Etat d'urgence : l'Assemblée nationale vote son inscription dans la Constitution

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 09 février 2016 - 08:32
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Les députés dans l'hémicycle.
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©François Guillaut/AFP
Le texte prévoit que l'état d'urgence puisse être instauré "en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public" ou de "calamité publique".
©François Guillaut/AFP
L'inscription de l'état d'urgence dans la Constitution a été votée lundi par l'Assemblé nationale à une large majorité. Le texte prévoit qu'il soit décrété en Conseil des ministres face à des événements exceptionnels et fixe sa durée à 12 jours, renouvelable pour quatre mois.

L'Assemblée nationale a voté lundi soir l'article 1er du projet de révision constitutionnelle visant à inscrire dans la loi fondamentale le régime de l'état d'urgence, disposition contestée par certains écologistes et le Front de gauche, comme par certains députés de droite.

La déchéance de nationalité, pomme de discorde majeure de la révision constitutionnelle et objet de plusieurs réécritures pour la faire passer à gauche, va agiter mardi l'hémicycle, au dernier jour des débats.

Le premier volet du projet de loi constitutionnelle, qui prévoit que l’état d’urgence sera "décrété en Conseil des ministres" soit "en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public", soit en cas de "calamité publique" (événements naturels), a été adopté par 103 voix contre 26, en présence notamment de Manuel Valls. Comme actuellement, seul le Parlement pourra proroger l’état d’urgence au-delà des douze jours initiaux, par une loi en fixant la durée.

Avec l'avis favorable du gouvernement, les députés ont voté peu avant un amendement de l'UDI pour restreindre la durée de prorogation à une période maximale de quatre mois, renouvelable après un vote du Parlement.

Face aux interrogations de certains députés, tel Jean-Frédéric Poisson (Les Républicains), sur le choix de quatre mois, le président de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde a évoqué, entre autres, un parallèle avec le délai au terme duquel le Parlement se prononce sur les interventions militaires de la France.

Le Premier ministre, selon lequel cette durée "ne repose pas sur des éléments précis", a jugé que cette borne de quatre mois "ne modifie pas fondamentalement l'équilibre par rapport à ce qui a été voté de trois mois (pour l'état d'urgence en vigueur, NDLR) et donne un peu plus de marge". Cela semble "raisonnable" en donnant "suffisamment de temps pour faire face au type de menaces que nous connaissons et de permettre au Parlement de le contrôler et de le proroger si nécessaire", selon lui.

Pour Jean-Frédéric Poisson, aucun de ces "arguments ne justifie pleinement" ce passage à quatre mois pour un régime "pas attentatoire aux libertés fondamentales mais quand même restrictif".

Les députés ont aussi ajouté dans le texte de révision constitutionnelle le principe du contrôle parlementaire de la mise en œuvre de l'état d'urgence, souhaité par plusieurs groupes politiques, mais jugé superflu par certains députés LR.

Au grand dam du gouvernement ainsi que de la droite, ils ont aussi voté un amendement socialiste prévoyant que l'Assemblée nationale se réunit de plein droit et ne peut être dissoute pendant l'état d'urgence.

Mais ils ont rejeté l'inscription de la compétence du juge administratif quant aux mesures de police administrative, le gouvernement considérant que c'est sa compétence naturelle. Les parlementaires ont aussi refusé qu'une loi organique, et non un simple loi ordinaire, fixe les mesures de police administrative autorisées.

Face aux assauts notamment de Cécile Duflot (EELV) pour encadrer davantage l'état d'urgence, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a lâché: "comme si l'état d'urgence était le danger, pas le terrorisme". Depuis les attentats de novembre, 83% des assignés à résidence et 61% des perquisitions (hors de zone de la préfecture de police de Paris) ont concerné "des personnes dans l'islamisme radical", qui étaient fichées, et le reste portait sur des "réseaux délinquants" pouvant être en lien, a-t-il affirmé.

Des écologistes, des socialistes "frondeurs", l'élu d'extrême droite Gilbert Collard ainsi que des députés Les Républicains tels Pierre Lellouche et Bernard Debré ont en vain cherché à supprimer cet article 1er, synonyme de "recul de nos libertés", selon les mots de Noël Mamère (groupe écologiste).

Mais pour le nouveau garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, "les libertés publiques s'en porteront mieux" et "dans toutes les législations européennes, les états d'exception figurent dans la Constitution".

François Hollande a souhaité le 16 novembre devant le Parlement réuni en Congrès trois jours après les attentats un nouveau "régime constitutionnel" pour l'état d'urgence. Selon Manuel Valls, cela doit permettre d'encadrer "strictement les motifs de son déclenchement et de sa prorogation", repris de la loi de 1955, loi qui a créé ce régime d'exception en pleine guerre d'Algérie et été durcie en novembre.

 

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