Damien Abad : "si le parti devient clanique, la guerre des chefs n'en sera que plus forte", prévient le proche de Bruno Le Maire

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Pierre Plottu
Publié le 30 novembre 2014 - 17:55
Mis à jour le 01 décembre 2014 - 09:22
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Damien Abad, député de l'Ain.
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©Assemblée nationale
Damien Abad, membre de l'équipe de campagne de Bruno Le Maire, est également proche de Nicolas Sarkozy.
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Très proche de Bruno Le Maire, le député de l'Ain Damien Abad revient pour FranceSoir sur le score surprise de son champion lors du scrutin pour la présidence de l'UMP. Tout en rappelant que Bruno Le Maire est un fervent partisan de l'union du parti, il prévient Nicolas Sarkozy: le rassemblement ne se fera pas à n'importe quel prix.

C'était l'ambiance des grands soirs, presque une atmosphère de victoire, ce samedi soir après l'annonce des résultats, à l'hôtel Pullman où étaient réunis les soutiens de Bruno Le Maire... Si les 30% de votre candidat constituent un beau score, inattendu qui plus est, n'était-ce pas un peu exagéré?

"Bruno Le Maire nous a dit dès hier soir (samedi 29, NDLR) qu'il fallait bien sûr savourer ce résultat, car il est excellent face à un ancien chef de l'Etat et dans un parti bonapartiste avec le culte du chef, mais de faire preuve d'humilité".

 

Comment expliquez-vous le score de Bruno Le Maire?

"Cette victoire c'est celle du renouveau que Bruno Le Maire incarne et qui lui a permis de réaliser ce score. Les gens ont dit +on est au bout d'un système politique, de la manière dont un parti politique peut nous représenter et donc il nous faut un homme neuf, qui ait des pratiques nouvelles et exerce les responsabilités politiques de manière différente des autres+. Mais c'est aussi la victoire d'un homme. Bruno Le Maire s'est révélé à travers cette campagne, dont il est allé jusqu'au bout sans tomber dans les dérives, dans les petites phrases. C'est enfin la réussite d'une équipe qui a mouillé la chemise, et qui est allée chez Bruno Le Maire pas uniquement par intérêt ou calcul politicien mais par convictions profondes".

 

Les proches de Nicolas Sarkozy s'emploient déjà à relativiser ce score. Leur principal argument est que les 30% de Bruno Le Maire  sont en réalité constitués des voix des adhérents le soutenant, auxquelles s'ajouteraient celles des partisans d'Alain Juppé et de François Fillon…

"Je ne pense pas. Je crois que c'est un vote positif pour Bruno Le Maire, pas un vote contre Nicolas Sarkozy. Ça aurait pu l'être si Bruno Le Maire était tombé dans une logique anti-sarkozyste, ce qu'il n'a pas fait, ou s'il n'avait eu autour de lui que des gens "sarko-incompatibles". Ce n'est pas le cas: moi-même, par exemple, je suis proche de l'ancien chef de l'Etat. Je pense donc que ce vote traduit une inspiration pour le renouveau et non pas un vote de coalition de tous les anti-sarkozystes".

"Bruno Le Maire ne prendra aucun poste opérationnel au sein de la direction de l'UMP"

Bruno Le Maire est quand même proche d'Alain Juppé et de François Fillon?

"Oui, mais lors de la réunion que nous avons tenue ce matin (dimanche, NDLR), Bruno Le Maire nous a bien dit qu'il ne serait pas le prête-nom de combats politiques qui ne seraient pas les siens et qu'il ne tombera pas dans le piège des guerres de personnes. Il n'entend pas être le faire-valoir d'Alain Juppé ou de François Fillon, ce n'est pas sa vocation".

 

Avez-vous déjà pris contact avec les jupéistes et les fillonistes?

"Non. Bruno Le Maire a dit qu'il ne participerait à aucune entreprise anti-sarkozyste et aucun contact n'a donc été pris".

 

Maintenant que la victoire de Nicolas Sarkozy est actée et qu'il est le président de votre parti, si "le renouveau c'est Bruno" (le slogan de campagne de Bruno Le Maire, NDLR), le rassemblement c'est désormais Nico (Sarkozy)?

"Nous sommes et avons toujours été dans une logique de rassemblement et d'unité du parti et nous considérons que notre famille politique doit toujours prévaloir sur les logiques personnelles. C'est donc dans cette logique de rassemblement que nous allons travailler avec Nicolas Sarkozy dans la structuration d'un nouveau parti politique. Nous allons donc prendre pleinement notre part dans cette organisation. On a fait 30% des voix et on ne peut pas avoir les deux pieds en dehors du parti, on ne peut pas laisser les militants orphelins de ces 30%. Nous prendrons nos responsabilités tout en gardant bien sûr notre liberté à laquelle, je crois, Bruno Le Maire est très attaché. Nicolas Sarkozy a été élu président, nettement, nous sommes la bonne surprise de ce scrutin, avec ce score qui dépasse nos espérances. C'est au président qu'il revient de rassembler et il faudra désormais faire naître l'alchimie entre l'expérience de l'ancien chef d'Etat et le renouveau politique qu'incarnent Bruno Le Maire et ses équipes".

 

Bruno Le Maire ne participera donc pas à la direction de l'UMP?

"Bruno Le Maire ne prendra aucun poste opérationnel au sein de la direction de l'UMP, pour garder sa liberté. Mais il participera néanmoins à la vie du parti et il entend bien que ses troupes politiques pèsent dans le parti".

"La primaire sera un enjeu politique majeur"

Vous allez donc participer à l'UMP, mais reste à savoir à quelle UMP, tant Nicolas Sarkozy semble déterminé à remodeler totalement le parti….

"Nicolas Sarkozy a été élu en disant qu'il changerait le nom de l'UMP, la démocratie doit donc s'appliquer. Mais est-ce qu'un changement de nom c'est aussi un changement de stratégie et de ligne politique? On verra. Ce qui est sûr c'est que l'UMP doit se renouveler en profondeur et qu'il y a des choses qui ne sont plus acceptables, il y a donc un gros travail de refondation à faire. Mais au-delà de ce changement de nom, ce qui est important c'est de savoir ce que l'on veut faire de ce parti politique, comment on veut dépasser la droite pour faire d'un parti étriqué à 200.000 militants un parti de masse qui nous fait entrer dans la modernité, à l'image de ce qui se fait dans les autres pays européens".

 

Suite à l'annonce des résultats, de nombreux ténors de l'UMP ont réagi pour en appeler à un renouveau… qui est d'ailleurs le slogan de campagne de Bruno Le Maire. La fin de cette élection pour la présidence ne serait-elle que le début d'une guerre des chefs à l'UMP?

"L'antidote à la guerre des chefs, c'est le renouveau. Si on veut éviter cette guerre, il faut que Nicolas Sarkozy lui-même ait l'intelligence d'esprit d'ouvrir le jeu, de rassembler et de comprendre qu'il y a aussi la volonté des militants et des Français de faire de la politique autrement. S'il le comprend, l'UMP sera préservée de la guerre des chefs. Mais effectivement si le parti se recroqueville sur lui-même et devient clanique, la guerre des chefs n'en sera que plus forte. Mais je crois que la volonté de Nicolas Sarkozy, il l'a d'ailleurs dit dans cette campagne, c'est de ne pas faire de clan, ni de bureau politique partagés à la Yalta comme on en a connus entre copéistes et fillonistes".

 

Redoutez-vous déjà des points de tension?

"Il faut attendre de voir comment cela se passera, mais ce qui est certain c'est que la primaire sera un enjeu politique majeur, d'autant que celle-ci vise à dégager notre leader pour 2017 et faire qu'il n'y ait qu'un seul candidat pour faire en sorte de gagner l'élection présidentielle".

 

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