"Sauvage" : les bas-fonds de la prostitution masculine (critique)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 28 août 2018 - 10:27
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Felix Maritaud Film Sauvage
Crédits
©Pyramide Films
Félix Maritaud interprète le rôle principal de "Sauvage".
©Pyramide Films
CRITIQUE – Présenté à la Semaine de la critique en mai dernier au Festival de Cannes, "Sauvage", qui sort mercredi, raconte le quotidien d'un prostitué homosexuel. Le film, interdit aux moins de 16 ans, rude et éprouvant, avec des scènes réalistes, n'est pas destiné au grand public.

SORTIE CINÉ – Pour la rentrée, ce n'est pas le film que vous irez voir avec votre grand-mère ou vos enfants (il est interdit aux moins de 16 ans). Sauvage, premier film du réalisateur Camille Vidal-Naquet, qui sort sur les écrans ce mercredi 29 août, décrit avec réalisme et âpreté les bas-fonds de la prostitution masculine.

Léo, 22 ans, est gay, prostitué, SDF et drogué. Il vend son corps dans la rue, en lisière d'un bois non loin de la ville. Il a "Rien à foutre" tatoué sous le nombril et semble en effet accepter sa condition, sans penser aux moyens d'en sortir.

Mais il est moins dur que ses copains prostitués. Il embrasse ses clients. Il accepte des choses que d'autres refusent. Il a du mal à se défendre quand on l'agresse. Et il est très fleur bleue, voudrait qu'on l'aime et pense que le grand amour existe.

Quand il fait la connaissance d'Ahd, sur le trottoir, il en tombe amoureux. Mais celui-ci le rejette gentiment, tout en le protégeant. Ahd affirme qu'il n'est pas homosexuel et rêve d'arrêter de se prostituer et de s'en aller loin. Ce qui ne semble pas être le cas de Léo, englué dans son quotidien sordide…

"Ce que propose le film, ce n’est pas de comprendre comment ou pourquoi Léo est arrivé là, mais plutôt de vivre avec lui, de partager la fulgurance des instants qu’il traverse", explique le réalisateur. "La volonté n'était pas du tout, pour moi, une volonté d'analyse sociale ou une volonté sociologique".

Le film, présenté à la Semaine de la critique lors du dernier Festival de Cannes, est éprouvant, dérangeant, réaliste, avec des scènes dures comme cette séquence dans laquelle deux clients sadiques tentent de sodomiser Léo avec un plug anal gros comme un chou-fleur. Bagarres violentes, scènes de consommation de crack, séquences sexuelles: ce n'est pas un film grand public, et à aucun moment il ne cherche à séduire –y compris la fin, qui a de la gueule mais est typique du "film d'auteur".

Malgré quelques beaux moments d'émotion, on s'ennuie un peu au fil de scènes pénibles qui traînent en longueur, le scénario est inconsistant et les dialogues insignifiants, jusqu'au moment où l'histoire prend un peu de corps, vers la fin. L'intérêt du film réside dans la description quasi documentaire d'un milieu marginal que Camille Vidal-Naquet, 45 ans, a appris à connaître. "J’ai écrit une première version du scénario et je suis allé à la rencontre des garçons du Bois de Boulogne en rejoignant une association", explique-t-il. "J’avais l’intention de participer seulement à quelques maraudes mais au fil des nuits, j’ai noué des liens très forts et j’y ai finalement passé trois ans, pendant lesquels toutes ces rencontres nourrissaient constamment l’écriture".

Le réalisateur a donc fait appel à pas mal de comédiens non-professionnels, même si les dialogues sont très écrits et qu'aucune place n'a été laissée à l'improvisation. Les "vrais" acteurs interprétant les deux personnages principaux assument avec une belle présence des rôles difficiles: Eric Bernard, qui joue Ahd, et surtout Félix Maritaud, qui mériterait désormais de ne pas rester cantonné aux rôles d'homosexuels (militant gay dans 120 battements par minute l'an dernier, acteur gay dans le récent Un couteau dans le cœur).

Lire la critique – 120 battements par minute: Act Up Story

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