Mona Ozouf ou l'imprudence de l'ignorance

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Estelle Fougères, pour FranceSoir
Publié le 09 juin 2021 - 16:54
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Mona Ozouf
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Gallimard
Mona Ozouf
Gallimard

«Entre le complotisme et la vérité, il n’y a parfois que quelques mois » ai-je lu récemment. Et si j’ai choisi cette phrase dont je ne connais pas hélas l’auteur, c’est pour vous inviter à repenser les mots très durs que vous avez eus à l’encontre du professeur Didier Raoult en le traitant de « criminel ».

Madame, vous qui avez rayonné sur la scène intellectuelle française pendant plusieurs décennies, vous auriez dû être plus prudente dans vos affirmations en allant aux sources afin de vérifier certaines données scientifiques et continuer ainsi à être ce que vous étiez, une chercheuse sérieuse. 

Hélas, les événements sanitaires qui nous affectent et qui perturbent le quotidien de chacun de nous sont peut-être l’une des raisons de vos propos que je trouve déraisonnables. J’avoue ne pas reconnaître la femme que j’ai toujours admirée et c’est peut-être à cause de l’intérêt que je vous porte que vos paroles m’ont tellement contrariée et que j’écris ces quelques lignes. Il n’en aurait certainement pas été de même avec quelqu’un dont la pensée m’indiffère. On est toujours plus intransigeant avec ceux que l’on aime, vous le savez bien. 

Vous qui avez collaboré avec l’historien François Furet pendant de très nombreuses années et dont les ouvrages sur la Révolution française ont défrayé la chronique dès le milieu des années 60 car il proposait une relecture qui allait à l’encontre des thèses historiographiques portées essentiellement par Albert Soboul, vous savez mieux que personne que l’histoire peut se réviser et que cela n’est pas un mot grossier.

Pourtant, en cette fin de XXème siècle, le terme a également été utilisé à tort ou à raison pour dénoncer les écrits de Robert Faurisson cet « historien » qualifié de révisionniste pour avoir nié l’existence des chambres à gaz et des camps de concentration et de tous ces morts qui firent de la Shoah le premier génocide industriel. Alors oui, le terme de révision peut être sujet à controverse. Et peut-être serait-il plus juste de qualifier Faurisson de négationniste plutôt que de révisionniste. 

Mais revenons à notre sujet et faisons un peu d’histoire des sciences. Pour cela, je me permets de vous rappeler quelques faits pour vous inviter à une autre lecture du travail de l’IHU Méditerranée-Infection composé de 800 chercheurs et médecins et dirigé par le professeur Didier Raoult. Et, qui sait, une meilleure connaissance de leurs recherches et de la prise en charge des quelques milliers de patients traités dans ce centre qui est l’un des plus importants en Europe dans l’analyse des pathologies infectieuses, vous donnera peut-être envie de réviser votre jugement. 

On a dû vous raconter que l’hydroxychloroquine tuait. Si tel était le cas et que le danger ait été avéré, elle n’aurait pas été laissé en vente libre jusqu’en janvier 2020 et on ne l’utiliserait pas depuis si longtemps pour diverses pathologies (malaria, lupus, polyarthrite rhumatoïde, Sars Cov 1 de 2003). Peut-être y aurait-il des plaintes de patients et des signalements aux agences de pharmacovigilance !? Mais il n’en est rien, celles-ci étant effectivement aujourd’hui submergées... mais par les effets indésirables des vaccins.

Mais passons sur l’hydroxychloroquine et comme le vaccin n’est pas ici le sujet, avançons un peu en remontant le temps pour découvrir le travail accompli par les marseillais. Et comme la pensée procède toujours par analogie, je me permettrai au passage de rappeler celui des parisiens qui, à de rares exceptions près, ont suivi les recommandations gouvernementales et européennes du moins dans un premier temps. 

Vous n’ignorez pas que pour comprendre un virus, il faut d’abord l’isoler, l’observer et l’analyser. Il y a l’étude du virus par le séquençage du génome et l’observation des malades qui en sont atteints. 

Savez-vous que ce sont les équipes de Marseille qui ont séquencé le plus grand nombre de génomes, près de 4000 ? Et que c’est par ce travail considérable qu’elles ont été les premières à comprendre la particularité de ce coronavirus qui se recombine avec des rhinovirus ce qui explique le très grand nombre de mutations. Et lorsque ces mutations sont importantes, on parle de variants. Le professeur Raoult et ses équipes ont communiqué aux autorités centrales dès Juillet 2020 sur l’existence de variants. Et qu’on fait les autorités en retour ? Elles ont pratiqué la politique de l’autruche et feint d’ignorer l’existence de ces variants et ce jusqu’en septembre 2020. 

L’observation des malades leur a permis de comprendre un phénomène particulièrement dangereux appelé l’hypoxie heureuse qui est la désaturation en oxygène que le patient ne ressent pas, phénomène traître qui est la cause de très nombreux décès, les patients arrivant trop tard à l’hôpital. Dès qu’ils ont compris ce décalage entre ce qu’affiche le petit moniteur appelé l’oxymètre de pouls et ce que ressent le patient, ils ont tenté d’alerter en insistant sur l’importance de « monitorer » les malades. Tout le monde peut acheter pour une somme modique un petit oxymètre de pouls dans une pharmacie et prendre sa saturation chez soi. Si les autorités et les agences sanitaires avaient fait leur devoir, elles auraient immédiatement relayé cette information vitale… Mais bien sûr, il n’en a rien été. 

Et alors qu’un décret du gouvernement autorisait à administrer le Rivotril aux personnes âgées, une sédation complètement contre-indiquée dans le cadre des virus respiratoires et qui pourrait avoir provoqué la mort de plusieurs d’entre elles, les soignants marseillais passaient dans les maisons de retraite pour repérer les fameux clusters et soigner les personnes les plus fragiles dès les premiers symptômes. Aidés du travail des marins pompiers qui prélevaient des échantillons des eaux usées chaque semaine dans toute la ville de Marseille pour repérer les quantités de virus en insistant sur les lieux proches des Ehpads, ils ont pu anticiper et éviter bien des drames pour ces résidents des établissements médico-sociaux à haut risque. 

Ils ont été également les premiers à dire qu’il fallait administrer à certains patients des anticoagulants pour éviter la formation de caillots et donner de l’oxygène à haut débit plutôt que d’intuber, ce qui reste un acte médical très invasif. Le ministre qui un temps voulait également faire passer un décret pour interdire l’azythromycine, s’est résolu dans sa communication du 21 février 2021 à parler d’antibiotique. Tout de même ! Chacun sait que si les antibiotiques n’agissent pas sur les virus, ils agissent sur les bactéries qui s’invitent dans plus de 50% des cas et pas seulement pour le Sars Cov 2. 

Et comme si cela ne suffisait pas, pour ajouter au désastre de cette gestion calamiteuse, les patients non traités et non monitorés qui arrivaient dans certains hôpitaux avec des formes graves, recevaient un traitement par Remdesivir, une molécule qui non seulement n’apportait aucune amélioration dans la prise en charge du Sars Cov 2 mais était très toxique pour les reins et le foie. Le 9 juillet 2020, le professeur Raoult a fait connaître sa position : « Le Remdesivir ne soigne pas. Pire, il cause des insuffisances rénales : sur les 5 premiers patients traités par ce médicament à l’hôpital Bichat, 2 ont été mis sous dialyse. » A-il été écouté ? Bien sûr que non. Il a fallu attendre un communiqué de l’OMS daté du 20 novembre 2020 dans lequel il est écrit que « le médicament antiviral Remdesivir n’est pas recommandé pour les patients admis à l’hôpital avec la Covid-19, quelle que soit la gravité de leur maladie. Car il n’y a actuellement pas de preuve qu’il améliore la survie ni qu’il permette d’éviter d’être placé sous ventilation artificielle ».

On peut regretter au passage la décision de la Commission européenne d’en avoir acheté pour un milliard le 8 octobre 2020, un jour trop tôt puisque le lendemain c’est-à-dire le 9 octobre 2020, l’Union Européenne était informée des résultats négatifs d’une étude réalisée dans 405 hôpitaux et 30 pays sur plus de 11 000 patients de la COVID 19 par l’Organisation Mondiale de la Santé. Cette étude rendue publique le 15 octobre 2020 conclut que « l’hypothèse que le Remdesivir peut empêcher une fraction substantielle des décès est absolument exclue ». Ces résultats n’étaient-ils pas connus au moment de l’achat ?

Si peu à peu le reste de la France allait suivre les recherches faites à Marseille en admettant les variants, en administrant antibiotiques, anticoagulants et oxygène, je remarque que personne ne leur a fait d’excuses et regrette que les insultes aient continué malgré la qualité des résultats obtenus puisque que l’IHU peut s’enorgueillir d’avoir les meilleurs de France soit 231 morts sur plus de 15 000 patients soignés. 

Vous voyez bien qu’à de rares exceptions, les Parisiens qui ont administré la France avec autorité en prenant la décision absurde d’enfermer toute la population, - une première dans l’histoire de pandémies, puisque même au Moyen-Âge, on enfermait les gens malades mais pas les gens bien portants - sont un peu la communauté des « platistes » du Sars-Cov 2. 

Vous qui êtes philosophe et historienne, s’il vous reste un tant soit peu de sagesse, je ne peux que vous inviter à mieux vous documenter. Je rappelais plus haut le sinistre Faurisson qui a passé sa vie à nier les crimes de l’idéologie nazie, prenez garde à ne pas inventer des crimes qui n’existent pas. Et qui sait, par le rappel de ces faits, aurez-vous peut-être envie d’approfondir le sujet pour réviser une histoire qui visiblement depuis le début vous échappe en proposant une historiographie de cette pandémie ?

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