pas insulté en le traitant de réactionnaire mais comme juif. Ça ne fait jamais tilt? Relativiser c’est déjà accepter ! #çasuffit", a rétorqué Olivier Faure, premier secrétaire du PS.

- Menaces de mort -

Les militants de LFI sont "blessés" par ces controverses, a confié à l'AFP leur directeur des campagnes et numéro 2 sur la liste pour les européennes, Manuel Bompard, qui a clairement condamné dimanche les insultes contre Alain Finkielkraut. "Chez nous, les plus anciens se mobilisent depuis 40 ans contre toute forme de racisme".

Le siège parisien du mouvement a reçu lundi deux appels de menaces de mort, a-t-il rapporté. Le responsable se dit en outre inquiet pour les manifestations de mardi contre l'antisémitisme, dans ce climat et après le précédent de mars 2018, lorsque Jean-Luc Mélenchon avait été contraint à quitter précipitamment la marche blanche pour Mireille Knoll. Craignant que des groupuscules s'organisent pour les exclure, les Insoumis ne confirmeront leur participation qu'au tout dernier moment.

LFI s'est plusieurs fois débattue avec des accusations de complaisance et d’ambiguïté vis-à-vis de l'antisémitisme au nom de la défense des banlieues. En novembre 2017, la députée Danièle Obono, militante antiraciste très active, avait défendu sa "camarade" Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des indigènes de la République (PIR) et régulièrement accusée d'antisémitisme. "Les juifs sont les boucliers, les tirailleurs de la politique impérialiste française et de sa politique islamophobe", déclarait Houria Bouteldja en 2015. Face au tollé, Mme Obono avait dû préciser qu'elle était en "profond désaccord" avec le PIR.

"A la France insoumise, il y a quelque chose qui pose problème", a jugé auprès de l'AFP le directeur de l'Observatoire des radicalités Jean-Yves Camus. "Pas les convictions individuelles de Jean-Luc Mélenchon ou celles de dirigeants comme Manuel Bompard, François Ruffin, mais ce refus idéologique de considérer que certaines formes d'antisionisme mènent à l'antisémitisme".

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