"Le Traître" : Tommaso Buscetta, le plus célèbre repenti de la Mafia (vidéo)

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Jean-Michel Comte
Publié le 30 octobre 2019 - 18:23
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Film Le Traitre
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Le mafieux Tommaso Buscetta (Pierfrancesco Favino, à droite) se confie au juge Giovanni Falcone (Fausto Russo Alesi).
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CRITIQUE – Présenté en compétition au dernier Festival de Cannes, le film "Le Traître", du réalisateur italien Marco Bellocchio, sort ce mercredi dans les salles françaises. Il raconte l'histoire de Tommaso Buscetta, l'un des chefs de Cosa Nostra, la Mafia sicilienne, qui décida dans les années 80 de collaborer avec la police et de livrer les noms de centaines de mafieux.

SORTIE CINÉ – "Moi, je ne me considère pas comme un repenti", répétait-il inlassablement. Pourtant le chef mafieux italien Tommaso Buscetta, dont le réalisateur Marco Bellocchio dresse le portrait dans son dernier film Le Traître (ce mercredi 30 octobre sur les écrans), est à l'origine de plus de 400 arrestations de membres de Cosa Nostra dans les années 80.

Le film débute en 1980 quand Tommaso Buscetta (Pierfrancesco Favino), l'un des chefs de Cosa Nostra, déjà condamné pour meurtre et trafic de drogue, revenu en Italie après plusieurs exils et arrestations aux États-Unis et au Brésil, décide à nouveau de quitter son pays pour retourner au Brésil, avec sa dernière femme et leurs jeunes enfants.

Il laisse derrière lui deux grands fils, dans une Italie où les règlements de comptes s'enchaînent entre clans rivaux de la Mafia. Le principal ennemi de Buscetta est Toto Riina, originaire comme lui de Sicile, qui fait assassiner ses proches les uns après les autres pour s'assurer le contrôle du trafic de l'héroïne, dont Palerme est l'un des pivots mondiaux.

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Buscetta songe à rentrer en Italie mais la police brésilienne est plus rapide: il est arrêté, puis extradé. Il prend alors la décision de collaborer avec la police italienne, considérant que le clan Riina et les nouveaux chefs de Cosa Nostra ont trahi le code d'honneur de l'organisation, en assassinant notamment les femmes et les enfants.

Buscetta se confie au juge Giovanni Falcone, avec lequel il tisse une relation de confiance. Grâce à ses témoignages et révélations, 475 mafieux sont condamnés dans le "Maxi-Procès" de Palerme en 1987. Mais l'histoire de Tommaso Buscetta, de Toto Riina et du juge Falcone est loin d'être terminée…

Quand Tommaso Buscetta décide de se mettre à table, "nul ne sait ce qui le pousse à collaborer. La survie et la sécurité évidemment, mais il semble animé par d’autres desseins: la vengeance et la volonté de démanteler une Mafia qui ne correspond plus à ses valeurs. Buscetta franchit une étape décisive, il devient un traître en passant dans le camp ennemi. Mais il ne se considère pas comme tel", explique Marco Bellocchio, 79 ans, réalisateur notamment des Poings dans les poches (1965), Le Saut dans le vide (1980), Le Diable au corps (1986) ou plus récemment Fais de beaux rêves (2016).

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"La trahison est un thème récurrent et inlassablement exploré au cinéma, justement parce qu’il propose une réflexion sur le changement", ajoute le réalisateur. "Un homme, au cours de sa vie, peut-il réellement et profondément changer ou n’est-ce que simulacre? Le changement est-il un moyen de guérir, de se repentir? Buscetta, qui refusa toute sa vie l’appellation de «repenti», s’est-il inscrit dans cette démarche de guérison, de rédemption afin de devenir un homme nouveau? Ou a-t-il créé sa propre justice?"

Dans un film très maîtrisé, aux scènes de procès parfois un peu longues mais qui fait figure de vrai film de gangsters au scénario basé sur la réalité historique, Marco Bellocchio fait de Tommaso Buscetta un personnage sympathique, face à un Toto Riina qui passe pour le méchant. Mais ce parti pris est contrebalancé par la dernière scène, et par certaines répliques par lesquelles le chef mafieux avance des vérités banales et convenues: "La famille, pour moi, c'est sacré" ou "J'ai été, et je reste, un homme d'honneur", ou le répétitif "Je ne suis pas un repenti".

Présentée en compétition au dernier Festival de Cannes, cette fresque de la Mafia dans l'histoire récente de l'Italie, passionnante pour ceux qui s'intéressent à cette époque, "est d’avantage l’histoire de Tommaso Buscetta que celle de Cosa Nostra", explique le réalisateur, séduit par cet "individu versatile, constamment en mouvement, dans sa vie et ses relations personnelles, singulier, intelligent, charmant, efficace et doté d’une autorité naturelle". Et dans ce rôle, l'acteur Pierfrancesco Favino, omniprésent, porte sur ses épaules, par son interprétation, une grande partie de la réussite du film.

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