A Paris, un projet immobilier permet à des religieuses de rester dans leurs murs

Auteur:
 
Par Benoît FAUCHET, Rebecca FRASQUET - Paris (France) (AFP)
Publié le 12 avril 2018 - 17:18
Image
Le site de construction de la Nouvelle Maison Saint-Charles dans le XVe arrondissement de Paris, le 11 avril 2018
Crédits
© ERIC PIERMONT / AFP
Le site de construction de la Nouvelle Maison Saint-Charles dans le XVe arrondissement de Paris, le 11 avril 2018
© ERIC PIERMONT / AFP

Pour conserver le site d'un ancien orphelinat parisien, des religieuses se sont lancées dans une opération immobilière mêlant logements sociaux et appartements de luxe: une réponse originale à un problème qui se pose à des communautés aux effectifs en baisse et vieillissants.

Une fois passée la porte de la Maison Saint-Charles, le vacarme de la rue de Vaugirard prend fin. Dans ce havre de paix au cœur du XVe arrondissement de la capitale, qui a abrité un orphelinat puis une école primaire et son internat, vivaient récemment encore 27 sœurs dominicaines de la Charité.

"Elles étaient très âgées, 85 ans en moyenne et les lieux étaient devenus très vétustes, malgré quelques travaux que nous avions faits", explique à l'AFP sœur Véronique Margron, responsable pour la France de la congrégation des sœurs de charité dominicaines de la Présentation, propriétaire des lieux depuis 1872.

"La question s'est posée de ce que nous allions faire de cet endroit", poursuit-elle. "Le souci de la congrégation était de ne pas se séparer d'un site chargé de toute une histoire d'engagement, de solidarité".

Faute de vocations suffisantes dans un pays très sécularisé, les effectifs des religieux et religieuses, moines et moniales en France ont épousé une courbe fortement déclinante, passant de plus de 60.000 en 1998 à moins de 30.000 aujourd'hui. Près de quatre religieux sur cinq sont des femmes, souvent très âgées.

Or ces communautés doivent souvent gérer un patrimoine immobilier démesuré, agrandi au fil des siècles, au temps des vocations nombreuses. "Nous travaillons fréquemment avec des congrégations pour imaginer des solutions de continuité" pour les lieux dont elles sont propriétaires, explique le père Bernard Devert, fondateur de l'association Habitat et Humanisme, associé au projet de la nouvelle Maison Saint-Charles.

Ces lieux "deviennent souvent des maisons de retraite médicalisées Ehpad, ou des lieux intergénérationnels, qui permettent aux sœurs d'entrer dans une dynamique sociale et sont un terrain d'expérimentation pour quelque chose qui a vocation à s'étendre dans la société", dit-il.

Autre solution: céder les lieux à une communauté dite nouvelle, aux effectifs plus jeunes et plus dynamiques. Ainsi, le Chemin Neuf, issu du Renouveau charismatique, a repris plusieurs abbayes bénédictines en permettant aux moines d'y rester, au moins à titre provisoire, comme c'est le cas à La Meilleraye-de-Bretagne (Loire-Atlantique).

- "Lieu de brassage" -

Pour éviter de partir, les religieuses de la Maison Saint-Charles ont lancé une opération immobilière mêlant deux projets très différents qui seront livrés à l'été 2020: d'un côté une maison sociale intergénérationnelle et de l'autre, sur une parcelle de terrain cédée au promoteur Vinci immobilier, un programme d'appartements de luxe.

La chapelle du XIXe siècle sera restaurée, et une "nouvelle Maison Saint-Charles" verra le jour, conçue par l'agence h2O Architectes.

Elle accueillera "des familles monoparentales en situation précaire, des personnes très modestes qui ont d'extrêmes difficultés à se loger à Paris, des jeunes travailleurs, des étudiants, des gens de passage", précise sœur Véronique Margron.

"Nous voulions que ce lieu reste un lieu de brassage des gens, des âges, des sensibilités, des histoires, qu'il perpétue le vivre-ensemble", dit-elle.

Le bailleur social France Habitation apportera les fonds et mènera à bien ce projet social, dont l'association Habitat et Humanisme, dédiée au logement des personnes en difficulté, assurera la gestion pendant 42 ans. En 2062, la congrégation redeviendra propriétaire des murs.

Sur les 45 logements sociaux à bas loyers, 20 seront réservés aux sœurs, dix accueilleront des familles monoparentales et les 15 restants seront réservés à des jeunes travailleurs et des étudiants. S'y ajoutent deux appartements en colocation et 15 chambres d'hôtes.

Mais 37 logements neufs haut de gamme, donnant sur un jardin, verront aussi le jour, du studio au cinq-pièces de 203 m2, vendus entre 14.000 et 19.000 euros le m2 et déjà pré-commercialisés à 25%, dont les futurs occupants "se sont montrés intéressés" par la vocation sociale du projet, assure Vinci Immobilier.

A l'issue d'une concertation de deux ans avec les riverains, le promoteur a toutefois dû consentir à réduire de 40% le nombre de logements privés et à planter davantage d'arbres dans les jardins.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.