"Gilets jaunes" : le retour des députés-maires réclamé par certains élus

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Par Anne Pascale REBOUL - Paris (AFP)
Publié le 19 janvier 2019 - 09:09
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Christian Jacob, patron des députés LR, le 20 décembre 2018 à l'Assemblée nationale
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© Alain JOCARD / AFP/Archives
Christian Jacob, patron des députés LR, le 20 décembre 2018 à l'Assemblée nationale
© Alain JOCARD / AFP/Archives

Les parlementaires, qui ne peuvent plus être en même temps maires, ont-ils été trop peu en prise avec le terrain et les "gilets jaunes"? Certains élus s'appuient sur cette crise pour attaquer la règle du non-cumul des mandats.

La loi votée en 2014 sous François Hollande a interdit aux députés et sénateurs élus ou réélus en 2017 de cumuler ce mandat avec la fonction de maire (ou adjoint), ainsi que celle de président (ou vice-président) de conseils régionaux, départementaux ou intercommunaux.

"Dans un pays assez centralisé, cette expérience d'élu local manque à l'Assemblée, surtout chez LREM", juge Christian Jacob, patron des députés LR, qui a dû lui-même céder son siège de maire de Provins (Seine-et-Marne).

Ce "manque d'ancrage territorial" ressort particulièrement dans la crise en cours et "Emmanuel Macron redécouvre les élus", affirme-t-il à l'AFP, jugeant qu'il n'est "jamais trop tard pour prendre la bonne décision" et remettre la loi sur le non-cumul sur le métier.

Mardi lors du lancement du grand débat national dans l'Eure, le chef de l'Etat s'est montré ouvert: "Faut-il permettre de ré-avoir des mandats locaux, du moins dans certaines proportions, sans être dans des exécutifs de premier plan, peut-être? C’est à vous et aux parlementaires d’avoir ce débat", a-t-il dit aux maires normands.

Gérard Larcher, président (LR) du Sénat, qu'il définit comme "l'Assemblée des territoires", s'est engouffré dans la brèche, plaidant pour "re-réfléchir" à cette règle "en train de construire une déconnexion" des parlementaires.

- "Croiser des gens" -

Des députés de la majorité, dont d'anciens maires, vont dans le même sens. "La mission d'un parlementaire reste de faire la loi et du contrôle, mais c'est pas mal de croiser des gens aussi", lâchait récemment l'un d'eux, rapportant une "souffrance de certains parlementaires", snobés localement par élus et même préfets.

Car "avec le non-cumul, on perd de l'influence, le député devient le supplétif de l'exécutif", explique un autre. Il reconnaît toutefois des défauts au cumul: "cela crée des baronnies, des barrières à l'entrée" au Palais Bourbon.

A contrario, avec près des trois quarts des députés de 2017 qui n'avaient jamais eu un tel mandat, la plupart se sont investis pleinement au parlement, ce qui a changé quelque peu la fonction.

Les "marcheurs", notamment, se démultiplient en missions d'information, groupes de travail. Ils étaient particulièrement nombreux dans l'hémicycle au démarrage. Comparant le début de cette législature à celui de la précédente, le collectif Regards citoyens a aussi calculé qu'en commission, le nombre moyen de présents a augmenté de 29%.

"C'est un job a plein temps", 70 à 100 heures par semaine, affirme Erwan Balanant (MoDem). Les députés-maires "voyaient les gens mais n'avaient pas le temps d'être députés", relève-t-il, notant aussi que revenir sur le non-cumul n'est "pas une demande des +gilets jaunes+".

Avec les nouvelles règles, "chacun est à sa place", estime Cendra Motin (Isère).

Sur les 577 députés, plus de 400 sont cependant conseiller municipal, départemental ou régional. "L'ancrage existe" et "la situation qui permet d'être parlementaire et membre non exécutif d'une collectivité est une bonne chose", défend le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM), issu des rangs socialistes.

Comment revenir en arrière, après une telle réforme portant le sceau du progressisme? Dans son projet de réforme des institutions, Emmanuel Macron a même inscrit le non-cumul des mandats dans le temps, pour une meilleure "respiration démocratique", avec une limitation à trois mandats identiques successifs.

Reste que certains pronostiquent une fuite de députés prenant le chemin des élections municipales en 2020, pour retrouver une fonction plus populaire, surtout à l'heure d'une vague de violences contre les élus de la majorité.

Auparavant, "des députés-maires étaient protégés par leur statut de maire, qui les sauvait un peu de la vindicte", relève aussi Olivier Rozenberg, enseignant à Sciences Po

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