Le grand débat fait escale au Parlement, utile ou factice ?

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Par Charlotte HILL, Anne Pascale REBOUL - Paris (AFP)
Publié le 31 mars 2019 - 09:00
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Les députés applaudissent le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand le 12 février 2019 à Paris
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© JACQUES DEMARTHON / AFP
En attendant les choix de l'exécutif, l'heure est au "débat relatif au grand débat" au Parlement.
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En attendant les choix de l'exécutif, l'heure est au "débat relatif au grand débat" au Parlement: l'occasion pour députés et sénateurs, vivement interpellés voire remis en cause par les "gilets jaunes", de faire entendre leur voix à partir de mardi.

- Quel menu pour députés et sénateurs?

Après deux mois de grand débat, les députés s'empareront des thèmes de la consultation mardi (transition écologique; fiscalité et dépenses publiques) et mercredi (démocratie et citoyenneté; organisation de l'Etat et services publics) - sujets sur lesquels ils ferraillent régulièrement. Lors des quatre séquences, chaque groupe politique s'exprimera, avant des questions-réponses avec le gouvernement.

Lundi 8 avril, le gouvernement livrera la synthèse des 1,5 million de contributions des Français.

Mardi 9, le Premier ministre fera une déclaration à la tribune de l'Assemblée, suivie d'un débat sans vote. Même exercice le lendemain devant le Sénat à majorité de droite, qui a opté pour ce format a minima.

Sénat et exécutif sont en froid, depuis l'affaire Benalla mais aussi les questions posées par Emmanuel Macron dans sa lettre aux Français mi-janvier: "Quel rôle" notamment pour le Sénat et faut-il le "transformer"?

- Des parlementaires sur la touche jusque-là?

Depuis mi-janvier, les deux chambres n'ont pas eu de rôle officiel. Certains se sont émus que tout le monde débatte "sauf ceux qui sont élus pour cela".

Les parlementaires ne sont cependant pas restés inactifs: ils se sont diversement impliqués en circonscription, les députés LREM organisant un millier de réunions. Seuls Insoumis et RN ont clairement pris leurs distances. Ils ont aussi été les destinataires des doléances. Le président du Sénat Gérard Larcher (LR) en a reçu "énormément", avec au centre pouvoir d'achat et "fracture territoriale".

Le Premier ministre avait tôt jugé "légitime" un débat au Parlement. Mais certains plaidaient, comme les communistes, pour des travaux débouchant directement sur l'examen de propositions de loi.

- Les oppositions vont-elles jouer le jeu?

Des élus sont "sceptiques" et mécontents d'intervenir "en bout de course". "Quinze jours à débattre sur le débat, sans vote", les assemblées ne sont pas "des salles des fêtes", balaie le patron des députés LR Christian Jacob. "On se moque du monde".

Son homologue au Sénat, Bruno Retailleau, soupçonne comme lui Emmanuel Macron de faire traîner les choses pour "cannibaliser" la campagne des européennes, ainsi réduite.

"Si on est traités comme depuis le début du quinquennat, ça ne servira pas à grand-chose", déplore un autre LR. Éric Coquerel (LFI) juge "assez curieux" de faire une "espèce de débat consultatif" alors que l'Assemblée a "une fonction décisionnelle" .

"Il ne faut pas que ce soit un débat à vide", plaide un ex-LREM, souhaitant "que le gouvernement puisse mettre sur la table" quelques pistes. Peu probable, selon un ministre: "l'idée est plus de laisser les groupes s'exprimer". Ils prendront tous leur part, souvent pour porter le fer contre l'exécutif.

Les "marcheurs" ont multiplié les rendez-vous y compris avec des ministres pour "armer" leurs idées, qui seront dans la lignée de celles de leur mouvement (nouvelle journée de solidarité, réindexation des retraites...). Les propositions foisonnent côté oppositions: du rétablissement de l'ISF (PS) à une baisse de l'impôt sur le revenu et un recul de l'âge de la retraite (LR). Les communistes ne veulent pas se laisser enfermer par les thèmes imposés, et comptent parler emploi.

- Et après?

Emmanuel Macron sera encore en Bretagne mercredi et en Corse jeudi pour le grand débat. Il annoncera mi-avril les "grands axes de réponse", avant "des décisions qui se déplieront jusqu'à l'été", dixit Sébastien Lecornu, un des deux ministres chargés d'animer la consultation.

Sur le fond, c'est l'inconnu: il faudra "rester dans l'épure" de "l'ADN du macronisme" mais "muscler certains thèmes, accélérer ou corriger sur d'autres", d'après le même ministre, qui promet "des surprises". D'autant que des thèmes "ont émergé", tels "la lutte contre la spéculation", l'immigration ou l'accès aux soins.

Les décisions seront de différentes natures (lois, règlements...), pouvant chambouler le programme des assemblées. L'hypothèse d'un référendum, par exemple sur les institutions, n'est pas tranchée.

Seule forte probabilité: une refonte de la loi NOTRe sur les collectivités pour de nouvelles libertés. Un geste pour les retraités, ou une refonte de la fiscalité écologique - mais sans augmenter les impôts - sont envisagés.

"Les attentes sont fortes", observe un élu d'opposition: "C'est une bombe à retardement" qui peut "leur exploser à la gueule". Le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM) a prévenu: "toute réponse" sera "par avance jugée insuffisante".

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