Après #MeToo, la question des Noirs au cinéma s'invite aussi à Cannes

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Par Olivier LUCAZEAU - Cannes (AFP)
Publié le 15 mai 2018 - 15:42
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Le réalisateur américain Spike Lee, le 15 mai 2018 au festival de Cannes, pour le film "BlacKkKlansman"
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© Laurent EMMANUEL / AFP
Le réalisateur américain Spike Lee, le 15 mai 2018 au festival de Cannes, pour le film "BlacKkKlansman"
© Laurent EMMANUEL / AFP

Avec l'offensif Spike Lee en compétition, l'engagée Ava DuVernay dans le jury et mercredi une montée des marches d'actrices noires et métisses, la question de la présence des Noirs au cinéma s'invite en force au Festival de Cannes.

Après la montée des marches de 82 femmes samedi au nom de "l'égalité salariale" entre hommes et femmes dans le 7e Art, 16 actrices françaises noires et métisses vont occuper le tapis rouge du Palais des festivals pour dénoncer les rôles interdits et les clichés ou plaisanteries douteuses voire racistes.

Un effet de la libération de la parole féminine suite au scandale Harvey Weinstein, le producteur hollywoodien accusé de harcèlement sexuel et de viols par une centaine de femmes ? "J'ai été imprégnée par l'air du temps, la preuve que les choses évoluent est qu'on sort les cadavres du placard", a reconnu auprès de l'AFP l'actrice Aïssa Maïga, leader de ce mouvement, à l'origine du livre collectif "Noire n'est pas mon métier".

"Pas assez africaine pour une africaine", "Trop noire pour (jouer) une métisse": autant de remarques blessantes encaissées par les actrices qui vont fouler le tapis rouge. Blessants aussi, ces rôles refusés ou attribués par réflexe par des directeurs de casting obtus. Une Antillaise ? Forcément infirmière. Avocate ? Vous n'y pensez pas !

- "Le chemin est long" -

Une certitude: le sujet est défendu au sein même du jury chargé de décerner la Palme d'or, présidé par Cate Blanchett.

Parmi les neuf jurés, la réalisatrice américaine Ava DuVernay, infatigable militante de la cause noire et première réalisatrice afro-américaine nommée pour un Golden Globe en 2015 pour "Selma", sur la marche pour les droits civiques conduite par Martin Luther King en 1965. Via son collectif Array Now, elle soutient le "travail des cinéastes de couleur et notamment des femmes réalisatrices", souligne sur son site le festival de Cannes.

"C'est vrai que le chemin est long. (...) Nous serons là pour les soutenir", avait déclaré de son côté la chanteuse burundaise Khadja Nin, également membre du jury, à l'ouverture de cette 71e édition.

Ryan Coogler, le réalisateur de "Black Panther", premier film sur un super-héros noir, a lui choisi de s'exprimer sur cette question avec sa caméra. "J'en avais marre des BD avec seulement des héros blancs ou les Noirs sont là pour la décoration", a-t-il lâché à Cannes, à l'occasion d'une leçon de cinéma organisée dans le cadre du Festival où il a expliqué pourquoi il s'est emparé de ce personnage méconnu de Marvel.

Dans le public, Aïssa Maïga et le réalisateur haïtien Raoul Peck, nominé aux Oscars 2017 pour son documentaire "I am not your Negro".

- "Plafond de verre" pour les Noirs -

La présence des Noirs à l'écran et derrière la caméra a-t-elle évolué récemment ? "Entre 1985 et aujourd'hui, c'est le jour et la nuit", avait concédé Spike Lee en janvier, sur la chaîne Viceland. "Mais nous ne pouvons pas être satisfaits", insistait le réalisateur américain, qui a fait son retour à Cannes lundi soir avec "BlacKkKlansman", l'histoire vraie d'un policier afro-américain infiltré parmi des membres du Ku Klux Klan: "Il ne s'agit pas seulement de faire un film. Nous devons accéder à ces postes-clés pour avoir notre mot à dire sur ce qui se tourne".

A Cannes aussi cette année, Michael B. Jordan, dans le remake de "Fahrenheit 451", le chef d'oeuvre de Ray Bradbury après avoir incarné l'adversaire la Panthère Noire dans le film de Coogler. Ou Donald Glover dans un des premiers rôles de "Solo", le dernier opus de la série Star Wars, dévoilé mardi soir. Glover alias Childish Gambino, le rappeur dont la vidéo interrogeant les Etats-Unis sur le racisme a été vue par plus de 100 millions de personnes en sept jours sur YouTube.

C'est Spike Lee qui "a brisé le plafond de verre" pour les Noirs dans le cinéma, selon Michael Genet, acteur et scénariste: "Ryan Coogler ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui si Spike Lee n'avait pas fait ce qu'il a fait".

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