Nouvelle-Calédonie : un référendum, et après ?

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Par Claudine WERY et Cécile AZZARO - Nouméa (AFP)
Publié le 05 novembre 2018 - 13:24
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La forte percée des indépendantistes lors du référendum d'autodétermination en Nouvelle-Calédonie, qui a vu la victoire du maintien dans la France, rebat en partie les cartes, notamment dans l'optique d'un deuxième référendum.

Voici les conséquences politiques et les principaux enseignements qu'on peut tirer de ce scrutin historique:

QUE VA-T-IL SE PASSER DANS LES MOIS QUI VIENNENT ?

A la mi-décembre, le Premier ministre Edouard Philippe réunira à Paris un comité des signataires de l’accord de Nouméa "pour tirer collectivement les conclusions du référendum".

Cinq mois plus tard, en mai 2019 vont se tenir des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, qui renouvelleront les élus des trois provinces (Sud, Nord, Iles) ainsi que ceux du Congrès, qui élit le gouvernement collégial.

D'ici ces élections, il y a peu de chance que les discussions sur l'avenir institutionnel avancent.

Actuellement, les indépendantistes disposent de 25 élus sur 54 au Congrès.

Pour demander l'organisation d'un deuxième ou d'un troisième référendum, il est nécessaire, selon l'accord de Nouméa signé en 1998, de réunir un tiers des élus du Congrès, soit 18 élus. Depuis dimanche, les dirigeants du FLNKS répètent qu'ils ont l'intention "d'aller jusqu'au bout du processus de décolonisation" de l'accord.

Si tel était le cas, ces scrutins pourraient avoir lieu d’ici 2022.

UNE TRES FORTE PARTICIPATION:

Avec un taux de 80,63 % de votants, le référendum atteint un taux de participation jamais vu dans l'archipel, supérieur à celui enregistré en novembre 1998 lors du référendum pour ratifier l'accord de Nouméa (74,23%).

Cette mobilisation marque l'échec du parti Travailliste (indépendantiste) qui avait appelé à s'abstenir à ce qu'il avait qualifié de "farce". A Ouvéa, île encore meurtrie par la prise d'otage et l'assaut sanglant de la grotte en 1988, où le parti est bien implanté, le taux de participation est l'un des plus faibles de tout le territoire, avec 59,40 % des votants.

Plus largement, le taux de participation dans les Iles Loyauté est le plus faible des trois Provinces, bien en deçà de la moyenne, avec 58,89%. Il s'explique en partie par des soucis dans la transmission des procurations des électeurs de cette province dont beaucoup habitent dans le Grand Nouméa.

LA MOBILISATION EXCEPTIONNELLE DES KANAK:

Alors que durant la campagne, les indépendantistes eux-mêmes craignaient une forte abstention dans leurs rangs à l'aune de ce qui avait été observé lors des précédents scrutins (environ 40%), c'est au contraire "la forte mobilisation des communes kanak indépendantistes qui a réduit l'écart", estime Pierre-Christophe Pantz, docteur en géopolitique.

Selon Patrick Jean, ancien professeur de droit spécialiste de l'accord de Nouméa, "il s'agit d'un vote communautaire chez les Kanak et en face il y a tous les non Kanak", c'est-à-dire les Calédoniens d'origine européenne, asiatique, wallisienne ou tahitienne.

Selon les chiffres officiels, la liste électorale spéciale pour la consultation (LESC) comptait un minimum de 46% de Kanak. Avec 43,6% des suffrages, le peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie a presque entièrement voté pour l'indépendance.

UN RAPPORT DE FORCES MODIFIÉ QUI VA PESER SUR L'AVENIR

Tous les sondages effectués avant le scrutin pronostiquaient une nette défaite des indépendantistes, oscillant entre 25 à 37%. Les non indépendantistes misaient sur une large victoire pour convaincre les indépendantistes de renoncer à l'organisation d'un 2e et d'un 3e référendum d'autodétermination d'ici 2022.

Selon Pierre-Christophe Pantz,il est "clair qu'on ne discute pas de la même manière quand on fait 43% plutôt que 30%". "Cela va forcer les non-indépendantistes à revoir leur copie".

"Je souhaite bien du plaisir à Emmanuel Macron et à Edouard Philippe pour convaincre le FLNKS de renoncer aux autres référendums, d'ici les élections provinciales de mai 2019. Les positions vont se durcir surtout du côté loyaliste", note l'expert Patrick Jean. "Les indépendantistes peuvent sortir apaisés de ce scrutin car ils doivent se dire qu'avec la démographie qui leur est favorable, ils peuvent gagner".

Pour Louis Mapou, chef du groupe UNI-FLNKS au Congrès, "les indépendantistes sont encore plus motivés qu'avant pour demander le deuxième et troisième référendum. Dès demain, on va préparer la mariée pour qu'elle soit encore plus belle en 2020".

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