Ambition artistique ou politique, Ruffin nourrit les spéculations

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Par Baptiste BECQUART - Paris (AFP)
Publié le 05 avril 2019 - 09:37
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François Ruffin et Gilles Perret lors d'une présentation publique de leur film "J'veux du soleil", le 2 mars 2019 à Marseille
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© GERARD JULIEN / AFP/Archives
François Ruffin et Gilles Perret lors d'une présentation publique de leur film "J'veux du soleil", le 2 mars 2019 à Marseille
© GERARD JULIEN / AFP/Archives

Le député François Ruffin, dont le film sur les "gilets jaunes" est sorti mercredi, mêle les démarches artistique et politique pour être le porte-voix de la contestation, nourrissant les spéculations sur ses véritables ambitions.

La méthode d'électron libre du fondateur du journal Fakir, élu député en 2017 avant de prendre place au sein du groupe La France insoumise, s'est manifestée de façon spectaculaire au cours des derniers mois, avec la sortie de son documentaire "J'veux du soleil" réalisé avec Gilles Perret et d'un livre.

L'ouvrage, "Ce pays que tu ne connais pas" (Les Arènes), pamphlet contre Emmanuel Macron, a nourri à sa sortie en février les spéculations sur les véritables objectifs du "député-reporter". D'abord parce qu'il s'y confronte d'égal à égal avec le chef de l'Etat, qui a grandi à Amiens comme lui.

Mais aussi parce qu'il s'y interroge sur son destin politique. L'élection présidentielle, écrit-il, "pervertit tout. Et je le sens jusqu'en moi-même: ça vous effleure, grossit en vous comme une tumeur, ce +Pourquoi pas moi ?+ Les médias, les sondages, les collègues vous farcissent d'une ambition qui n'est pas la vôtre".

Le réalisateur Gilles Perret, qui a aussi filmé Jean-Luc Mélenchon dans "L'Insoumis" (2017), assure à l'AFP que le Picard de 43 ans a d'abord "besoin d'être reconnu par son écriture, par son travail pour rendre beaux" les "gilets jaunes" ; "il a une sincère affection pour les milieux populaires, les gens le sentent".

- "Vieux outils" -

Mais le microcosme politique le scrute avec attention, en premier lieu les Insoumis. "D'un côté il semble hésiter, de l'autre il agit de manière très méthodique. Et il faut bien constater qu'il se passe quelque chose", observe un cadre insoumis historique, qui grince: "Le premier grand meeting de la campagne de LFI pour les Européennes se déroulait à Caen devant 800 personnes, le lendemain Ruffin en réunissait plusieurs milliers au milieu des champs".

"En Mélenchonie, Ruffin compte comme une province autonome", s'amuse un autre cadre. "Il suit sa propre trajectoire, qui le conduit très probablement à une candidature à la présidentielle" en 2022 ou 2027, juge-t-il.

Manuel Bompard, directeur des campagnes de LFI, voit de la "complémentarité" plutôt que de la "concurrence" avec Jean-Luc Mélenchon: "François ne manœuvre pas, il a des instincts avec son bouquin, son film... Dans les salles beaucoup de gens vont voter pour nous".

"Leurs relations sont très bonnes, Ruffin fait partie des quelques personnes que Jean-Luc voit chaque semaine" seul à seul, rapporte un proche de M. Mélenchon.

Le député de la Somme a lui-même raconté au Figaro, début mars, que "l'un de ceux qui (l)'encouragent à ne pas fermer la porte de la présidentielle, c'est justement Jean-Luc Mélenchon". "Il me dit: +Si un jour le drapeau est à terre et que c'est toi qui dois le relever, tu le feras et tu le porteras+", a-t-il ajouté.

En revanche, avance un poids lourd de la galaxie insoumise, "François Ruffin n'est pas un danger pour Mélenchon si celui-ci décide d'aller à la présidentielle. Ça ne s'improvise pas, il faut de l'expérience, de la détermination. Mélenchon reste de très loin le meilleur et la référence" de LFI.

Mais au-delà de LFI? François Ruffin semble plus compatible avec les communistes, qui l'ont soutenu aux législatives de 2017, malgré la rupture avec Jean-Luc Mélenchon après des années de Front de gauche, souligne un responsable du PCF: "Quand il a organisé sa +Fête à Macron+ (mai 2018), il appelait tout le monde à manifester tandis que l'autre s'enfermait dans son bus à impériale avec sa garde rapprochée".

"Pour l'instant, on se dit que Ruffin ferait un bon candidat de gauche radicale, mais qu'il ne serait pas majoritaire. Va-t-il pouvoir dépasser son personnage pour capter l'âme de ce pays?", s'interroge un cadre historique insoumis.

Le député LFI Alexis Corbière, fidèle de M. Mélenchon, déclarait en février: "Avant de jeter les vieux outils qui fonctionnent, encore faut-il s'assurer que nous ayons des outils neufs qui soient aussi efficaces que les précédents".

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