Dans un village breton, une école solidaire aide les réfugiés à s'intégrer

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Par Sandra FERRER - Le Cloître-Saint-Thégonnec (France) (AFP)
Publié le 02 avril 2019 - 11:00
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La professeure retraitée Catherine Le Gouic donne une leçon de français à un réfugié le 27 mars 2019
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© Fred TANNEAU / AFP
La professeure retraitée Catherine Le Gouic donne une leçon de français à un réfugié le 27 mars 2019
© Fred TANNEAU / AFP

D'un geste de la main, Ben Mohamed Kone salue le chauffeur de car chargé du ramassage scolaire au Cloître-Saint-Thégonnec, paisible village breton aux portes des monts d'Arrée. Le jeune ivoirien s'engouffre ensuite dans la petite maison à la façade crème qui fait office d'école pour les migrants.

"Le médecin de ma voisine traite uniquement ses patients par homéopathie", lit d'une voix légèrement saccadée le demandeur d'asile de 22 ans.

"Qu'est-ce que l'homéopathie ?" l'interrompt Florence de Calan, l'une des bénévoles de cette école atypique créée il y a près d'un an par l'association "Les utopistes en action", qui se présente comme un regroupement de citoyens ayant à coeur de "mettre en oeuvre leur désir de société plus juste, plus libre, plus solidaire".

"Des médicaments à base de plantes", répond l'élève après une courte hésitation, la tête toujours penchée sur sa feuille, offrant uniquement à la vue ses courtes dreadlocks.

Deux camarades, installés autour de la même table, suivent attentivement le cours organisé dans la petite salle aménagée à l'étage de la maison des associations du village, mise à disposition par la commune de quelque 650 habitants.

"Dans les foyers, ils ne font pas grand-chose, on ne leur propose rien", explique à l'AFP l'enseignante en Français langue étrangère (FLE). "Ici, ils ont des cours, des ateliers et puis comme on est dans un petit village ils sont très bien intégrés, ils rencontrent des gens", poursuit-elle en ramassant ses affaires pour aller déjeuner dans la grande pièce du rez-de-chaussée avec les autres bénévoles et la dizaine d'élèves -de Côte d'Ivoire, mais aussi de Guinée, du Bénin, du Mali ou encore d'Afghanistan- fréquentant l'école.

Comme tout établissement d'enseignement classique, l'école alternative du Cloître-Saint-Thégonnec fonctionne du lundi au vendredi, de 09H00 à 16H30. Grâce à une vingtaine d'enseignants bénévoles, les élèves y suivent des cours de français, de maths, de sciences, d'anglais, mais aussi d'informatique, de musique ou encore de breton.

- "un vrai cadre scolaire" -

Dans l'atelier attenant à la petite maison, ils sont initiés à la menuiserie. Ils y confectionnent fauteuils et chaises qui seront ensuite vendus. Parfois hébergés en foyer, à Morlaix ou Quimper, les migrants sont logés la semaine dans des familles d'accueil bénévoles du Cloître-Saint-Thégonnec où des communes avoisinantes. Les mineurs non reconnus comme tels par les autorités sont hébergés exclusivement en famille d'accueil. L'association dispose d'une vingtaine de lits.

"On apprend plein de choses", se réjouit Ben Mohamed Kone, disant apprécier également la vie en famille. "Ma famille est super, elle m'a adopté", assure le jeune homme dans un large sourire avant de s'en départir pour expliquer qu'en dehors "des amis de la route" il est "tout seul". Le jeune ivoirien, qui dit avoir été "acheté, maltraité et frappé" lors de son long périple jusqu'en Europe, se ferme aussi à l'évocation de son statut de demandeur d'asile. "J'ai peur de devoir repartir ou de me retrouver dans l'illégalité", avoue-t-il.

"Au début, c'était un peu difficile pour moi, mais là ça va, j'arrive à comprendre les choses et à m'améliorer en français", témoigne Camara Mohamed Kelefa, jeune Guinéen arrivé en France "il y a quelques années" et lui aussi demandeur d'asile. "On est tombés sur des personnes ouvertes et super gentilles, tout le monde n'a pas cette chance", poursuit-il.

"C'est assez intensif finalement. Ils se retrouvent comme s'ils étaient dans un vrai cadre scolaire. C'est aussi une bonne façon de se mettre dans un rythme et puis peut-être d'aller mieux aussi", souligne Sandrine Corre, coprésidente des Utopistes en action.

Et les enseignants de cette école solidaire n'ont que des louanges à l'égard de leurs élèves. "L'échange avec eux est particulièrement riche. Ils sont tellement demandeurs et tellement en soif d'apprendre et de s'intégrer que du coup c'est un bonheur d'être avec eux", assure Brigitte Maltet, 63 ans, une fois son cours de français terminé.

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