1917 : révolution politique et dans les moeurs en Russie

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Par AFP
Publié le 28 octobre 2017 - 11:28
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La journaliste Renée Armand, petite nièce d'Ines Armand, et d'autres parents, se rendent sur les tom
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La journaliste Renée Armand, petite nièce d'Ines Armand, et d'autres parents, se rendent sur les tombes de membres de leur famille, à Pushkino près de Moscou, le 16 septembre 2017
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La révolution de 1917 a été aussi un bouleversement des moeurs dans les premières années de la Russie soviétique, avec émancipation des femmes et propagande pour l'amour libre, avant un retour rapide à l'ordre moral.

"Les révolutions sexuelles accompagnent souvent les grands cataclysmes historiques", explique l'historien Vladislav Axionov, de l'Institut d'Histoire russe.

Après la révolution, les femmes russes commencent à lutter pour leurs droits politiques et aussi pour pouvoir choisir librement leur partenaire sexuel ou pour la légalisation de l'avortement.

Avec le soutien appuyé des bolchéviques qui clament alors "A bas la pudeur!" et défendent le principe selon lequel "faire l'amour doit être aussi simple que boire un verre d'eau".

Dans le pays, des associations défendant l'amour libre apparaissent tandis que des nudistes défilent librement dans les rues de Moscou.

Certaines régions tentent même d'adopter des décrets annulant "la privatisation" des femmes par leurs maris, pour les proclamer "propriété de l'État", "accessible" à chaque prolétaire.

Signe de l'évolution des moeurs, en décembre 1917, les bolcheviques adoptent un décret officialisant le mariage civil. Le mariage religieux, lui, n'est plus obligatoire. Rapidement, la famille traditionnelle est considérée comme un vestige du passé.

Le ménage et les enfants sont alors vus comme des obstacles à l'édification de "l'avenir radieux" promis par le communisme. Pour libérer les femmes, des garderies, des cantines et des blanchisseries s'ouvrent dans tout le pays.

En 1917, la Russie "a devancé l'Europe et les États-Unis, en accordant aux femmes le droit de vote", relève Vladislav Axionov. Pour voter, les Américaines devront attendre 1920 et les Françaises 1944.

- Pionnières -

Si autant d'avancées sont possibles, c'est aussi parce que les femmes ont joué un rôle actif dans la révolution russe.

C'est le cas de l'épouse de Lénine, Nadejda Kroupskaïa, ou d'Alexandra Kollontaï. Ministre des Affaires sociales du premier gouvernement bolchévique, cette opposante au mariage deviendra ensuite une des premières femmes au monde ambassadeur.

On trouve aussi parmi ces égéries la Française Inès Armand, dont la biographie reflète les changements dans la société russe.

Arrivée en Russie à six ans, issue d'une famille artistique parisienne, Inès Armand, dès l'adolescence, "se rend compte que le rôle de la femme dans la société russe est peu enviable", confie à l'AFP Renée Armand, sa petite-nièce, journaliste et auteur d'un ouvrage sur sa grande-tante.

Au tournant du siècle, Inès Armand quitte son mari, ses quatre enfants et sa vie bourgeoise à Pouchkino, une ville au nord de Moscou, pour se mettre en couple avec son beau-frère Vladimir, de neuf ans son cadet. Elle aura avec lui un cinquième enfant et s'engage pour la cause bolchévique.

"C'était une femme très active. Le sang français et l'écho de la révolution française en étaient sans doute la cause", veut croire Vsevolod Egorov-Fedossov, qui dirige l'Association des descendants de familles françaises à Moscou.

Après la mort de Vladimir en 1909, Inès Armand fait la connaissance de Lénine, qu'elle admire. Très vite, elle devient son bras droit, le révolutionnaire en exil envoyant souvent cette femme parlant plusieurs langues participer à des conférences internationales.

Ils fondent ensemble en 1914 le journal "Rabotnitsa" ("La Travailleuse" en russe), consacré à la lutte des femmes. Son idée: les femmes sont des esclaves oppressées par le travail et la vie familiale. Seule la révolution peut les aider à obtenir les mêmes droits que les hommes.

"Des rumeurs couraient sur leur histoire d'amour. Un homme politique socialiste a écrit à l'époque que Lénine n'arrivait pas à détacher ses yeux de sa petite Française. Mais sa femme Nadejda Kroupskaïa n'y attachait aucune importance. Elle savait que Lénine n'avait qu'un seul amour dans sa vie: la révolution", poursuit Renée Armand.

La reprise en main conservatrice arrivera toutefois rapidement. Sous Staline, certains acquis sociaux des femmes sont préservés mais l'État s'emploie à contrôler strictement la vie privée de ses citoyens et la famille traditionnelle est remise à l'honneur.

En 1986, au début de la perestroïka, lors d'une émission télévisée faisant dialoguer des Américains avec des Soviétiques, une femme russe s'exclame: "Il n'y a pas de sexe chez nous, et nous sommes catégoriquement contre!"

Une formule choc qui a fait rire des millions de Soviétiques mais qui illustre à sa manière les dizaines d'années de pudibonderie dans lesquelles a vécu le pays jusqu'à la chute de l'URSS, très loin des débordements des premières années post-révolutionnaires.

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