Jadis conspuées, les suffragettes britanniques sortent de l'ombre

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Par Pauline FROISSART - Londres (AFP)
Publié le 06 février 2018 - 14:44
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La statue d'Emmeline Pankhurst, l'une des fondatrices des Suffragettes britanniques, devant le Parlement, le 1er février 2018 à Londres
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© DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP/Archives
La statue d'Emmeline Pankhurst, l'une des fondatrices des Suffragettes britanniques, devant le Parlement, le 1er février 2018 à Londres
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Traitées de "furies" ou de "sauvages", caricaturées, emprisonnées, les suffragettes, dont le combat a contribué à permettre aux femmes britanniques d'accéder au droit de vote il y a exactement 100 ans, sont désormais réhabilitées et sortent de l'ombre.

Mardi, des portraits grandeur nature de ces militantes, dont beaucoup sont restées méconnues, seront exposées à Trafalgar Square, dans le centre de Londres, où les manifestantes avaient l'habitude de défiler au début du XXe siècle.

Au printemps, c'est la statue de Millicent Fawcett, héroïne de la cause féministe, qui sera dévoilée en face du Palais de Westminster, première statue de femme dans ce lieu symbolique. Elle côtoiera d'autres grandes figures de l'histoire du pays comme Churchill ou Lloyd George.

A l'inverse des suffragettes, qui prônaient l'action directe pour faire avancer leur cause, brisant des vitrines ou incendiant des bâtiments, Millicent Fawcett était une "suffragiste", adepte de l'action non violente.

Helen Pankhurst, l'arrière-petite-fille d'Emmeline Pankhurst, la plus célèbre des suffragettes, soutient l'hommage qui lui est rendu.

"Les suffragistes sont tombées dans les oubliettes de l'Histoire, et je pense qu'elles doivent faire partie de l'Histoire", a-t-elle expliqué lors d'un entretien avec la presse organisé par l'Association de la presse étrangère (FPA) à Londres.

Si Emmeline Pankhurst et ses trois filles Christabel, Adela et Sylvia, restent les figures de proue des suffragettes, des milliers de femmes de tous âges et milieux sociaux ont fait campagne avec détermination pour obtenir le droit de vote. Près de 1.300 ont été emprisonnées et certaines nourries de force après avoir entamé des grèves de la faim.

- 'Questionner la norme' -

"Emmeline seule n'aurait jamais fait ce qu'elle a fait", a souligné Helen Pankhurst, elle aussi militante et auteure de "Deeds not words" (Des actions, pas des mots), un livre sur l'histoire et l'héritage du mouvement féministe. Emmeline est une "icône", "elle était belle, charismatique et sa petite taille contrastait avec la force de sa personnalité, mais sans les autres, et en particulier ses filles, rien ne se serait passé".

Parmi les anonymes aujourd'hui célébrés, Alice Hawkins, machiniste dans une usine de chaussures et leader du mouvement féministe à Leicester (centre de l'Angleterre). Sa statue s'érige depuis ce week-end à l'endroit même où cette mère de six enfants haranguait la foule.

Une reconnaissance méritée, considère son arrière-arrière-petite-fille, Kate Barrat: "Les suffragettes n'étaient pas des féministes issues des classes supérieures et disposant de temps libre, mais des personnalités non conformistes et intrépides, des femmes (et des hommes) de tous milieux économiques et sociaux", a-t-elle dit à Sky News.

A Londres, la prestigieuse National Portrait Gallery expose un tableau qui fut lacéré à coups de couteau de boucher par une suffragette, Anne Hunt, en juillet 1914, après une nouvelle arrestation d'Emmeline Pankhurst.

Qualifiée de "furie au hachoir", de "démon à la hachette", ou encore de "sauvage", Anne Hunt fut condamnée à six mois de prison. Par la suite, les femmes furent priées de laisser sacs et manchons aux vestiaires des musées, de crainte d'actes similaire.

"Le Général" Flora Drummond, "l'actrice pyromane" Kitty Marion, "l'organisatrice" Charlotte Marsh: le Museum of London met aussi en avant des suffragettes oubliées, exposant des objets qu'elles utilisèrent pour s'enchaîner ou briser des vitrines, mais aussi des cartes postales, poupées ou jeux de sociétés spécialement crées et vendus pour récolter de l'argent, montrant leur talent pour communiquer et lever des fonds.

La nouvelle génération de militantes "a un peu l'impression d'être juchée sur les épaules de géants", dit Helen Pankhurst. Selon elle, "il y a beaucoup de parallèles" entre les suffragettes d'hier et les féministes d'aujourd'hui: "elles continuent de questionner la norme", "elles continuent à dire +ça suffit+, 'on peut changer les choses'".

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