Éducation nationale : l'envers du décor

Auteur(s)
Xavier Azalbert, France-Soir
Publié le 29 avril 2023 - 12:00
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Mammouth
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Photo de April Pethybridge sur Unsplash.com
Mammouth au musée de Syndey, Australie.
Photo de April Pethybridge sur Unsplash.com

ÉDITO - Incroyable mais vrai ! Savez-vous quelle est l’une des plus grandes administrations au monde après, entre autres organisations militaires étatiques, l'armée chinoise ? 

L'Éducation nationale française. 

En effet, notre chère, très chère, nettement trop chère, Éducation nationale, compte (tenez-vous bien) non moins de 1.418.744 personnes. Un chiffre qui rivalise avec les effectifs des forces armées américaines. 

Et si je dis qu'elle nous coûte éminemment trop cher, c'est qu'au sein de ce million quatre cent dix-huit mille sept cent quarante-quatre d’employés (en toutes lettres c'est encore plus impressionnant), il y a 512.087 personnels "administratifs" (hors restauration et services annexes, bien sûr).  

À savoir des personnes qui, pour la plupart - pour ne pas dire "dans leur très grande majorité", j'y reviens tout de suite - sont autant utiles à la construction intellectuelle et civique de "nos jolies petites têtes blondes" (et brunes, châtains ou rousses d’ailleurs), qu'un peigne (même à 512.087 dents) est indispensable à la coiffure d'un chauve. 

En outre, et c'est ce qui est le plus intolérable, puisqu'on sombre là dans une forme de surréalisme : une commission parlementaire vient de mettre à jour que sur ces 512.087 salariés de l'Éducation nationale, 37.664 apparaissent uniquement dans la colonne "dépenses de personnels". 

Autrement dit, ils n'apparaissent aucunement dans une des colonnes répertoriant les différentes fonctions officielles exercées par les employés de l'Éducation nationale, où figurent dûment tous les autres. 

Si tant est que ces 512.087 personnes existent véritablement... qui donc sait avec précision ce que ces personnes font au sein de l'Éducation nationale ?  

Donc, opacité délibérée ou pas, dès lors que chaque mois un virement est adressé à chacune de ces 37.664 personnes sur les deniers publics, le contribuable est en droit de se poser les deux questions suivantes : 

S'agit-il là d'autant d'emplois fictifs ? Des parasites intrinsèques à "la République des copains" que François Mitterrand a institutionnalisée, et aux largesses qui ont été accentuées sans cesse ensuite (en nombre de bénéficiaires et en montant) par ses successeurs à l'Élysée ? 

Ou sont-ce là des sortes d'agents électoraux, c'est-à-dire des privilégiés grassement rémunérés à ne rien faire, en échange de quoi ces personnes donnent systématiquement, dans l'urne, leurs voix à la main qui les nourrit, ceci tant lors des échéances électorales politiques que lors des élections internes ? 

Le contribuable, affligé par ces dépenses floues auxquelles s’ajoutent les salaires des pléthores de personnels administratifs (bel et bien existants quant à eux hélas) et 30.000... “détachés”, c’est à dire 30.000 personnes qui n’ont jamais enseigné, peut aussi penser à cette citation de Michel Rocard : 

"En matière de grande catastrophe publique, toujours privilégier la connerie au complot. La connerie est à la portée de tous, c'est donc assez largement répandu. Le complot nécessite beaucoup d'intelligence et d'organisation, c'est très rare." 

En somme, les citoyens pourraient s’interroger sur cette “grande catastrophe publique”. D’ailleurs, quel est le coût du mammouth ? 

100 milliards d'euros par an*. 

Reprenons la calculette. Car comme d’habitude, et quel que soit le sujet, le contribuable est meilleur gestionnaire de ses deniers que de l’État.  

100 milliards d’euros, c'est d’abord 50 fois plus que les deux milliards par an qu'Emmanuel Macron vient de donner aux enseignants dans le cadre de sa réforme pour “sauver l’Éducation nationale”. Soit un pourboire de 100 à 230 euros d'augmentation par mois pour les enseignants, au vu de l'inflation galopante.

C'est ensuite le prix de 52 porte-avions nucléaires de 36.000 tonnes (avec hélice en état de marche). Le choix provocateur de cette comparaison ne tient pas du hasard : avec l’équivalent d’une telle force de frappe, a-t-on gagné la bataille contre l’ignorance et le désœuvrement ou contre l’illettrisme ? A-t-on vraiment gagné la plus importante des batailles, celle de former des citoyens libres et capable de penser par eux-mêmes ? 

Lire quelques chiffres nous fait obtenir des réponses.  

De l'aveu même du ministère, chaque année, sur 726.000 jeunes qui quittent le système, 439.000 n'ont “aucune réelle formation”. Notons au passage cette donnée étonnante : il y a aujourd'hui 459.600 élèves de moins qu'en 1991, mais 247.000 enseignants de plus. 

Par ailleurs, il y a aujourd'hui 236.583 étudiants en “Sciences humaines et sociales”. Chacun coûte 48.000 euros par an à la collectivité. Or, tout le monde sait très bien qu'il a qu'une poignée de postes à pourvoir dans ce secteur : 5.000 par an pour l'estimation basse, 10.000 au grand maximum pour l'estimation haute. Que deviennent les autres ? N’est-il pas imaginable d’utiliser ces fonds vers des formations qui ne seraient en rien moins intéressantes ou moins intellectuelles mais qui proposeraient des débouchés plus épanouissants que d'attendre des postes inexistants ? 

Enfin, rappelons que l'OCDE a classé la France très loin derrière les autres nations occidentales, bonne dernière au regard du fait que notre pays compte seulement 60% de lettrés (capacité à lire, comprendre et résumer en cinq lignes un texte simple de 20 lignes), et donc 40% d'illettrés. 

Perdre la bataille de l’illettrisme, c’est comme perdre une guerre. 

*En 2022, le budget de l'Education nationale pointait officiellement à plus de 77 milliards d'euros. Estimons ici l'ensemble des dépenses, par exemple avec l'ensemble des crédits dédiés au sport et le coût à venir des promesses de la Macronie. 

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