Les importations améliorent le pouvoir d'achat... et détruisent surtout les emplois

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Jean-Yves Archer, édité par la rédaction
Publié le 20 avril 2018 - 17:29
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Dans une usine du groupe sud-coréen Yura à Raca en Serbie, le 25 août 2017
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© Nebojsa Raus / AFP
Les importations à bas coût ont un effet positif sur le pouvoir d'achat... moins sur l'emploi.
© Nebojsa Raus / AFP
Une étude de la Banque de France a souligné l'impact positif pour le pouvoir d'achat de la hausse des importations. Mais il ne faut pas faire impasse sur l'impact en termes d'emploi et de changement du tissu productif français dont une partie des résultats est aussi quantifiable, analyse Jean-Yves Archer, spécialiste des finances publiques et dirigeant du cabinet Archer, pour "France-Soir"

Le déficit de notre balance commerciale est un vrai sujet: il est passé de 48 milliards d'euros en 2016 à 63 milliards en 2017. Autrement dit, la reprise de notre économie et la bonne tenue de la croissance en 2017 ont induit une relance de nos importations. Pour résumer, sans caricaturer, la France est de plus en plus un pays d'assemblage plutôt que de production et consommant par ailleurs majoritairement les produits qu'elle transforme. Ceux-ci (comme l'exemple marquant de l'automobile) incorporent de plus de plus d'intrants importés.

A cette vision macroéconomique tendue, il faut toutefois adjoindre une intéressante étude de la Banque de France (voir ici) intitulée: "Importations des pays à bas salaire: quels gains pour les ménages?"

Ce questionnement est légitime et la réponse instructive: "La part des importations des pays à bas salaire dans la consommation des ménages français a triplé de 1994 à 2014. Moins chères, ces importations ont exercé des pressions à la baisse sur l’inflation en France de 0,17 point par an en moyenne. Cet effet direct des importations depuis 1994 représenterait un gain d’environ 1.000 euros sur la consommation moyenne par ménage en 2014". Mille euros par ménage, voilà bien une conclusion chiffrée qui rejoint notre perception intuitive sur la baisse des prix qui traverse bien des secteurs. Un écran plat de 1995 valait une petite fortune en comparaison de son prix courant actuel.

Voir aussi: Habillement: moins d'importations "made in China" en France en 2017, au profit du reste de l'Asie (étude)

Nous serions donc face à une mondialisation heureuse. Le débat n'est pas si simple. D'abord, il n'est pas interdit de penser aux conditions de vie des ouvriers des pays à bas coûts. Puis, il faut garder à l'esprit que ces produits importés coûtent en moyenne 40% de moins que s'ils devaient être fabriqués en France. En clair, nous ne pouvons plus prétendre à la compétitivité face aux dragons asiatiques, Chine en tête. Or ceci concerne de nombreux produits de la vie courante: de l'équipement de nos cuisines en passant par nos divers objets connectés. Et la liste de nos fournisseurs "imbattables" s'allonge: on y compte désormais plusieurs pays d'Europe de l'Est (voir la délocalisation de Whirpool Amiens vers la Pologne) mais aussi le Mexique et le Brésil.

Cette étude de la Banque de France comporte toutefois une lacune, elle ne cherche pas à approcher la notion de destruction d'emplois hexagonaux: "Ne sont toutefois pas pris en compte ici les effets indirects de l’ouverture au commerce international sur le pouvoir d’achat, via les salaires et l’emploi". La COFACE avait avancé dans une note de 2016 le chiffre de 460.000 emplois détruits sur la période 2002–2010 et essentiellement des postes peu qualifiés.

Le gain pour le consommateur de 1.000 euros par ménage est donc à rapprocher impérativement de ce chiffre, imposant, de disparitions d'emplois pour notre économie.

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