Attentats déjoués à Paris : arrêté par hasard dimanche, un terroriste projetait de s'attaquer à des églises (SYNTHÈSE)

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JmC
Publié le 22 avril 2015 - 20:32
Mis à jour le 23 avril 2015 - 12:56
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François Hollande Manuel Valls Bernard Cazeneuve 22.04.2015
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©Philippe Wojazer/Reuters
Manuel Valls, Bernard Cazeneuve et François Hollande ce mercredi 22 à la sortie du conseil des ministres.
©Philippe Wojazer/Reuters
Ce sont des églises catholiques de Villejuif que visait un terroriste présumé qui a été arrêté par hasard dimanche 19 avril. L'homme, qui s'est blessé accidentellement, est en garde à vue à l'Hôtel-Dieu à Paris et avait apparemment reçu des consignes de Syrie pour commettre son attentat.

C'est par hasard que la police a déjoué dimanche dernier, 19 avril, un attentat près de Paris. Un terroriste présumé, apparemment téléguidé depuis la Syrie, projetait de s'attaquer à une ou plusieurs églises catholiques de Villejuif (Val-de-Marne), dans la banlieue sud de Paris.

L'homme a été arrêté dimanche mais ce n'est que mercredi matin que le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a annoncé la nouvelle.

Il s'agit d'un Algérien de 24 ans, Sid Ahmed Ghlam, étudiant en électronique, célibataire, arrivé en France en 2001 avec sa mère pour rejoindre, dans le cadre d'un regroupement familial, son père déjà installé à Saint-Dizier, en Haute-Marne.

L'homme habite dans le 13e arrondissement de Paris et appelle le SAMU dimanche, car il est grièvement blessé aux jambes, à la cuisse et à la rotule. Il prétend avoir été agressé par des inconnus.

Comme il s'agit de blessures par balles, le SAMU prévient les policiers, qui suivent les traces de sang et remontent jusqu'à la voiture du suspect. Ils y découvrent un véritable arsenal: "une kalachnikov chargée et 3 chargeurs, un pistolet Sig, un revolver Sphinx, trois téléphones, un ordinateur portable, un GPS et des documents manuscrits comportant des éléments sur des cibles potentielles et la manière d'opérer en vue de la commission d'un attentat", selon le procureur de la République de Paris, François Molins.

La section anti-terroriste du parquet de Paris est alors saisie et l'homme placé en garde à vue à l'Hôtel-Dieu à Paris, après avoir été soigné en urgence à La Pitié-Salpêtrière.

A son domicile, une perquisition permet de découvrir d'autres armes: "3 kalachnikovs supplémentaires, des chargeurs, des gilets pare-balle, des gilets tactiques, des brassards et des chasubles +police+, un caméscope, un appareil photo, un ordinateur et un disque dur, la somme de 2.000 euros en liquide ainsi que des documents en arabe relatifs à Al-Qaïda et à l'Etat islamique".

L'étude du matériel informatique saisi dans le véhicule et l'appartement du suspect permet rapidement d'établir qu'il "était en contact avec une autre personne pouvant se trouver en Syrie avec laquelle il échangeait sur les modalités de la commission d'un attentat, cette dernière lui demandant de cibler une église", selon François Molins.

Dès lors, pour les enquêteurs, c'est clair: Sid Ahmed Ghlam prévoyait d'attaquer "une ou deux églises" de Villejuif, endroit où il se trouvait dimanche matin, selon l'étude du GPS de sa voiture.

Et aussitôt les enquêteurs font le lien avec le meurtre, à Villejuif dimanche, d'une jeune femme de 32 ans, Aurélie Châtelain, retrouvée morte d'une balle à l'arrière de sa voiture. Les analyses ADN du suspect et de la jeune femme établissent vite le lien: Sid Ahmed Ghlam est considéré comme le meurtrier présumé d'Aurélie Châtelain, à qui il aurait vraisemblablement voulu voler sa voiture.

Le jeune homme n'était pas inconnu des services de police et de renseignement. Il avait disparu une semaine en Turquie (où passent la majorité des candidats au djihad en Syrie et en Irak) en 2015 et avait été placé en garde à vue à son retour, avant d'être relâché. Il avait alors fait part de ses velléités de départ en Syrie et avait donc été suivi par les services de renseignement, selon le procureur François Molins. Des investigations infructueuses mais qui avaient tout de même donné lieu à son fichage "S", c'est-à-dire "Sûreté de l'Etat". Sid Ahmed Ghlam avait par ailleurs un casier judiciaire vierge de toute condamnation et faisant seulement état d'une plainte déposée contre lui en août 2013 pour violences volontaires, un dossier classé sans suite après que la victime eut retiré sa plainte.

Un peu plus de trois mois après les attentats des 7, 8 et 9 janvier, cet attentat déjoué a provoqué de nombreuses réactions dans la classe politique. "Nous sommes toujours sous la menace terroriste", a réagi François Hollande dans l'après-midi, en direct de l'Elysée. Le président de la République a confirmé que le plan Vigipirate resterait à son niveau maximum actuel, et réaffirmé sa volonté "de toujours améliorer notre capacité de renseignement dans l'Etat de droit d'aujourd'hui et dans l'Etat de droit de demain", confirmant son souhait de voir le projet de loi renseignement adopté à l'Assemblée. Il a aussi appelé les Français à "être unis, rassemblés, avoir confiance dans la République (…)",  avant de conclure: "il ne faut pas céder au terrorisme, à ce qu'il recherche: créer la haine, la suspicion qui altèrerait les valeurs de la France".

Sous le hashtag #terrorisme, son principal opposant politique, le président de l'UMP Nicolas Sarkozy, a publié trois tweets appelant notamment à "être intraitable avec le terrorisme, c’est l’urgence, cela signifie s'adapter aux nouveaux enjeux de la menace" et estimant que "sur le plan des moyens donnés aux forces de police, il faut renforcer immédiatement les services spécialisés dans l’anti-terrorisme".

Suite aux attentats de janvier à Paris, les lieux de culte juifs, les rédactions des principaux médias français, et dans une moindre mesure les lieux de culte musulmans ont fait l'objet d'une intense protection policière et militaire dans le cadre du plan Vigipirate renforcé. Ce n'était pas le cas des lieux de cultes chrétiens (45.000 églises catholiques, 3.000 temples protestants et 1.800 églises évangélistes), qui ne peuvent matériellement pas tous être protégés par des militaires ou des forces de l'ordre.

Pour Monseigneur Olivier Ribadeau-Dumas, porte-parole de la Conférence des évêques de France, "il n'y a pas lieu d'instaurer un climat de peur et de crainte aujourd'hui (…). Il y a  aujourd'hui plus de 200 lieux de culte catholique en France qui sont protégés (…) Je crois que ce qui est important, c'est que les uns et les autres dans les églises aient une vigilance, mais qu'en même temps nous gardions toujours ce climat d'accueil et de bienveillance vis à vis de tous ceux qui entrent dans les églises", a-t-il déclaré sur RTL.

Dans la soirée, le Premier ministre Manuel Valls et son ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve se sont rendus dans deux églises de Villejuif, pour témoigner de "leur émotion et de leur soutien" aux responsables et aux membres de la communauté chrétienne.

 

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