Déclaration nutritionnelle en Europe : une avancée qui en appelle d’autres
En janvier 2013, le scandale de la viande de cheval retrouvée dans des lasagnes "pur bœuf" éclatait. Depuis, les institutions européennes ont décidé d’agir afin de permettre aux Européens de bénéficier de plus de transparence sur les denrées alimentaires achetées. Cette volonté s’est traduite le 13 décembre 2014 par un règlement, dit INCO, obligeant à la mise en place d’un étiquetage précis pour les aliments élaborés en Europe. Deux ans après, ce sont les mentions nutritionnelles qui deviennent obligatoires. La question de la transparence sur ce que l’on mange suscite un véritable débat que ce soit entre les institutions européennes, les États membres ou les industries agroalimentaires.
Avant cela, qu’apportait en 2014 le règlement sur l’étiquetage alimentaire? Tout d’abord, il obligeait les industriels à mentionner de façon plus visible (1,2 mm pour les emballages standards à 0,9 mm pour les plus petits) la liste des ingrédients qui composent le produit, mais aussi à mettre un avertissement pour les substances allergènes et les intolérances (lait, arachides, poisson, etc.). Il demandait aussi de mentionner le pays d’origine ou, plus précisément, le lieu de provenance pour les viandes crues qu’elles soient fraîches ou surgelées. Pour autant, les viandes transformées (présentes dans les plats surgelés par exemple) ne sont pas soumises à cette traçabilité. En somme, les obligations de 2014 apportaient de véritables avancées pour les consommateurs même si elles restaient largement perfectibles comme le souligne l’analyse de l’association Foodwatch.
A partir du 13 décembre 2016, ce sera au tour de la déclaration nutritionnelle de devenir obligatoire. Elle répond à un enjeu crucial: enrayer la montée de l’obésité en Europe car les prévisions sont catastrophiques (60% de la population pourrait être obèse en 2050) et la situation actuelle est déjà inquiétante. En effet, selon une enquête réalisée par Eurostat en 2014, plus de la moitié des adultes étaient en surcharge pondérale (51,6%) dont 35,7% de pré-obèses et 15,9% d’obèses. Ainsi, cette déclaration nutritionnelle devrait permettre de connaître la valeur énergétique dans un tableau lisible. Celui-ci, et c’est déjà le cas sur de nombreux emballages, peut être comparé, notamment en pourcentage, avec les repères nutritionnels journaliers.
Pourtant, s’il est indéniable que ces informations donnent un premier éclairage au consommateur, cette avalanche de chiffres et de pourcentages aurait tendance à le perdre. C’est ce que critiquent près d’une centaine de députés européens qui souhaiteraient mettre en place un système de code couleur comme celui utilisé au Royaume-Uni depuis juin 2013. Lors d’une question posée à la Commission européenne en août dernier, ils soulignent notamment que: "si, globalement, les produits qui ne sont pas étiquetés selon ce code couleur ont connu une augmentation du volume des ventes, celles-ci baissent (…) pour ces mêmes denrées si ces dernières sont estampillées d'une étiquette jaune ou, surtout, d'une rouge".
Pour l’instant, si la Commission reste muette, les États, eux, commencent à proposer de nouvelles solutions. C’est le cas en France. Suite à la modification de la loi santé le 26 janvier 2016, un nouvel étiquetage nutritionnel doit être mis en place. Depuis le 26 septembre, quatre codes couleur sont testés dans plusieurs grandes surfaces afin de définir lequel est le meilleur. Ils ont été élaborés par des acteurs aux intérêts différents: la grande distribution, l’INSERM pour le ministère de la Santé et l’industrie agro-alimentaire. A ceux-là, il faut ajouter celui utilisé par le Royaume-Uni. Par ailleurs, une autre initiative en France permettra à partir de janvier 2017 de donner l’origine des viandes transformées et du lait dans les plats surgelés, des denrées qui ne sont pas dans le règlement INCO.
Ces mesures soulignent les lacunes de l’étiquetage alimentaire en Europe. Au Parlement européen, les initiatives sont nombreuses pour faire bouger les lignes. On peut en citer deux récentes. La première lancée notamment par l’eurodéputée Michèle Rivasi (Verts/ALE) vise à renforcer la traçabilité de l’origine des viandes transformées et du lait, tandis que la seconde inspirée du Danemark veut limiter les taux d’acides gras. Si la première est au point mort, la seconde devrait être étudiée par la Commission européenne qui, d’ailleurs, proposera de nouvelles mesures au plus tard le 13 décembre 2017. Preuve qu’il reste encore du chemin à parcourir pour manger sainement en Europe.
(Avec la contribution de la Maison de l'Europe de Paris)
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