Economies budgétaires : gouvernement et HLM cherchent le "chemin de crête"

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Par Julien DURY - Paris (AFP)
Publié le 09 avril 2019 - 09:07
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Emmanuel Macron veut imposer des baisses de loyers aux HLM afin de compenser une réduction des aides
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© PHILIPPE HUGUEN / AFP/Archives
Un immeuble d'Habitation à Loyer Modéré à Calais, le 20 septembre 2017
© PHILIPPE HUGUEN / AFP/Archives

Peut-on réduire les importantes économies demandées aux HLM ? En pleine négociation, le gouvernement cherche l'équilibre entre discipline budgétaire et évitement d'un déclin durable de la construction.

"Entre notre position et celle du gouvernement, il nous faut chercher un chemin de crête", résumait début avril par écrit Jean-Louis Dumont, président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), confédération du monde HLM.

Depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron, les bailleurs sociaux se voient demander d'importantes économies. D'abord, ils doivent diminuer leurs loyers pour compenser une baisse des aides au logement (APL).

Cette mesure, qui doit représenter 1,5 milliard d'euros par an à partir de 2020, est introduite progressivement: elle a atteint l'an dernier à 900 millions d'euros, certes plus que prévu.

Deuxièmement, les avantages des bailleurs sociaux en matière de TVA ont été réduits, représentant pour eux un surcoût de 800 millions d'euros en 2018. Ce n'est théoriquement prévu que jusqu'à fin 2019, mais le maintien fait peu de doutes dans l'univers HLM.

Longtemps, ces mesures ont braqué le secteur: le ministre du Logement, Julien Denormandie, alors secrétaire d'Etat, avait été hué fin 2017 au congrès annuel des HLM.

Depuis, le ton s'est adouci des deux côtés: déjà sensible lors du congrès suivant fin 2018, l'inflexion s'est accentuée après une rencontre fin mars à Matignon, l'USH jugeant l'écoute du gouvernement sans précédent.

Désormais, "(nous sommes) prêts à sacrifier un peu de visibilité", résume M. Dumont, alors que les discussions doivent se conclure en début de semaine prochaine.

Selon une partie prenante, celles-ci s'orientent vers une réduction des loyers représentant 1,2 ou 1,3 milliard d'euros par an. Quant au volet TVA, il est improbable que le gouvernement revienne dessus, mais des ajustements sont possibles dans le détail des opérations concernées.

L'exécutif doit réconcilier deux considérations. D'un côté, il défend son sérieux budgétaire, en plein suspense sur les mesures qui sortiront du "grand débat" consécutif au mouvement social des gilets jaunes. Lundi, faisant un premier bilan, le Premier ministre, Edouard Philippe, promettait d'abord de "baisser plus vite les impôts".

De l'autre, la construction de logements, certes élevée depuis plusieurs années, s'est repliée l'an dernier et continue début 2019, alors que M. Macron avait comme objectif un "choc d'offre".

- "Le problème du fric" -

C'est l'argument central du monde HLM: les économies finiront par drastiquement réduire la construction de logements sociaux, même si le bilan n'en est actuellement qu'à une petite diminution des agréments l'an dernier.

"L'impact ne s'est pas réellement fait sentir en 2018: c'était un atermoiement. Là on arrive à l'impact réel", avance auprès de l'AFP Marcel Rogemont, président de la Fédération des offices publics (FOPH), les bailleurs dépendant des collectivités locales.

Plusieurs observateurs - la Caisse des dépôts, bras financier de l'Etat et principal financeur du secteur via l'argent du Livret A, et l'agence de notation S&P - prévoient de fait un net recul à terme de la construction de HLM dans le contexte budgétaire actuellement prévu.

L'argument est d'autant plus puissant pour le secteur qu'il ne concerne pas que lui: vu les quotas demandés aux communes en matière de HLM, un promoteur privé doit en prévoir une part importante lorsqu'il lance un projet.

C'est aussi une porte de sortie pour le gouvernement. En échange de l'acceptation d'une diminution des économies, il devrait demander au monde HLM de s'engager à des objectifs de construction.

"Un niveau de production lambda ne peut pas être atteint sans fixer le problème du fric", prévient M. Rogemont. "Si le gouvernement veut quelque chose, il faut qu'il paie."

Parallèlement, l'exécutif promeut toutefois des dispositifs indolores pour les finances publiques: des facilités de prêts du côté de la Caisse des Dépôts, ainsi que l'incitation à la vente de HLM à leur locataires.

"Il faut que les acteurs du logement social essaient de se remettre en marche autour de solutions alternatives", estime auprès de l'AFP Thomas de Saint Léger, directeur de PERL, filiale du géant Nexity et spécialiste de la vente en "démembrement".

Ce concept consiste à céder à terme des logements sociaux à des acteurs privés, qui les récupèrent après plusieurs années d'usage comme HLM, mais il n'est autorisé que pour le neuf.

"On n'est pas condamnés à une seule solution: le financement public du logement social", conclut M. Saint-Léger.

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