Oscar du meilleur film : "Birdman", une vertigineuse tragi-comédie sur le showbiz américain (VIDEO)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 23 février 2015 - 01:37
Mis à jour le 25 février 2015 - 01:58
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Birdman Michael Keaton Edward Norton
Crédits
©20th Century Fox
Michael Keaton et Edward Norton dans "Birdman".
©20th Century Fox
"Birdman", grand vainqueur des 87es Oscars dimanche soir avec quatre trophée dont celui du meilleur film, sort dans les salles françaises ce mercredi 25 février. C'est un film brillant et original du réalisateur mexicain Alejando G. Inarritu.

Birdman, le film d'Alejandro González Iñárritu, c'est d'abord une prouesse technique et un parti pris de mise en scène vertigineux: tout le film donne l'impression d'un long plan-séquence de deux heures, sans aucune coupure. Bien sûr il n'en est rien, mais les jointures sont invisibles et les vrais plans-séquences, même s'ils ne durent pas deux heures, existent.

Voilà pour la forme. Pour le fond, Birdman est une description acerbe, moqueuse, mais quelque part émue du monde du showbiz américain, théâtre et cinéma réunis. L'histoire raconte le comeback d'un acteur has-been qui fut autrefois une star de blockbusters à Hollywood et essaye de se refaire une gloire et une légitimité en montant et en interprétant une pièce intello à Broadway.

À l’époque où il incarnait Birdman, un célèbre super-héros en costume d'aigle volant dans les airs, Riggan Thomson (Michael Keaton) était mondialement connu. Il en a fait un, puis deux, puis trois. Puis en a eu marre, un jour, et a refusé le quatrième.

Après la gloire, ce fut la traversée du désert. Bien des années plus tard, Riggan essaye de revenir au premier plan. Mais avec, cette fois, des ambitions plus artistiques. Il essaye de monter et d'interpréter une pièce à Broadway, adapté de la nouvelle de Raymond Carver Parlez-moi d'amour. Il y est question d'amour bien sûr, mais de reconnaissance des autres, de l'image que l'on donne et de celle que l'on a de soi-même, de modestie devant la vie (un peu) et d'ego dans une carrière artistique (beaucoup). Toutes ces questions qui habitent Riggan depuis des années.

A quelques jours de la première de la pièce, les embûches s'accumulent pour Riggan. Et les personnes autour de lui lui compliquent plutôt la tâche: sa femme, qui débarque sans prévenir; sa maîtresse, qui lui fait croire qu'elle est enceinte; sa fille (Emma Stone), fraîchement sortie de désintoxication, qui est aussi son assistante; l'actrice principale de sa pièce (Naomie Watts), angoissée à l'idée de faire ses débuts à Broadway; l'acteur principal (Edward Norton), appelé au dernier moment, sûr de lui et méprisant pour le reste de la troupe; le producteur de la pièce et meilleur ami de Riggan (Zach Galifianakis), qui le soutient mais lui met la pression. Et cette petite voix dans la tête de Riggan, son surmoi, son ange gardien/petit diable, qui le tourmente...

"Je pense que ce qui définit Riggan, ce sont ses contradictions. Il a l’impression d’être le roi du monde l’espace d’un instant, et quelques secondes plus tard d’être au fond du trou. Dans une même scène, il traverse toute une gamme d’émotions", explique Michael Keaton, 63 ans, qui a beaucoup de points communs avec son personnage: après Beetlejuice (1988) et les deux premiers Batman de Tim Burton (1989 et 1992), il a refusé de faire le troisième et a connu ensuite plus de bas que de hauts dans une carrière en dents de scie, depuis une dizaine d'années.

Comme dans la pièce jouée dans le film, il est question dans le film de reconnaissance des autres face à l'idée qu'on se fait de soi-même, à la fois dans la vie privée et dans la vie professionnelle, en amour comme au cinéma. Il est question aussi de la création artistique face à l'industrie du spectacle, des oeuvres d'auteur face aux gros succès publics, de la gloire éphémère et de la cruauté du monde actuel...

Avec une virtuosité exceptionnelle, Alejandro G. Iñárritu oscille entre comédie et drame, entre illusion et réalité, et donne le vertige –parfois même un peu trop– au spectateur dans ce film tourné en grande partie au St. James Theatre à Broadway, en plein cœur de Times Square.

"J’avais envie d’explorer la question de l’ego et l’idée que le succès –qu’il s’agisse d’une réussite financière ou de célébrité– est toujours une illusion. Ça n’est que temporaire. Quand on court après ce que l’on croit désirer en espérant la reconnaissance du public, même si on finit par l’obtenir, on se rend très vite compte que la satisfaction que l’on en retire est passagère", dit le réalisateur mexicain, petit génie d'Hollywood admiré pour ses quatre précédents films: Amours chiennes (2000), 21 grammes (2003), Babel (2006) et Biutiful (2010).

Il est sur le point de terminer son nouveau film, The Revenant, avec Leonardo DiCaprio dans le rôle d'un trappeur laissé pour mort pendant une chasse à l'ours et qui revient se venger de ceux qui l'ont trahi. Il se murmure que le film pourrait être présenté au prochain Festival de Cannes en mai prochain...

(Voir ci-dessous la bande-annonce de "Birdman"):

 

 

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