Réunis à Lourdes, les évêques accueillent des victimes de pédophilie

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Par Karine PERRET - Paris (AFP)
Publié le 31 octobre 2018 - 17:02
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La conférence des évêques de France réunis à Lourdes le 7 novembre 2016
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© PASCAL PAVANI / AFP/Archives
La conférence des évêques de France réunis à Lourdes le 7 novembre 2016
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Les 118 évêques catholiques de France se réunissent en assemblée plénière à partir de samedi à Lourdes, un rendez-vous lors duquel ils entendent mettre en avant leur travail dans la lutte contre la pédophilie dans l'Eglise, en accueillant des victimes.

Sept ou huit victimes sont attendues dans la cité mariale par la Conférence des évêques de France (CEF), sauf éventuelle défection d'ici samedi. La principale association, La Parole libérée, a de son côté renoncé à y participer, ses principaux fondateurs jugeant l'accueil proposé très peu respectueux des victimes.

La CEF y voit elle une marche supplémentaire dans la prise en compte de ce fléau, après la "demande de pardon" exprimée solennellement en novembre 2016, la mise en place de divers dispositifs depuis deux ans (cellule permanente, cellules d'écoute dans les diocèses) ou encore la publication, mardi, d'un rapport chiffré sur les signalements et mesures de justice visant les prêtres pédophiles.

"Si, à travers toutes ces mesures, la CEF manifeste sa ferme volonté de mettre en place une culture de bientraitance et de sécurité (...) il n'en demeure pas moins qu'il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. La culture du secret, la tentation de minimiser la gravité des abus sexuels, l'oubli ou le refus d'écouter les victimes et la tentation de vouloir défendre à tout pris l'institution sont autant d'obstacles à surmonter dans l'Eglise", écrit Mgr Luc Crépy, évêque en charge de la lutte contre la pédophilie, en conclusion de ce rapport.

Concrètement, la rencontre samedi ne va pas se faire dans l'hémicycle, comme les victimes le souhaitaient, mais lors de groupes de travail (des "carrefours") réunissant deux victimes et 25 à 30 évêques chacun. Parmi les sujets de discussion proposés par les victimes: "L'accompagnement des personnes", "la place et le recours aux droits", "les cas très anciens", "l'atteinte spirituelle"...

- "Signe fort aux évêques" -

L'une des victimes, Véronique Garnier, espère cette rencontre "depuis très longtemps". Pour que les évêques "reconnaissent leur responsabilité", sur des crimes qui ont pu être commis selon elle grâce à un "système". Et pour les "interpeller sur la façon dont ils doivent accueillir les personnes abusées". "C'est l'occasion d'avoir une parole qui explique, qui apaise", explique à l'AFP cette femme de 57 ans, abusée par un prêtre ami de sa famille, pendant deux années lors de son adolescence.

Olivier Savignac, partie civile lors du procès mardi à Orléans de l'abbé Castelet et l'ancien évêque André Fort (deux peines de prison ferme ont été requises contre eux), vient à Lourdes pour "envoyer un signe fort auprès des évêques". "Il ne faut pas que ce soit seulement de la com'", dit-il, souhaitant qu'"ils prennent conscience de la gravité des faits".

Des "actes de réparation", "des actions de prévention", voire "un fonds d'indemnisation" sont des attentes qui reviennent souvent.

"Cette rencontre est indispensable car il y a encore un bon quart des évêques qui n'ont pas montré jusqu'ici grand intérêt à traiter ces questions-là", estime Stéphane Joulain, prêtre psychothérapeute qui a accompagné des victimes.

Elle intervient alors qu'une demande de commission d'enquête parlementaire sur les actes de pédophilie dans l'Eglise, lancée par des religieux, des avocats, deux anciennes ministres et portée par les sénateurs socialistes, a essuyé un refus il y a deux semaines au Sénat. A défaut, une mission d'information (avec beaucoup moins de pouvoirs) portant sur les "abus sexuels dans tous les lieux d’accueil des mineurs" va être lancée.

La CEF, qui n'était pas favorable à l'enquête parlementaire, travaille de son côté "à la mise en place d'une instance externe, indépendante, comprenant des historiens, qui devra faire le travail de vérité et de mémoire". Elle en discutera à Lourdes.

Dans plusieurs pays où des scandales ont éclaté (Australie, Irlande, Pennsylvanie aux Etats-Unis), un travail d'inventaire a été réalisé par des instances indépendantes.

Ce samedi, l'association ECA (Ending Clergy abuse) appelle toutes les victimes de pédophilie dans l'Eglise dans le monde à se rassembler dans l'après-midi près de leur cathédrale la plus proche.

L'assemblée dure jusqu'au 8 novembre. Y seront traités aussi les questions de vocations, du synode des jeunes ou encore de l'Europe.

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