La bande dessinée, une diffusion européenne grâce au marché numérique ?

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La Maison de l'Europe de Paris, édité par la rédaction
Publié le 09 octobre 2017 - 18:21
Mis à jour le 11 octobre 2017 - 11:52
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Les Festival de la BD d'Angoulême en 2015.
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©Pierre Dufour/AFP
La BD représente 7,2% des livres édités sur le territoire francophone européen.
©Pierre Dufour/AFP
Avec 16 millions de lecteurs en France, la bande dessinée, qualifiée aujourd’hui de 9ème art mais longtemps considérée comme un genre mineur, bénéficie désormais d’une large diffusion dans la société française. Qu’en est-il de la bande dessinée dans les autres pays d’Europe?

Si on compilait en une seule liste les bandes dessinées les plus connues de tous les pays européens, on observerait que l’Europe est toujours divisée, avec à l’Ouest une tradition séculaire de la BD (Tintin, Astérix, Spirou,…) et à l’Est une culture de la bande dessinée encore balbutiante, particulièrement censurée sous le régime soviétique.

C’est au milieu des années 20 qu’apparaissent les premières bandes dessinées russes bien que les phylactères soient toujours absents. La censure qui commença en 1917 et se renforça à partir des années 60, avec l’interdiction de la plupart des livres étrangers et la diffusion massive des textes socialistes, n’a probablement pas aidé son développement. Ainsi, jusqu’en janvier 1966, l’URSS ira jusqu’à refuser l’hebdomadaire Vaillant (ancien Pif Gadget) pourtant diffusé par le Parti communiste français. Longtemps, les Russes ont eu du mal à comprendre pourquoi on a transformé de grands classiques de la littérature en parodies imagées, même si cela les rendait accessibles à tous. En effet, dans la tradition culturelle russe, les textes sérieux, "pour adultes", n’ont jamais eu besoin d’illustrations.

Finalement, une impulsion est donnée à la BD lors de la Perestroïka. Certains dessinateurs comme Vladimir Sakov et Sergey Lukyanchikov voient leurs albums publiés dès le début des années 90 et reçoivent des prix à l’étranger. Mais le premier album d’Astérix sera traduit en russe seulement en 2001… Bref, aujourd’hui la route est encore longue mais la bande dessinée en Europe de l’Est se répand.

Aujourd’hui, la BD représente 7,2% des livres édités sur le territoire francophone européen (3,5% en 1983) et constitue le secteur le plus dynamique du marché du livre. En dehors des études européennes qui créent leurs propres paramètres, les comparaisons entre les études des divers pays européens sont difficiles à effectuer car les instituts de recherche des différents pays n’emploient pas les mêmes paramètres pour classer le marché du livre. Cependant, selon le comic-guide, en Allemagne 25% de la population lit au moins une bande dessinée par an. Tandis qu’en Espagne seuls 16% des adolescents déclarent lire des bandes dessinées. Malgré ces situations diverses, les pays européens ne cessent pourtant d’en publier de plus en plus. 

Aujourd’hui, la réforme du droit d’auteur se retrouve au cœur de la politique européenne depuis la présentation en septembre 2016 par la Commission européenne de sa proposition de "directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique".

Cette réforme a son importance concernant la bande dessinée car, si celle-ci est née sur papier et s’y exprime sous de nombreux formats, elle investit également depuis quelques années les supports numériques et se développe sur Internet notamment à travers des blogs d’auteurs.

Au sujet de la réforme, Andrus Ansip, vice-président pour le marché unique numérique de la Commission européenne, a déclaré: "Les Européens veulent disposer d'un accès transfrontière à leur culture dans toute sa richesse et sa diversité. Notre proposition aura pour effet de rendre plus de contenus disponibles et d'adapter les règles européennes sur le droit d'auteur au nouvel environnement numérique. (…) Faute d'un tel marché fonctionnant correctement, nous laisserons échapper un potentiel de créativité, de croissance et d'emploi".

Néanmoins les propositions de la Commission font débat dans le milieu de l’édition, et le texte est encore aujourd’hui amendé par le Parlement européen. C’est l’article 13 qui fait particulièrement polémique: "au lieu d’exiger de l'ayants-droit qu’il prouve qu'il y a eu utilisation illicite de son œuvre, il impose à l'internaute qui a mis en ligne un contenu de prouver, après suppression automatique, que son contenu ne violait pas les droits d'autrui. Ce mécanisme risque de porter gravement atteinte à la liberté d'expression et de création. Les outils de censure automatique sont, par nature, incapables de discerner lors de la réutilisation d'une œuvre s'il s'agit d'une simple copie sans ajout, ou bien d'une parodie, d'une critique ou d'un remix (entre autres possibilités de reprise légitimes et légales d'un extrait d’œuvre protégée). Toute la culture qui repose sur l'utilisation d'autres œuvres pour alimenter la création est donc niée et fortement mise en danger par ce type de mesure. Or, la culture transformative est extrêmement présente dans les nouveaux usages et services qui sont visés par cet article", explique le site internet Numerama.

La diffusion de la bande dessinée à travers les pays européens grâce à un marché numérique unique reste donc en débat. En revanche d’autres initiatives comme la plateforme Europe Comics semblent fonctionner à merveille. Cette vitrine numérique de la bande dessinée regroupe 13 maisons d’éditions et permet la mise à disposition en anglais et sous format numérique des BD. La Commission européenne, a contribué à ce projet à quatre millions d’euros, notamment en couvrant la moitié des frais de traduction des titres. Une autre initiative de la Fondation Friedrich Naumann est un défi lancé à des dessinateurs du monde entier, dans le cadre de son concours international de BD "Animate Europe". 

(Avec la contribution du Centre d’Information Europe Direct de la Maison de l’Europe de Paris)

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