Chronique N°42 – « Du couvre-feu renforcé, au reconfinement assoupli : mauvaise foi, conflits d’intérêts et manque de discernement » 2ème partie

Auteur(s)
François Pesty pour FranceSoir
Publié le 08 décembre 2020 - 10:49
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Chronique 42
Crédits
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Emmanuel Macron
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Le 3 décembre 2020, Jean Castex entamait sa conférence de presse sur « La stratégie vaccinale et la lutte contre la covid-19 » par ces mots « pour vous présenter, épauler par plusieurs membres du gouvernement, la stratégie vaccinale adoptée par la France. Un mot au préalable sur la situation sanitaire de notre pays, qui s’améliore progressivement [1]. La circulation du virus continue de reculer, de semaines en semaines. Le nombre de cas positifs diminue et nous pourrions dans les jours à venir passer la barre des 10.000 cas quotidiens, en moyenne. En conséquence, la pression sur les hôpitaux s’allège progressivement. Nous comptions hier soir 3.488 personnes hospitalisées en réanimation. Et je veux inlassablement redire ma vive reconnaissance à nos professionnels de santé. La France, est aujourd’hui le pays d’Europe où la baisse de la pression épidémique a été la plus forte et la plus rapide [2] ».

 

[1] On ne peut plus être imprécis ! Evidemment, s’il avait dit que le virus est en train de partir, peut-être définitivement d’ailleurs, s’était tuer dans l’œuf la campagne vaccinale et la poule aux œufs d’or pour Pfizer, BioNtech et autres Moderna… Adieu veaux, vaches, cochons…

 

[2] Inexact. Le nombre de nouveaux cas positifs par millions d’habitants est plus faible qu’en France : en Espagne, Finlande, Norvège, Irlande. Et puis, ce comparatif à peu d’intérêt, au-delà du fait qu’il n’est pas du tout « fairplay », car de très nombreux pays, à l’Est et au Nord de l’Europe, subissent une reprise épidémique plus tardivement qu’en France. L’incidence redescendra aussi dans ces pays, et ce ne sont pas ces mesures stupides d’enfermement qui vont dicter un tant soit peu la conduite du virus. Rien ne sert de courir vite, il faut partir à point. Cette fable ne s’applique pas qu’au lièvre et à la tortue, mais paradoxalement, sa morale est inversée avec un coronavirus beaucoup plus céleste que les technocrates qui nous gouvernent…

 

(*) Moyenne glissante des 3 derniers jours en date du 3 décembre 2020

(**) Les 9.000 décès survenus à domicile qui avaient été estimés par MG France fin avril ont été bien entendu ajoutés aux chiffres « officiels » qui n’en tiennent pas compte…

La France a une surmortalité par million d’habitants de 36% en comparaison à la Suède !

L’actualisation de mes courbes de décès covid à l’hôpital à la date du 6 décembre, montre que nous enregistrons désormais en France, et ce décompte est loin d’être terminé, 5 fois plus de décès après le pic d’avril, qu’avant. Il est bien évident que les décès à déplorer lors de la reprise automnale de la pandémie sont la conséquence directe des enfermements du printemps et des interdictions de déplacement inter-régionaux qui avait prévalu à l’époque ! Le pic n’est pas monté aussi haut, l’exécutif et ses conseillers se sont aussi plantés là-dessus. Mais il risque fort d’être plus large…

 

De la même façon, nous avons comptabilisé en France 5,6 fois plus de journées d’hospitalisation en réanimation pour covid-19 après le pic d’avril qu’avant… On n’est pas non plus monté plus haut, mais il est évident que nous redescendons beaucoup plus lentement qu’au printemps…

 

 

De même, nous avons enregistré en France 6,2 fois plus de journées d’hospitalisation tous services pour covid-19 après le pic d’avril qu’avant… On est ici monté plus haut et peut-être que la descente sera plus lente (à suivre)

Le Premier Ministre a l’audace de poursuivre son propos de la manière suivante « C’est le fruit des efforts de chacune et chacun d’entre vous qui avez respecté les règles sanitaires et je tiens à nouveau à vous en remercier. C’est aussi le résultat de notre stratégie de freinage avec le couvre-feu d’abord puis le (re)confinement. Ces mesures ont été, je le sais bien, dures pour nombre d’entre vous. Mais, elles étaient nécessaires et restent encore nécessaires ».

 

Quelle mauvaise foi, comment affirmer une telle chose alors que le virus ne les a pas attendu pour prendre la « poudre d’escampette » ! A-t-il une région, un département, un canton, une ville de comparaison dans laquelle ou lequel ni le couvre-feu, ni le reconfinement n’aurait été mis en œuvre ? Non, il n’en a pas ! Donc scientifiquement, cela ne tient pas !

 

 

Emmanuel Macron, lui-même, n’a-t-il pas reconnu que ces mesures « indispensables » étaient insuffisantes ?

De plus, et nous l’avions signalé dans la 1ère partie de cette chronique (ici), puisse que le Chef de l’Etat s’était payé le même culot d’attribuer aux efforts des français l’évitement des sombres prévisions de l’Institut Pasteur, le pic de la reprise épidémique, conséquence des mesures mises en place au printemps, s’est produit le 2 novembre, soient seulement 4 jours après le début du reconfinement « light ».

Le Premier Ministre poursuit « Car la situation reste fragile. Le niveau de circulation du virus et le nombre de personnes en réanimation restent ainsi supérieurs à ce qu’ils étaient en mai dernier, lorsque nous avons déconfiné ». Nous ne sommes pas encore venus à bout de ce virus et nous devons rester mobilisés ».

 

Puis, il annonce ce qui aurait pu être une bonne nouvelle pour des millions de françaises et de français :

 

« Dès demain, les lieux de culte à la suite de la décision du Conseil d’État et des discussions fructueuses que le ministre de l’intérieur et moi-même avons conduites avec leurs représentants, pourront accueillir les fidèles avec une règle d’un siège sur trois et d’une rangée sur deux ».

Cela signifie que les églises, cathédrales ou chapelles, ne pourront se remplir au-delà d’un sixième de leurs capacités. Ce n’est pas exactement ce qu’elles pensaient pouvoir obtenir.

 

En effet, la saisine du Conseil d’État par l’épiscopat est une situation totalement inédite.

 

Le 30 novembre sur France Info, l’émission culte « Les informés », débattait précisément de ce sujet : Marc Fauvelle « Bienvenue à vous si vous nous rejoignez sur France Info, radio et télé réunies comme chaque jour pour les informés (Une émission à retrouver intégralement : ici). Les voici, nos informés du jour. Carole Barjon de l’Obs, Delphine Gotchaux, Chef du service « Police – Justice » de France Info, et Jean-Jérôme Bertolus, votre homologue du service « Politique » de France Info, bonjour. Les jauges dans les églises, 30 fidèles par messe dans les offices religieux, est-ce suffisant ? Le Conseil d’État a estimé que non. Et une question ce matin, Renaud Dély, la messe est-elle dite pour les offices religieux ? Eh oui, par ce que le gouvernement a donc reçu un camouflet juridique hier. Le Conseil d’État a cassé la limite maximale de 30 fidèles par messe. Cette limite qui avait été fixée par le gouvernement. Le juge des référés y a vu, je cite, une atteinte grave et manifestement, illégale à la liberté de culte. Résultat, Jean Castex, le Premier Ministre, a reçu hier en fin de journée à Matignon, des évêques justement pour discuter, négocier avec eux une jauge acceptable. Je vous propose d’écouter ce que disait à la sortie de cette réunion, Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort, qui est le Président de la Conférence des Évêques de France.

 

Msg E MB « Nous restons dans un temps d’épidémie encore assez fort, par conséquent, il n’est pas encore question d’accepter dans les églises sans précaution et sans limitation de personnes. Nous avons abordé ce sujet et la question de la proportionnalité est effectivement la bonne solution ».

 

Renaud Dély « Huit mètres carrés dans les commerces, mais pas plus de 30 personnes dans les églises ou même dans les cathédrales, Carole Barjon, est-ce que vous avez compris le protocole sanitaire ? »

 

Carole Barjon « Euh, là-dessus, non et effectivement on peut comprendre que l’église catholique se soit, comment dire, émue de cette décision, qui semblait effectivement, pas très cohérente par rapport au reste, par rapport aux commerces, etc… Moi, je pense que cette affaire. Enfin, on est à un tournant quand même, je pense dans les relations entre l’église catholique et le pouvoir, ou les pouvoirs, d’ailleurs. Par ce que c’est quand même la première fois que la conférence des évêques a des propos, comment dire, très fermes, et un peu, se rebiffe quoi, on va dire. Ce qui est assez rare. Pourquoi, par ce que, au fond, l’église catholique a quand même eu le sentiment depuis assez longtemps d’être un peu, le bon élève de la république. En tous cas, c’est ce qu’ils ressentent. Je vous rappelle qu’à Saint Etienne du Rouvray quand il y avait eu l’assassinat, enfin l’égorgement du père Hamel, qui avait suscité une grande émotion. L’église catholique, enfin la hiérarchie avait été extrêmement prudente, n’avait pas appelé à de grandes marches silencieuses ou etc… Même la messe en hommage, qui avait eu lieu, n’avait pas été annoncée officiellement. Ça s’était su par les réseaux des pratiquants. Donc, ils ont eu le sentiment de ne jamais mettre d’huile sur le feu et je pense que c’est ce qui explique leur réaction assez ferme et le fait qu’ils aient déposé un recours au Conseil d’État, qu’ils ont gagné.

 

Renaud Dély « Jean-Jérôme Bertolus, même question »

 

JJB « Oui, tout à fait, pour aller dans le sens de Carole Barjon, c’est très rare, c’est même exceptionnel que l’église dépose un recours contre l’État. Jusqu’à présent les rapports de l’église et du pouvoir étaient plutôt bons. Là, il s’est passé quelque chose et qui est vraiment étrange, que je ne m’explique pas. Comment le Président de la République peut mardi donner cette jauge un peu surréaliste effectivement, 30 personnes quelle que soit la dimension du lieu… »

 

Marc Fauvelle « Je vais tenter de répondre à votre question, François Bayrou, le Président du Modem, a eu une explication qui nous a étonné, vendredi dernier, ici-même, lorsqu’on l’a interrogé sur cette jauge. Il nous a dit que l’exécutif s’était trompé, en l’occurrence Emmanuel Macron, qu’il avait confondu 30 fidèles et 30 pourcents de la capacité maximale. Et on l’a cru, on a cru que dans l’après-midi le chiffre allait être rectifié, ça n’a pas été le cas ».

 

JJB « Voilà, eh ben non, c’est ça qui est d’autant plus étrange. Peut-être que le Président a mal lu, peut-être qu’effectivement un fonctionnaire, un haut fonctionnaire lui a transmis une mauvaise note, au lieu de 30 pourcents, 30 personnes. Mais, le problème c’est que 48 heures après, Jean Castex enfonce le clou, ne revient pas sur cette jauge, alors même que le Président de la République s’est entretenu avec effectivement, eh bien, le patron de l’épiscopat. Donc, vraiment, c’est très étrange et un tout dernier mot, et vous allez bondir. Ce qui explique que dans la majorité surtout, il faut tenir sur l’article 24 (du projet de Loi de sécurité global), par ce que le reste, on fait preuve d’autorité, mais il y a une déliquescence en ce moment qui inquiète au sein même de la majorité ».

 

Marc Fauvelle « Tous les chemins mènent à l’article 24. Renaud Dély ? »

 

RD « Il y a des dysfonctionnement manifestes au sein de l’exécutif et du gouvernement, c’est clair, y compris sur l’article 24 et les questions de sécurité d’ailleurs. Mais, sur cette erreur du chef de l’État, qui effectivement a été renouvelé par le Premier Ministre peu après, je crois qu’on touche, au-delà même du cas de l’église catholique à un problème de fond, qui est celui auquel se heurte ce pouvoir depuis le début de la crise sanitaire. C’est, jusqu’où les conditions sanitaires, même si elles sont déformées, exagérées, mal comprises, hein peut-être en l’occurrence, doivent dicter la politique, les choix du gouvernement. C’est-à-dire qu’on voit bien que les impératifs sanitaires, qui encore une fois peuvent être démultipliés ou excessifs, mal compris, semblent parfois s’imposer de façon quasi-pavloviennes pour le coup, de façon quasi-automatiques, à des décisions politiques, avant même que ces décisions politiques soient réfléchies. Et donc, ça explique, me semble-t-il aussi, l’oukaze du Chef de l’État annonçant 30 fidèles par messe. Alors, peut-être qu’il s’est trompé avec 30 pourcents, mais au-delà de ça, il a dû lire ça, ou on a dû lui souffler ça sur une note etc… On voit bien que le poids du Conseil Scientifique, le poids d’un certain nombre d’avis médicaux depuis le début de cette crise sanitaire, avis médicaux qui d’ailleurs de surcroit, des avis scientifiques qui ont été souvent contradictoires, divisés, etc…, pèsent lourdement sur la moindre décision politique, et je pense que ça participe largement de cette erreur, qui effectivement touche en plus l’église catholique, et Carole Barjot a raison de le souligner, traumatisée elle aussi par le contexte terroriste, il y a eu effectivement Saint-Etienne du Rouvray et plus près de nous il y a eu l’attentat de Nice, il y a quelques semaines. Et c’est vrai que ce traumatisme-là, de toute une frange des fidèles catholiques, peut être que les pouvoir publics ont du mal à le percevoir ».

 

Marc Fauvelle « Le mot de la fin, Carole Barjon ? »

 

CB « Juste pour rebondir sur ce que disait Renaud Dély, il y a peut-être un trop grand poids des conseillers sanitaires ou des préoccupations sanitaires. Moi, ce que je note aussi, c’est l’absence des conseillers, enfin, de la politique. Ne pas voir, par ce qu’il y avait encore une majorité, une petite majorité on va dire, dans ce pays, de catholiques, ne pas voir que, là, c’était vraiment un, comment dire, un casus belli, c’est tout à fait inquiétant ».

 

Renaud Dély « On voit que le Conseil d’État a tranché, et que la Loi civile est au-dessus de la Loi de Dieu »

 

Un peu plus tard, ce 30 novembre, sur la même radio (A 7:36 de l’enregistrement ici), lors d’un « fil Info » :

 

Journaliste « La jauge dans les églises, n’est toujours pas fixée. Le Conseil d’État a tapé sur les doigts du gouvernement, pour qu’il annule la limite de 30 personnes par office. La règle des 8 mètres carrés par fidèle sera-t-elle appliquée comme dans les commerces ? Hier, le Premier Ministre a rencontré le Président de la conférence des évêques de France, Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort. C’est lui qui a déposé le recours devant les sages et il salue une réunion constructive »

 

Msg E MB « Le Premier Ministre a été « fairplay » je dirais, par rapport à l’arrêt du Conseil d’État, qui clarifie un petit peu les termes. C’est-à-dire qu’il faut arrêter de prendre des mesures qui sont disproportionnées et qui finissent par être illégales. Nous restons dans un temps d’épidémie encore assez fort, par conséquent il faut, il n’est pas encore question d’accueillir dans les églises sans précautions et sans limitations de personnes. En tous cas nous avons abordé ce sujet et la question de la proportionnalité est effectivement la bonne solution [3] ». 

 

Journaliste « Et le gouvernement a encore 48 heures pour revoir sa copie

 

[3] Il faut dire que la veille, interviewé sur France Info (quel dommage, je n’ai pu récupérer le fichier audio. Il faut savoir que vous avez jusqu’à minuit pour enregistrer un replay sur France Info, et qu’après, c’est foutu !), le patron de l’épiscopat avait été bien plus pugnace, n’hésitant pas à parler d’absurdité à propos de ces 30 fidèles par office. Il citait une cathédrale de son diocèse avec quelque chose comme 1.250 places, et qu’il aurait fallu dire 35 fois la messe pour que tous les fidèles puissent être accueillis dans la maison de Dieu… Il avait également argumenté qu’aucun cluster n’avait été identifié dans une église et expliqué que les discussions avec les services du Premier Ministre avaient été engagées depuis une bonne dizaine de jours, et que des critères tels qu’un tiers ou 30% de la capacité des lieux de culte paraissaient tenir la corde. Ses espoirs ont été douchés lors de l’annonce de Jean Castex qui avait précédé la présentation de la « Stratégie vaccinale » à l’occasion de sa conférence de presse du 3 décembre (voir plus haut)

 

Mais, bon, notre têtu Premier Ministre, arcbouté sur le sacro-saint principe de précaution, a fini par trancher : un siège sur trois et une rangée sur deux, faites le calcul, cela fait un tout petit 16,7% de la capacité des églises. Pauvres fidèles…

 

Bon à savoir, il n’y a pas que le virus qui sache s’adapter à toutes ces décisions administratives à l’efficacité non prouvée et jusqu’ici très contre-productives. Les françaises et les français aussi. Un sondage Odoxa pour France Info, portant sur le (re)confinement d’automne et nos compatriotes, montre que :

- Un français sur dix a quitté sa résidence principale, soit un million de plus qu’au printemps. Et c’est surtout dans les grandes villes qu’on a plié bagages

- Les étudiants sont deux fois plus nombreux à être rentrés chez leurs parents

- Les français ont aussi boudé le télétravail, 9% seulement à temps plein. C’est deux fois moins qu’au premier confinement

 - Logiquement, le nombre de sorties a augmenté. 7 par semaine en moyenne, presque le triple par rapport au printemps

 

Un confinement plus souple et pourtant plus pénible à supporter. Il y a moins de stress certes, mais 16% des français parlent d’un climat familial détérioré. C’est en hausse. Près d’un jeune sur deux se dit déprimé

 

Les français restent très critiques à l’égard du gouvernement. Près des deux tiers ne le trouvent pas à la hauteur…

 

(Un reportage à retrouver à 8:34 de l’enregistrement audio : ici)

 

Sur France Info, le 30 novembre « Les stations de ski, elles, maintiennent la pression sur Matignon. Le Premier Ministre s’entretient avec les élus locaux et professionnels des domaines skiables. Ils demandent une réouverture pour les fêtes de fin d’année. France Info, soyez les bienvenus si vous nous rejoignez, il est dix-heures et demi. L’info, Mélanie Delaunay « Les élus des professionnels de la montagne ont rendez-vous avec Jean Castex ce matin. Ils veulent toujours essayer de faire changer d’avis le gouvernement qui a décrété que les stations de skis pourraient ouvrir pour les vacances, mais pas les remontées mécaniques [4] ». Un fil info à retrouver en totalité : ici

 

[4] Quoi de plus imbécile que d’interdire les sports d’hiver. Franchement, quoi de plus sain pour prendre un grand bol d’air ? En plus, c’est comme le vélo, il y a naturellement une bonne distanciation physique qui se met en place entre les skieurs. Ceux-ci, sont emmitouflés dans une épaisse combinaison de ski, gantés, chaussés de chaussures de ski ou d’après-ski, se déplacent dans de vastes domaines. La distanciation reste importante que l’on soit sur un tire-fesse ou un télésiège. A priori, une télécabine ne doit pas être pire qu’une rame de métro bondée… Où est le problème ?

 

Journaliste « Le brief éco sur France Info (A retrouver en entier à 0:32 de l’audio : ici), bonjour Emmanuel Cuny. Près de 4.000 personnes au chômage partiel, chez les salariés de la compagnie des Alpes. Cette société qui gère les stations de ski, certains parcs de loisir en France. C’est le PDG de cette entreprise qui fait cette annonce, alors qu’il rencontre le Premier Ministre ».

 

Emmanuel Cuny « Oui, Dominique Marcel donne les détails dans un entretien accordé au journal Les Echos ce matin. 2.500 personnes vont être mises sur la touche avec la fermeture des remontées mécaniques. Mais, comme la compagnie des Alpes, ce sont également le Parc Astérix, le Futuroscope de Poitiers, ou encore le Musée Grévin, qui resteront eux aussi fermés pour les fêtes, le groupe ajoute à la liste 1.400 personnes. Donc, si on fait le bilan, stations de montagne + parcs et infrastructures de loisir, pour la Compagnie des Alpes, cela fera au total, 3.900 personnes sur le carreau pendant les vacances de Noël ».

 

Journaliste « Est-ce qu’on peut attendre un revirement de la part du Premier Ministre ? »

 

EC « Alors, association des maires de stations de montagne, domaines skiables de France, Présidents de régions, maires, élus, la pression est évidemment très forte, mais les conditions sanitaires demeurent. Or, tous les professionnels avaient préparé les protocoles sanitaires adaptés. Mais la décision de fermeture est tombée d’en haut. Tout le monde s’est retrouvé devant une décision jugée incompréhensible ? En tout cas un bilan très lourd que chacun n’hésitera pas à mettre sur la table ». 

 

Journaliste « Justement, Emmanuel, est-ce qu’on peut chiffrer le manque à gagner pour ces entreprises concernées ? »

 

EC « Alors, les stations de sports d’hiver représentent environ 120.000 à 150.000 salariés et essentiellement des saisonniers. La compagnie des Alpes, qui est filiales de la Caisse des Dépôts et des Consignations, le bras financier de l’État, est le leader mondial de l’exploitation des domaines skiables. Son chiffre d’affaires est déjà en baisse de 30%. Plusieurs élus des régions concernées montent évidemment au créneau pour réclamer la réouverture des remontées mécaniques. Les 250 stations montagnardes en France, représentent un chiffre d’affaires de 9 milliards d’euros. Alors, il va falloir un bon réseau 4G ou 5G pour que la visioconférence supporte la colère des élus et professionnels entre les régions concernées et Matignon ».

 

Le 5 décembre, la radio en remettait une couche (de neige ! A 2:27 du même enregistrement ici) : « A suivre aussi la neige qui est arrivée en montagne et les professionnels qui ont encore manifesté ce matin contre la fermeture des remontées mécaniques. C’est la pression aussi des professionnels de la montagne. Ils étaient près de 700 à défiler ce matin dans les rues de Chambéry, en Savoie, pour demander une réouverture des remontées mécaniques dans les stations de ski. Remontées qui seront fermées à Noël à cause de la crise sanitaire [5].

 

[5] Je trouve ce type de formulation totalement inacceptable de la part d’un radio publique. On entend parfois aussi « à cause de la pandémie » ou « à cause du coronavirus ». Non, c’est parfaitement faux ! Il faudrait dire et répéter à chaque fois que c’est à cause des décisions administratives qui ont été prises. Désolé, mais nul n’est obligé de prendre ce type de mesures restrictives dont on n’a jamais évalué l’impact sur l’évolution de la pandémie. Après-tout, la Suède, a-t-elle fermé les bars, restaurants, cinémas, a-t-elle confiné sa population, a-t-elle rendu le port du masque obligatoire ? Ce soir, 6 décembre, nous déplorons en France 55.155 décès officiels (DGS/Santé Publique France. Données reprises sur le site de Worldometers ici), auxquels il faut rajouter les 9.000 décès survenus à domicile et estimés par les médecins généralistes le 26 avril 2020 (ici), soient au total 64.155, pour une population de 67 millions d’habitants, ce qui équivaut à 958 décès par million d’habitants. En Suède, au même moment, 7.067 décès, soient pour une population de 10,1 millions d’habitants, 700 décès par million d’habitants. La France accuse donc une surmortalité covid-19 de 37% par rapport à la Suède. Cela signifie que si l’on avait pris les mêmes décisions que la Suède, nous aurions sauvé 19.247 vies… Et nous avons en France gagné 1 point de surmortalité en 3 jours (voir plus haut dans la chronique sous le tableau. Et ce n’est pas fini)

 

 

La radio d’information poursuivait (A retrouver en entier à 2:50 de l’audio : ici) « C’est d’autant plus regrettable, disent les professionnels, qu’elle est tombée en abondance depuis jeudi soir. 40 cm de neige ce matin par exemple dans la station de Vars, dans les Hautes-Alpes, et 60 à 70 cm sur les pistes. Nicole Gailland dirige l’office du tourisme de Vars et elle espère quand même attirer les vacanciers ».

 

Nicole Gailland « Ça y est, l’hiver s’installe à Vars, comme dans toutes les stations des Alpes du Sud. C’est vrai que c’est une situation absolument inédite. C’est triste, ben, on en parle depuis longtemps. Donc, on commence à s’y habituer. Et tous les professionnels des stations sont en train d’œuvrer pour essayer de, malgré tout, proposer aux vacanciers un séjour de Noël ou Nouvel An dans les meilleures conditions. En tous cas, leur proposer des expériences ressourçantes, apaisantes, ce dont ils auront besoin aussi. La montagne reste quand même un lieu de pratiques en dehors du ski, multiples, et on essaie de travailler pour recevoir nos visiteurs dans les meilleures conditions dans les prochaines semaines ».

 

Journaliste « Et plusieurs régions ont saisi le Conseil d’État contre la décision du gouvernement de fermer les remontées mécaniques pour les fêtes de Noël. Le Conseil d’État devrait se prononcer en début de semaine prochaine ».

 

Le lendemain matin Dimanche 6 décembre, France Info se faisait l’écho d’une fausse bonne nouvelle :

 

« L’info avec Armand Peyrou-Lauga, Bonjour »

 

AP-L « Bonjour, … A suivre aussi, les stations de skis qui réagissent au décret autorisant les remontées mécaniques pour les jeunes membres de la fédération française de ski… France Info, midi quatre, les stations de ski sont très réservées après le décret paru hier au journal officiel. Ce décret autorise l’ouverture des remontées mécaniques pour les moniteurs de ski et les mineurs membres d’un club affilié à la fédération française de ski, afin qu’ils puissent s’entraîner, et garder un haut niveau de pratique. Problème pour les stations. Ouvrir les remontées coûte cher et ces jeunes ne rapportent pas beaucoup d’argent aux stations de ski. Laurent Garcia est le Directeur de la station de Peyragudes dans les Hautes-Pyrénées ».

 

Laurent Garcia « Tout ce monde-là bénéficie soit de forfaits très spéciaux, hein, pouvant aller jusqu’à la gratuité dans certaines de nos stations ou des conditions extrêmement avantageuses. Donc, on a quand même quelques soucis d’ordre économique et de l’ordre de l’image qu’on va renvoyer à nos vacanciers. Certains pourraient skier et pas les autres. On se pose quand même la question de la façon dont les touristes présents vont réagir par rapport à cette forme de discrimination. Si on n’a pas une prise en charge en termes d’aides au plan économique, financier, ça nous parait compliqué, par ce que c’est un public qui par habitude est peu rémunérateur, voire pas rémunérateur. Là dans le cas présent, c’est un vrai casse-tête [6] »

 

[6] Un casse-tête pour Castex…

 

Nous aurions pu parler aussi du hochet qu’on nous a accordé avec la revoyure de l’attestation, nous autorisant enfin (mais est-ce suffisant ?) à nous promener 3 heures par jour et sans dépasser 20 km de rayon depuis notre domicile à partir du samedi 28 novembre. Or, depuis le couvre-feu instauré le samedi 17 octobre, nous ne pouvions pas nous promener en forêt, à moins d’en avoir une à moins d’un kilomètre de chez soi, contrairement aux chasseurs qui avaient bénéficié d’une dérogation. Cela avait ému le député européen Yannick Jadot (ici)

 

Au-delà de ces mesures administratives très contestables que nous venons de citer, la jauge dans les églises, la fermeture des remontées mécaniques alors que les stations de skis sont ouvertes (il est vrai sans les restaurants…), revenons pour conclure quelques secondes sur la fermeture des petits commerces dits « non-essentiels », et le report du « Black-Friday ».

 

Voici quelques photos assemblées que j’ai prises dans mon hypermarché préféré, le 8 novembre, en période de fermeture simultanée des petits commerces non-essentiels et des rayons « non-essentiels » dans les grandes surfaces, avant réouverture le samedi 28 novembre, première étape du (re)déconfinement.

Comme on peut le comprendre, la fermeture à la clientèle d’importantes surfaces commerciales, repousse les clients résiduels dans les zones encore ouvertes. On remarquera ici la cohue au rayon « fruits et légumes » et les déserts, non pas médicaux, mais commerciaux dans les autres parties de l’hyper…

 

De la même manière, il n’est pas nécessaire de sortir de l’ENA, pour admettre que lorsque l’on ferme des commerces sur une période conséquente, la réouverture va pousser la clientèle à venir en masse pour des achats de « rattrapage »

 

Exemple, le report du « Black-Friday »

 

Bref, diminuer les surfaces commerciales ou les durées d’ouverture des magasins, densifie la clientèle, un excellent moyen de « booster » la transmission virale !

 

Peut-être n’était-ce pas le résultat escompté par notre exécutif ?

 

Sans compter que l’obstination et l’entêtement de ceux qui nous gouvernent à rechercher des mesures restrictives pour freiner la propagation du virus, fait l’économie d’une réflexion sur la pertinence d’une telle stratégie. Alors que la Suède nous a montré que d’avoir misé sur l’intelligence collective, c’est-à-dire l’immunité acquise, non pas par un éventuel vaccin, mais bien par l’échange du virus entre bien portants, permettait d’éviter de nombreux morts par rapport à la doctrine qu’a généré le stupide principe de précaution…

 

 

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