Deux mois après son lancement, Le Média confronté aux critiques et à des départs

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Par Paul AUBRIAT - Paris (AFP)
Publié le 07 mars 2018 - 18:07
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Noêl Mamère au Mans le 2 décembre 2017
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© JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP/Archives
Noêl Mamère au Mans le 2 décembre 2017
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Moins de deux mois après son lancement, la web TV Le Média, créée par des proches de La France insoumise, essuie des critiques en partialité ou brutalité de management, qui entraînent des départs, comme celui de Noël Mamère.

La charge menée par l'ex-député EELV, pourtant soutien de la première heure, a marqué un coup dur supplémentaire pour ce qui entendait être "un nouveau média citoyen".

"On s'est tous fait balader, on a tous été en quelque sorte manipulés", a considéré mardi sur TMC l'ancien candidat à la présidentielle de 2002, estimant avoir été "une caution" de pluralité à un organe de presse selon lui entièrement dévoué à Jean-Luc Mélenchon.

"C'est une télé qui reproduit à l’identique les idées défendues par la France insoumise, en particulier la question de la Syrie", a poursuivi Noël Mamère.

Le leader de LFI lui a répondu par un tweet assassin mercredi après-midi: "Croire que Mamère ait pu être manipulé, ce serait croire qu'il a des convictions stables".

En cause notamment: une chronique de Claude El Khal, présenté comme "correspondant au Liban" du Média, qui expliquait le 23 février, en plateau à Paris, refuser de diffuser des images des massacres perpétrés dans la Ghouta orientale, dans la banlieue de la capitale syrienne, car elles ne seraient, selon lui, "pas vérifiées de manière indépendante".

La polémique qui a suivi, largement relayée sur les réseaux sociaux, avait déjà provoqué la démission d'une des journalistes de la rédaction, Catherine Kirpach (ex-LCI).

D'aucuns craignent désormais que l'hémorragie gagne les effectifs: avant Mme Kirpach, la présentatrice du "JT" quotidien, Aude Rossigneux, avait également quitté la rédaction, cette fois de manière contrainte.

Celle-ci a dénoncé dans une lettre ouverte un "traitement d'une violence et d'une brutalité qui (la) laisse dans un état de sidération". Version aussitôt contestée par la direction du Média, à travers un mail envoyé à ses 18.000 sociétaires, appelés "socios".

Dans ce courrier, les trois fondateurs de la web TV, Sophia Chikirou, ex-communicante chargée des campagnes de Jean-Luc Mélenchon, le psychanalyste Gérard Miller et Henri Poulain, qualifient les accusations de l'ex-présentatrice d'"infâmes" - ils ont reçu le soutien de la rédaction via un tweet.

Le trio dirigeant affirme notamment que, contrairement au "licenciement" évoqué par la journaliste, il a été seulement décidé de mettre un terme au contrat de la présentatrice à l'issue de sa période d'essai.

Mais le syndicat national des journalistes CGT a expliqué dans un communiqué ne pas pouvoir "rester ni insensible, ni muet quand Aude Rossigneux est débarquée" et être "interpellé" quand la journaliste "affirme que le droit du travail n’est pas respecté dans ce média". "Une injure", a répondu Le Média, qui indique avoir notamment "recruté une majorité de journalistes en CDI".

- "Vraiment indépendant" -

Le Média a ses défenseurs, à commencer par les élus LFI, quitte à nourrir les procès en collusion avec le parti de Jean-Luc Mélenchon.

S'il affirme que "Le Média n'est pas le bras armé de la France insoumise", le député du Nord Adrien Quattenens a reconnu que "c'est un média qui, effectivement, sur le fond, a des proximités avec nous".

"Nous avons beaucoup de points d'accord, mais c'est vraiment indépendant", a-t-il encore voulu convaincre.

Dimanche, le député de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière avait mis la critique en parallèle avec "une reprise en main des macronistes sur nombre de médias".

Pour l'historienne et sociologue des médias au CNRS Isabelle Veyrat-Masson, "ce qui est gênant, c'est de faire semblant d'être indépendant de La France Insoumise, d'être un journal comme les autres, alors que ce n'est pas le cas et qu'on s'en est aperçu assez rapidement".

La semaine dernière, outre Noël Mamère, une dizaine de soutiens historiques du site, dont l'ancienne ministre PS de la Culture Aurélie Filippetti, l'urgentiste Patrick Pelloux, les comédiens Judith Chemla et François Morel, ou les journalistes Cécile Amar (L’Obs) et Édouard Perrin (Cash investigation), ont indiqué regretter avoir signé en septembre le manifeste qui appelait à la création du Média. Selon eux, il "ne répond plus à la promesse initiale, ni sur le fond ni sur la forme".

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