Blocage des prisons : Belloubet à l'épreuve de sa première crise majeure

Auteur:
 
Par Sofia BOUDERBALA - Paris (AFP)
Publié le 21 janvier 2018 - 17:01
Image
La ministre de la Justice à l'intérieur de la prison de Borgo en Corse répond aux journalistes, le 19 janvier 2018
Crédits
© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
La ministre de la Justice à l'intérieur de la prison de Borgo en Corse répond aux journalistes, le 19 janvier 2018
© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Après une semaine de mobilisation, la poursuite du mouvement des gardiens de prison prend des allures de test pour Nicole Belloubet, qui n'est pas parvenue à éteindre la colère et dont la méthode est vertement critiquée par les syndicats pénitentiaires.

La ministre de la Justice "a mis quatre jours" à se rendre à Vendin-le-Vieil, ont déploré les personnels locaux, qui l'ont accueillie au son d'une Marseillaise hostile. C'est dans ce centre pénitentiaire du Pas-de-Calais que des surveillants ont été agressés par un détenu jihadiste le 11 janvier, entraînant le début d'un mouvement social d'ampleur.

Quelques jours plus tard, Nicole Belloubet est huée devant la maison d'arrêt de Borgo (Corse), où elle s'est immédiatement rendue après une agression spectaculaire à l'arme blanche.

Et surtout, après des jours de discussions avec l'Ufap-Unsa Justice (majoritaire) et la CGT-Pénitentiaire, les propositions du gouvernement sur l'emploi et la sécurité ont été samedi unanimement rejetées. Le mouvement va se durcir, après un appel de tous les syndicats à un "blocage total" et reconductible lundi dès 06H00.

Dans un communiqué, la garde des Sceaux s'est bornée dimanche à prendre acte du rejet du projet d'accord. Sans proposer de rencontrer à nouveau les organisations syndicales, elle a relevé les "mesures concrètes pour renforcer la sécurité des personnels et des moyens" apportés par ce texte, citant la création de 1.100 emplois sur quatre ans et une prise en charge spécifique des détenus radicalisés.

Juriste brillante et ancienne élue PS, Nicole Belloubet a-t-elle sous-estimé le malaise d'une profession mal-aimée, qui ne parvient pas à conserver ses recrues et demande plus de reconnaissance?

Les syndicats, qui étaient eux-mêmes divisés au début du mouvement, sont désormais tous d'accord pour critiquer "la méthode" de la chancellerie et "la distance" de la ministre.

"C'est une honte, la manière dont elle traite son personnel en souffrance. Répondre qu'elle +prend acte+, comme ça, montre bien le peu de considération qu'elle porte aux agents", a réagi auprès de l'AFP le secrétaire général de la CGT-Pénitentiaire, Christopher Dorangeville.

- "Absente des discussions" -

"La DAP (Direction de l'administration pénitentiaire) a refusé d'emblée de prendre en compte les demandes de revalorisation statutaire de FO, préférant discuter uniquement de questions sécuritaires avec d'autres syndicats. Résultat, on a perdu une semaine", a déclaré à l'AFP le secrétaire général de FO-Pénitentiaire, Emmanuel Baudin.

L'Ufap-Unsa a pour sa part regretté que la ministre ne soit pas venue s'asseoir elle-même à la table des discussions.

"La ministre a été absente de toutes les discussions", a renchéri M. Dorangeville pour la CGT. "On peut commencer avec le directeur de l'administration pénitentiaire, mais à un moment donné, il faut un engagement et un pilotage de la ministre".

Pour FO, la crise a atteint un tel degré qu'il faut maintenant un arbitrage au plus haut niveau. "Nous avons des revendications statutaires. On demande le passage des personnels de la catégorie C à B. Il faut que Bercy travaille sur tout ça et il faut maintenant que le Premier ministre reprenne la main", estime M. Baudin.

Lundi dernier, au début du mouvement de blocage, le président Emmanuel Macron avait annoncé, au côté de sa ministre, un "plan global" pour la prison en février. L'exécutif n'a depuis fait aucun commentaire sur la crise actuelle. "C'est que la ministre gère bien ses dossiers", commente-t-on place Vendôme.

La méthode Belloubet a toutefois déjà essuyé quelques critiques des syndicats de magistrats qui dénoncent une "consultation de façade" sur les cinq chantiers prioritaires pour réformer la Justice ou de hauts représentants du parquet qui ont appris en même temps que la presse un projet de création d'un parquet national antiterroriste.

"Il est toujours temps de s'asseoir et de discuter", estimait dimanche Emmanuel Baudin de FO. "Si on arrive à mettre les moyens dans les prisons, que les peines sont correctement exécutées, au bout du bout, on fera des économies".

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.