Hervé Mariton : Nicolas Sarkozy "prétend abroger la loi Taubira sans l'abroger"
Beaucoup jugent que l'élection pour la présidence de l'UMP est un scrutin joué d'avance, tant Nicolas Sarkozy paraît favori. Pourquoi vous être néanmoins présenté?
"Nicolas Sarkozy est assurément très favori. En même temps, une élection est l'occasion d'un choix, d'une décision des militants. Ce choix n'est pas tracé à l'avance. En particulier quand je propose une candidature qui est articulée sur des choix, je pense, très rationnels et efficaces. En premier lieu, l'élément fondamental de ma candidature est que le président de l'UMP ne doit pas être candidat à la primaire. Je suis le seul des trois candidats à dire cela. Au fond, je suis le seul à garantir que l'UMP ne périsse pas par la culture des chefs, que ce soient les chefs d'hier ou ceux qui s'inventent comme tel. Les adhérents et les parlementaires, qui sont une cinquantaine à me soutenir, sont convaincus par la logique de ce propos. J'ai donc bon espoir que la logique d'organisation puisse l'emporter sur les habitudes".
La culture du chef fait pourtant partie de l'ADN de l'UMP...
"Je pense que le monde bouge, que la société évolue et qu'il y a par ailleurs plusieurs cultures historiques à l'UMP, les arguments d'autorité ne suffisent donc pas. Bien sûr qu'il faut un chef, j'aspire d'ailleurs à être le chef du parti, mais ça ne veut pas dire que tout vient du chef. Est-ce qu'un parti a besoin d'une organisation solide? La réponse est oui. Est-ce que cette organisation a besoin d'un chef? La réponse est oui. Mais je pense que le culte du chef n'est plus du tout adapté au monde politique d'aujourd'hui".
Vous êtes l'opposant le plus constant au mariage pour tous, dont vous réclamez l'abrogation. Que répondez-vous à ceux qui jugent que c'est impossible car ce serait inconstitutionnel?
"Personne n'a été capable de le démontrer. Des juristes forts éminents considèrent qu'il n'y a pas de difficultés constitutionnelles à cela. Le meilleur référent c'est encore le Conseil constitutionnel qui, quand la loi Taubira a été votée, a considéré qu'il n'y avait pas de problème constitutionnel. Cela veut dire que l'abrogation de la loi serait aussi en accord avec la Constitution. On est là aussi sur des arguments d'autorité: des gens disent que c'est impossible, mais ils ne l'ont jamais démontré".
Nicolas Sarkozy, qui s'est déclaré pour l'abrogation de la loi Taubira lors du meeting donné face aux militants du mouvement Sens Commun, s'est-il fait déborder par la foule?
"Nicolas Sarkozy était venu avec sa proposition de deux mariages, ce qui est donc le maintien de l'article-1 de la loi Taubira, qui est le pilier de cette loi. Il prétend donc abroger la loi Taubira sans l'abroger. Ensuite, sur la forme, il ne s'est probablement pas maîtrisé".
A la fin de ce discours, il vous a reproché de ne pas l'avoir applaudi. L'ambiance a semblé tendue…
"Quand je ne suis pas d'accord avec un discours je n'applaudis pas".
Il vous en veut?
"Apparemment. C'est la vie".
Récemment, certains ont évoqué la création de "centres de désendoctrinement" pour les djihadistes français qui reviendraient sur le territoire. Qu'en pensez-vous?
"Tout d'abord, c'est évident que le retour sur le territoire ne peut pas se faire avec un bouquet de fleurs. Cela suppose à la fois des sanctions pénales lourdes, dont il faut créer le cadre juridique, mais aussi un travail de fond. Il ne suffit pas de mettre ces personnes dans une prison, où elles pourront en influencer d'autres, il faut aussi les désintoxiquer. Sur la question des +centres de désendoctrinement+, je ne sais pas à quoi cela ressemblerait… Peut-être à un séminaire? (rires). J'ai du mal à comprendre la portée exacte de cette proposition".
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