A Ploërmel, la croix de la discorde fait aujourd'hui partie du paysage

Auteur:
 
Par AFP
Publié le 02 novembre 2017 - 22:37
Image
France-Soir
Crédits
©DR
Municipale 2014
©DR

Des chrysanthèmes et des bougies ornent le socle de la statue de Jean Paul II à Ploërmel (Morbihan), où les habitants balancent entre amertume et indifférence après la récente décision du Conseil d'État ordonnant au nom de la laïcité le retrait de la croix qui la surplombe.

"J'espère que vous n'allez pas nous enlever notre Jean Paul!" Alerté par la présence de journalistes au pied du monument de 7,50 mètres de haut, Guy Olszewski, d'origine polonaise, est spontanément descendu de sa voiture pour apporter sa pierre au débat. "Ça me dépasse! Nous sommes dans un pays chrétien. Quand je vois que l'on construit des mosquées dans d'autres communes..."

"Ce n'est pas la statue en elle-même qui pose problème. Le pape est un personnage comme un autre, ça pourrait être De Gaulle, Coluche ou n'importe qui. Mais le fait qu'on ait apposé une croix immense au dessus en fait un monument religieux", lui répond Michel Pageot, de retour de la boulangerie.

En place depuis 2006 au centre d'un parking public, à proximité de deux établissements scolaires catholiques, la statue de bronze, placée sous une arche imposante surmontée d'une croix, fait aujourd'hui partie du paysage de la commune bretonne. Beaucoup de Ploërmelais ont accueilli avec détachement le dernier épisode judiciaire de ce feuilleton.

"Elle ne me dérange pas cette statue, elle est à sa place ici et fait même venir des touristes", note Denis Robin. "Je ne comprends pas cette polémique et je pense malheureusement qu'elle n'est pas finie."

- Vers une privatisation du terrain -

A l'origine de l'installation de la sculpture, offerte par l'artiste russe Zourab Tsereteli, à qui il avait facilité l'obtention d'un visa pour sa fille, l'ancien maire (divers droite) Paul Anselin a beau avoir perdu une bataille, il n'entend pas rendre les armes.

"Arrêtons de nous culpabiliser en permanence. La France, c'est la France et aucune juridiction, même la plus haute, n'a le droit de violenter nos convictions, nos croyances et surtout notre culture", assène-t-il dans son salon, où trônent une réplique miniature de la statue et une photo de sa rencontre avec Jean Paul II en 1987.

Ce personnage baroque de 87 ans, condamné en 2009 dans le procès de l'Angolagate, souhaite notamment l'organisation d'un référendum d'initiative locale, appelle à une grande manifestation œcuménique en décembre. Il appuie la proposition du maire (LR) actuel de Ploërmel, Patrick Le Diffon, de privatiser le terrain sur lequel se trouve le monument afin qu'il ne tombe plus sous le coup de la loi de 1905 de séparation des Églises et de l'État.

"Une procédure de déclassement du domaine public a déjà été lancée. Il faut savoir que la mairie n'a fait l'acquisition de ce terrain, qui était auparavant la cour attenante à un collège privé, qu'à la fin des années 1990. Ça n'a jamais été une place publique historique", a indiqué à l'AFP M. Le Diffon, qui a six mois pour trouver une solution.

- Des menaces de mort -

"Ce n'est pas en privatisant un espace autour de la statue que ce sera réglé, car c'est le caractère ostentatoire de la croix qui pose clairement problème. Il faudrait alors faire en sorte que la croix ne soit pas visible de l'espace public, c'est d'une absurdité totale", répond Gilles Kerouedan, membre de la fédération morbihannaise de la Libre pensée et opposant de la première heure au monument.

"J'espère que le bon sens l'emportera une fois que la passion sera retombée", ajoute cet habitant de Ploërmel, qui a déposé plainte cette semaine à la gendarmerie après avoir reçu des menaces de mort d'un mouvement se revendiquant du "Renouveau nationaliste".

La décision du Conseil d'État, rendue le 25 octobre, déchaîne les passions sur les réseaux sociaux, notamment à travers le hashtag #touchepasmacroix.

De nombreuses personnalités politiques ont également réagi, parmi lesquelles Nadine Morano (LR) et la Première ministre conservatrice polonaise Beata Szydlo. Elle a fait savoir que son gouvernement "tentera de sauver de la censure le monument de notre compatriote", proposant même de le transférer en Pologne.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.